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La Nouvelle Rosalie Prudent

Fiche de lecture : La Nouvelle Rosalie Prudent. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Février 2015  •  Fiche de lecture  •  1 349 Mots (6 Pages)  •  1 630 Vues

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ROSALIE PRUDENT

Il y avait vraiment dans cette affaire un mystère que ni les jurés, ni le président, ni le procureur de la République lui-même ne parvenaient à comprendre.

La fille Prudent (Rosalie), bonne chez les époux Varambot, de Mantes, devenue grosse à l’insu de ses maîtres, avait accouché, pendant la nuit, dans sa mansarde, puis tué et enterré son enfant dans le jardin.

C’était là l’histoire courante de tous les infanticides accomplis par les servantes. Mais un fait demeurait inexplicable. La perquisition opérée dans la chambre de la fille Prudent avait amené la découverte d’un trousseau complet d’enfant, fait par Rosalie elle-même, qui avait passé ses nuits à le couper et à le coudre pendant trois mois. L’épicier chez qui elle avait acheté de la chandelle, payée sur ses gages, pour ce long travail, était venu témoigner. De plus, il demeurait acquis que la sage-femme du pays, prévenue par elle de son état, lui avait donné tous les renseignements et tous les conseils pratiques pour le cas où l’accident arriverait dans un moment où les secours demeureraient impossibles. Elle avait cherché en outre une place à Poissy pour la fille Prudent qui prévoyait son renvoi, car les époux Varambot ne plaisantaient pas sur la morale.

Ils étaient là, assistant aux assises, l’homme et la femme, petits rentiers de province, exaspérés contre cette traînée qui avait souillé leur maison. Ils auraient voulu la voir guillotiner tout de suite, sans jugement, et ils l’accablaient de dépositions haineuses devenues dans leur bouche des accusations.

La coupable, une belle grande fille de Basse-Normandie, assez instruite pour son état, pleurait sans cesse et ne répondait rien.

On en était réduit à croire qu’elle avait accompli cet acte barbare dans un moment de désespoir et de folie, puisque tout indiquait qu’elle avait espéré garder et élever son fils.

Le président essaya encore une fois de la faire parler, d’obtenir des aveux, et l’ayant sollicitée avec une grande douceur, lui fit enfin comprendre que tous ces hommes réunis pour la juger ne voulaient point sa mort et pouvaient même la plaindre.

Alors elle se décida.

Il demandait : « Voyons, dites-nous d’abord quel est le père de cet enfant ? »

Jusque-là elle l’avait caché obstinément.

Elle répondit soudain, en regardant ses maîtres qui venaient de la calomnier avec rage.

— C’est M. Joseph, le neveu à M. Varambot.

Les deux époux eurent un sursaut et crièrent en même temps : « C’est faux ! Elle ment. C’est une infamie. »

Le président les fit taire et reprit : « Continuez, je vous prie, et dites-nous comment cela est arrivé. »

Alors elle se mit brusquement à parler avec abondance, soulageant son cœur fermé, son pauvre cœur solitaire et broyé, vidant son chagrin, tout son chagrin maintenant devant ces hommes sévères qu’elle avait pris jusque-là pour des ennemis et des juges inflexibles.

— Oui, c’est M. Joseph Varambot, quand il est venu en congé l’an dernier.

— Qu’est-ce qu’il fait, M. Joseph Varambot ?

— Il est sous-officier d’artilleurs, m’sieu. Donc il resta deux mois à la maison. Deux mois d’été. Moi, je ne pensais à rien quand il s’est mis à me regarder, et puis à me dire des flatteries, et puis à me cajoler tant que le jour durait. Moi, je me suis laissé prendre, m’sieu.

Il m’répétait que j’étais belle fille, que j’étais plaisante… que j’étais de son goût… Moi, il me plaisait pour sûr… Que voulez-vous ?… on écoute ces choses-là, quand on est seule… toute seule… comme moi. J’suis seule sur la terre, m’sieu… j’n’ai personne à qui parler… personne à qui compter mes ennuyances… Je n’ai pu d’père, pu d’mère, ni frère, ni sœur, personne ! Ça m’a fait comme un frère qui serait r’venu quand il s’est mis à me causer. Et puis, il m’a demandé de descendre au bord de la rivière, un soir, pour bavarder sans faire de bruit. J’y suis v’nue, moi… Je sais-t-il ? je sais-t-il après ?… Il me tenait la taille… Pour sûr, je ne voulais pas… non… non… J’ai pas

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