Ecriture D'invention

Souba comprit. Il comprit qu’il ne serait en paix avec lui-même que lorsqu’il aurait réalisé le palais. Il sentait que cela était de son devoir de rendre hommage à sa sœur délaissée. Il sentait que cette mission était faite pour lui et qu’elle venait clore sa vie de voyages. Il se devait de parcourir le monde une dernière fois, en quête d’un lieu exceptionnel, à l’image de Samilia. S’il avait pu, Souba aurait mis tous les enchantements du monde dans ce lieu dédié à sa sœur. A ses yeux, cet édifice devrait être un véritable havre de paix pour tous les voyageurs. Le repos et le bien-être qu’il leur procurait apaiseraient en quelque sorte les souffrances de son aînée.

Au dos de sa mule il reprit alors le cours d’un voyage que seul le hasard permettrait d’arrêter. En effet, c’est seulement lorsque Souba tomberait sur cet endroit éminent que sa quête prendrait véritablement fin et que sa vie pourrait bel et bien commencer. Il partit dans la direction opposée de celle où il était venu. Des terres entières restaient alors à découvrir. Instinctivement, il caressa l’encolure de sa mule, fidèle servante vouée à la réalisation de son souhait, comme pour lui dire « va maintenant, c’est la dernière fois ». Les motivations qui le guidaient n’étaient pas semblables à celles qui l’animaient lors de son précédent voyage. Cette fois-ci Souba n’avait été chargé de rien, personne ne l’avait nommé pour quelque mission que ce soit, il s’en était acquitté de son plein gré, par nécessité. Sa sœur avait été pour lui ce qu’une mère fut pour d’autres, attentionnée et ferme à la fois. La nostalgie l’animait, mais ce n’était pas tout. Une forme de colère prenait aussi une certaine place dans son cœur. La colère émanant par le comportement de ses frères, les jumeaux, Sako et Danga, ayant laissé la vie de Samilia se décomposer par le temps, au point de devenir un véritable enfer.

A dos de mule il parcourait le monde qui s’offrait à lui. De ce côté-ci, de jour en jour le paysage restait quasiment identique puisqu’un désert s’étendait à perte de vue. Alors qu’il pensait rebrousser chemin, il aperçut au loin une tâche qui bougeait. Il songea alors à un mirage. Son esprit le fourvoyait. Il fit halte au milieu de nul part afin de reprendre ses esprits. Cependant, la tâche se rapprochait et se transformait progressivement en un amas de couleurs flamboyantes. Il entendit ensuite un bruit au loin. Un bruit irrégulier et familier, celui du souffle haletant d’un troupeau de chevaux.

Des rubans aux couleurs diverses dans le crin donnaient à ces majestueuses bêtes des airs irréels. Certaines étaient montées, d’autres portaient seulement des paniers en tissu, toujours aux couleurs mirobolantes. Ces magnifiques créatures étaient la propriété d’un peuple nomade. Il était exclusivement composé d’hommes qui ne ressemblaient en rien à ceux que Souba avait pu croiser jusqu’à ce jour. Ils étaient de petite taille et possédaient des dizaines d’anneaux à chaque oreille. Leurs tuniques bleues transcendaient le paysage. A eux tous, ils semblaient former un arc-en-ciel qui donnait au paysage, si prévisible jusqu’alors, une touche de magie.

L’un d’eux prit alors la parole dans un dialecte que Souba ne maitrisait pas. Il était impressionné, car pour la première fois depuis le début de son périple,

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