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L'utilité de la littérature

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Par   •  8 Juillet 2013  •  4 437 Mots (18 Pages)  •  3 318 Vues

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« Le seul moyen de supporter l’existence est de s’étourdir dans la littérature comme dans

une orgie perpétuelle. » Lettre de Flaubert à Mlle Leroyer de Chantepie, le 12 décembre 1857.

« Le livre est une fenêtre par laquelle on s’évade » Julien Green. Le livre semble en effet avoir ce pouvoir, cette capacité d’happer, d’envelopper le lecteur ou l’écrivain, dans un monde dont il prend totalement possession. Ce monde il peut l’aimer, le détester, le transformer, le détruire ou le rendre meilleur. Ce monde est à lui. Il devient le refuge le plus plaisant et le plus efficace pour fuir la réalité de l’existence. Flaubert dira lui même, dans une lettre adressée à Mlle Leroyer de Chantepie en 1857, que « le seul moyen de supporter l’existence, est de s’étourdir dans la littérature comme dans une orgie perpétuelle. » On s’interroge alors. Qu’entend Flaubert lorsqu’il parle d’un étourdissement dans la littérature ? De quelle manière peut-on y accéder ? N’y a-t-il pas un certain risque, comme dans tout excès ? Ce moyen décrit par l’auteur peut-il réellement fonctionner ? N’est-ce la que la seule utilité de la littérature ?

Jeudi 17 Septembre 2009.

Pour réfléchir au propos de Flaubert en tentant de n’omettre aucune face du débat, nous nous poserons la question suivante, à savoir : De quelle manière utiliser la littérature pour aborder une existence qui écoeure et révolte ? Dans un premier temps, nous étudierons la pensée de Flaubert et verrons en quoi s’étourdir dans la littérature peut-il permettre de mieux supporter l’existence. Nous discuterons dans un second temps, de la difficulté néanmoins présente, d’un tel objectif. Enfin, nous verrons que « s’étourdir » dans la littérature n’est pas forcément le meilleur et le seul moyen de supporter l’existence.

Dans cette citation de Flaubert, le caractère de l’existence n’est pas débattu, il n’est même pas discutable pour l’auteur qui le présente

comme un fait établi. Le sujet ne porte pas sur la condition supportable ou non de l’existence, mais plutôt sur le moyen de l’accepter, de la tolérer. Pour Flaubert c’est un fait, l’existence est pénible. Cependant, il faut vivre, et le seul moyen pour cela, selon lui, est de s’étourdir dans la littérature. Nous allons donc nous concentrer sur ce terme d’« étourdir » qui est un terme très fort. Flaubert ne conseille pas de s’impliquer ou de se plonger dans la littérature, il invite à s’y distraire jusqu’à perdre la pleine conscience de soi même. De là, la comparaison avec l’orgie prend tout son sens. On rappelle que les orgies sont des parties d’extrêmes débauches, où aux excès de la table, s’ajoutent des débordements sexuels. A l’origine en Grèce, elles étaient des fêtes consacrées à Dionysos.

Flaubert s’exprime en toute connaissance de cause. Il découvre en effet très jeune, et au lycée de Rouen plus particulièrement, cette passion enfouie en lui : « les pensums finis, la littérature commençait, et on se crevait les yeux à lire au dortoir des romans. On portait un

poignard dans sa poche, comme Antony....Mais quelle haine de toute platitude ! Quels élans vers la grandeur ! » Cette transe excessive qui l’agitait se plaque tout à fait sur le conseil qu’il donne à la destinataire de sa lettre. Il décrit ici une véritable frénésie de lecture qui arrêtait le temps, qui l’incitait à lire jusqu’à ce que son propre corps ne soit plus en mesure de suivre l’évasion de son esprit : « on se crevait les yeux à lire ». La réalité ne fait alors plus qu’un avec la fiction, Flaubert se comporte comme les héros de ses lectures : « On portait un poignard dans sa poche, comme Antony... » C’est cet état d’étourdissement dont l’auteur fait l’éloge. Etat qui est selon lui, le seul permettant à l’Homme de s’évader.

C’est ce comportement de l’être humain qu’évoque aussi Pascal dans ses Pensées. Il y décrit dans le chapitre VIII intitulé Divertissement, cette nécessité chez l’Homme de se divertir pour ne point penser à la condition misérable de son existence. Pascal ne se fixe pas à la littérature comme Flaubert, et ne cautionne pas totalement cette attitude chez l’Homme mais elle fait partie selon lui de l’espèce humaine : « ils ont un instinct secret qui les porte à chercher le divertissement et l’occupation au-dehors, qui vient du ressentiment de leurs misères continuelles. » Ces propos sont intimement liés à la perception évoquée plus haut de la littérature. Pascal explique que l’Homme cherche par nature à oublier son existence en se divertissant, Flaubert continue dans la lancée en présentant selon lui, le seul moyen d’y arriver.

Soit, la position de Flaubert est comprise. Reste maintenant à savoir, de quelle manière accéder à l’orgie en tant que telle ? Car l’écrivain est précis, et les termes qu’il utilise le sont aussi. L’implication dans la littérature se veut être excessive, elle doit réussir à happer, à absorber le lecteur ou l’écrivain de manière à ce qu’il prenne suffisamment de recul, de distance avec l’existence. C’est selon Flaubert, l’unique moyen d’en endurer les effets. Et c’est là que la littérature puise toute sa force car l’homme y trouvera deux possibilités d’évasion : L’évasion à travers la possession d’une autre existence, d’une existence fictive qui doit prendre au final la place de la réalité. L’être humain vit alors les aventures et péripéties des personnages dont il suit les histoires. Il vit leurs vies. Son existence est celle de ses héros. Et l’évasion en tant que spectateur transi. Son regard se détache de sa propre existence pour se concentrer sur celle de personnages, plus dramatique ou au contraire plus alléchante, plus captivante. Il n’a alors plus d’existence qui lui est propre, il contemple celles des autres. Et cela, que l’on considère la position de l’écrivain ou la position du lecteur, les deux étant intimement liées.

La lecture va en effet permettre l’évasion via la découverte d’un monde parallèle, plus ou moins attractif, mais qui d’une manière incontestable, va susciter l’intérêt du lecteur, sa curiosité vers quelque chose d’inconnu, vers une histoire qui lui est étrangère car différente de la sienne. Poussé par ce désir, le lecteur plonge dans un monde complet qui a été peint et soigneusement décrit par l’écrivain tout en laissant une part d’imaginaire qui permet à chacun de l’affectionner encore plus.

Ainsi, le lecteur va modeler sur un fond de paysage déjà attachant, ce qui lui permettra de s’approprier personnellement

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