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L'assommoir, Zola Chapitre 10 Commentaire Composé

Mémoires Gratuits : L'assommoir, Zola Chapitre 10 Commentaire Composé. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  21 Août 2014  •  1 743 Mots (7 Pages)  •  9 363 Vues

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Extrait du chapitre 10:

Au milieu de cette existence enragée par la misère, Gervaise souffrait encore des faims qu'elle entendait râler autour d'elle. Ce coin de la maison était le coin des pouilleux, où trois ou quatre ménages semblaient s'être donné le mot pour ne pas avoir du pain tous les jours. Les portes avaient beau s'ouvrir, elles ne lâchaient guère souvent des odeurs de cuisine. Le long du corridor, il y avait un silence de crevaison, et les murs sonnaient creux, comme des ventres vides. Par moments, des danses s'élevaient1, des larmes de femmes, des plaintes de mioches affamés, des familles qui se mangeaient pour tromper leur estomac. On était là dans une crampe au gosier générale, bâillant par toutes ces bouches tendues ; et les poitrines se creusaient, rien qu'à respirer cet air, où les moucherons eux-mêmes n'auraient pas pu vivre, faute de nourriture. Mais la grande pitié de Gervaise était surtout le père Bru, dans son trou, sous le petit escalier. Il s'y retirait comme une marmotte, s'y mettait en boule, pour avoir moins froid ; il restait des journées sans bouger, sur un tas de paille. La faim ne le faisait même plus sortir, car c'était bien inutile d'aller gagner dehors de l'appétit, lorsque personne ne l'avait invité en ville. Quand il ne reparaissait pas de trois ou quatre jours, les voisins poussaient sa porte, regardaient s'il n'était pas fini. Non, il vivait quand même, pas beaucoup, mais un peu, d'un œil seulement ; jusqu'à la mort qui l'oubliait ! Gervaise, dès qu'elle avait du pain, lui jetait des croûtes. Si elle devenait mauvaise et détestait les hommes, à cause de son mari, elle plaignait toujours bien sincèrement les animaux ; et le père Bru, ce pauvre vieux, qu'on laissait crever, parce qu'il ne pouvait plus tenir un outil, était comme un chien pour elle, une bête hors de service, dont les équarrisseurs2 ne voulaient même pas acheter la peau ni la graisse. Elle en gardait un poids sur le cœur, de le savoir continuellement là, de l'autre côté du corridor, abandonné de Dieu et des hommes, se nourrissant uniquement de lui-même, retournant à la taille d'un enfant, ratatiné et desséché à la manière des oranges qui se racornissent sur les cheminées.

1 - des danses s'élevaient : des coups étaient donnés (expression familière)

2 - équarrisseurs : personnes qui traitent les cadavres d'animaux non utilisés en boucherie.

L’Assommoir est un roman écrit par Émile Zola et publié en 1877, il appartient au mouvement littéraire naturaliste, dont Zola en a été le principal fondateur. Le naturalisme affirme la volonté de décrire la réalité telle qu’elle est et non telle qu’elle ne devrait être. Un assommoir, dont le titre y fait référence, est un débit de boissons où les gens du peuple s’assomment d’alcool.

Cet extrait décrit un sombre tableau de la réalité des gens de la classe ouvrière à travers la misère et la famine.

De quelle façon Émile Zola dénonce-t-il la misère de la classe ouvrière?

Nous étudierons d’abord le tableau pathétique que fait Zola de la classe ouvrière, puis nous analyserons les deux personnages du Père Bru et de Gervaise aux attitudes contrastées pour enfin préciser la prise de conscience de la misère.

Zola dresse dans cet extrait un tableau pathétique de la classe ouvrière par de nombreux procédés. Il installe d’abord un univers sordide appuyé par la personnification de la famine qui devient un personnage symbolique: « Gervaise souffrait encore des faims qu’elle entendait râler autour d’elle » (l.1-2), « La faim ne le faisait même plus sortir » (l. 11-12). Le champ lexical de la faim est très présent dans le texte : « faim » (l.1), « ne pas avoir du pain tout les jours » (l. 3), « odeurs de cuisine » (l.4), « ventre vide » (l.5), « mioches affamés » (l.6), « des familles qui se mangeait pour tromper leur estomac » (l. 6-7), « bouche tendues » (l.8), « faute de nourriture » (l.9), « faim » (l.11), « appétit » (l.12), « se nourrissant uniquement de lui-même » (l.20-21), et on la retrouve également dans la comparaison ligne 5 : « les murs sonnaient creux, comme des ventres vides ». Cet univers sordide est considéré comme un monde d’exclus : « coin des pouilleux » (l.2), « dans son trou sous le petit escalier » (l.10).

On y découvre une atmosphère angoissante notamment provoquée par le champ lexical de la misère et de la souffrance : « existence enragée par la misère » (l.1), « souffrait » (l.1), « râler » (l.2), « silence de crevaison » (l.5), « des danses s’élevaient » (l.5-6), « larmes de femmes » (l.6), « plaintes de mioches affamés » (l.6), « crampe au gosier générale » (l.7), « cet air, où les moucherons eux-mêmes n’auraient pas pu vivre » (l.8-9), « pitié » (l.9), « la mort qui l’oubliait » (l.15).

On la remarque aussi par un contraste entre les sons puisque l’on retrouve le champ lexical des cris et des lamentations ainsi que celui du silence : « entendait râler autour d’elle » (l.2), « des danses s’élevaient » (l.5-6), « des larmes de femmes

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