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Vivre Dans La Rue De Jacques Hassin

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Par   •  5 Décembre 2014  •  1 113 Mots (5 Pages)  •  1 230 Vues

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Des gens vivent dans les rues de nos villes. C'étaient les Gueux, les Va-nu-pieds, les Inutiles au monde. Ce sont les Sans domicile fixe, les Clochards, les Zonards. Ils seraient aujourd'hui 10 à 15000 à Paris, dont 15% de femmes. Comment ces personnes vivent-elles ? Et comment peut-on les aider ?

Comment vit-on dans la rue ?

J'évoquerai ici l'expérience qui peut être celle de ces gens. Je le ferai depuis ma place de soignant, qui m'offre une vision forcément partielle. Certains signes permettent cependant de saisir, de l'extérieur, ce que vivent ces personnes. Ils concernent en particulier le rapport au corps, ainsi que le rapport au temps et à l'espace.

Manger, boire, dormir

Dans la rue, on meurt tôt - la moyenne d'âge de cette population est de 53 ans. On y meurt le plus souvent de maladies qui auraient pu être soignées. Car la santé n'est pas le premier souci, l'hygiène non plus : le corps, ce sont d'abord les besoins vitaux.

Chaque soir il faut trouver où dormir. Chaque jour il faut trouver à manger. On s'étonne parfois de ce qu'« ils font la manche pour acheter de l'alcool et des cigarettes ». Oui. Et l'inverse est tout aussi vrai : beaucoup disent qu'ils sont incapables de faire la manche s'ils ne sont pas ivres. Pour ces personnes qui consomment parfois jusqu'à 10 litres de vin par jour, on peut parler d'« alcoolomanie ».

La résistance à la douleur et à la dégradation physique s'accroît d'autant. Les lésions corporelles ne sont pas soignées. Il peut sembler étonnant que quelqu'un refuse un traitement au risque, par exemple, de se faire amputer. Mais pour se représenter ce que serait la vie avec une jambe en moins, il faut une perception globale de son corps, au-delà des besoins immédiats - il faut pouvoir se projeter dans l'avenir.

Enfermés dans le présent

Quand nous arrivons à entrer en contact et à parler avec eux, les gens de la rue font presque toujours état d'un changement brutal, d'un grand malheur arrivé dans leur vie : avant, j'avais une vie normale ; puis il y a eu un accident ; j'ai perdu mon boulot, mon logement, et je me suis retrouvé à la rue. Mais ces récits de vie recouvrent d'autres choses : ces gens ont souvent connu, dans leur enfance, la violence, l'abandon familial, l'inceste - et ces histoires-là ne se racontent pas au tout-venant.

Autre phénomène, disons-le, troublant : ces personnes ne se suicident pas. Quand on connaît leurs conditions de vie, comment ne pas se dire : « si j'étais à leur place... » ? Mais se suicider, c'est refuser un avenir. Or pour les gens de la rue, l'avenir n'existe pas. Il est nié.

Tout ce qui est nouveau est perçu comme menaçant. Leurs rendez-vous avec des médecins et des assistants sociaux sont presque toujours manqués. Ce sont des gens qui vivent sans aucun calendrier, en s'enfermant peu à peu dans la répétition mécanique du présent. Quand on est à la rue, il n'y a plus de jours de la semaine, plus de mois ni d'années : le temps se déroule de manière circulaire.

Isolés dans l'espace public

Il faut le dire avec force : personne, vraiment personne, ne peut choisir de vivre une vie pareille. Le plus difficile, c'est sans doute l'isolement psycho-affectif. Comme le dit Xavier Emmanuelli, ce sont des « hommes invisibles » - qui pourtant sont toute la journée à côté de nous. Mais les passants, ils passent : le contact direct n'existe plus, les regards se détournent.

Vivre

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