Biographie de Jean de la Bruyère

Jean de La Bruyère, né à Paris le 17 août 1645 et mort à Versailles le 10 mai 1696, est un moraliste français. La Bruyère est célèbre pour une œuvre unique, Les Caractères ou les Mœurs de ce siècle (1688). Cet ouvrage, constitué d’un ensemble de brèves pièces littéraires, compose une chronique essentielle de l’esprit du XVIIe siècle. La Bruyère est l’un des premiers écrivains à mettre en avant le style littéraire, en développant un phrasé rythmé dans lequel les effets de rupture sont prépondérants. Ce style incite à la lecture à haute voix, donnant ainsi à cette activité le statut de jugement moral grâce à l’effet rhétorique obtenu par la lecture orale sur les auditeurs. Nombre d’écrivains ont suivi le chemin stylistique tracé par La Bruyère : depuis Marivaux jusqu'à Honoré de Balzac et Marcel Proust, en passant par André Gide. La première édition des Caractères paraît à Paris, chez Étienne Michallet, sous ce titre : les Caractères de Théophraste, traduits du grec, avec les Caractères ou les Mœurs de ce siècle. L'ouvrage comptait cent pages de traduction et deux cents pages originales. Le nom de l’auteur ne figure sur aucune édition publiée de son vivant. Cette première édition qui contient surtout des remarques, connait un succès très vif. Deux autres éditions paraissent dans la même année 1688, sans que La Bruyère ait le temps de les augmenter notablement. En revanche, la 4e édition (1689) reçoit plus de 350 caractères inédits ; la cinquième (1690), plus de 150 ; la sixième (1691) et la septième (1692), près de 80 chacune ; la huitième (1693), plus de 40, auxquels il faut ajouter le Discours à l’Académie. La vente de son ouvrage n’enrichit point La Bruyère, qui d’avance en a destiné le produit à doter la fille de son libraire Michallet. La Bruyère est parfois présenté comme une sorte de réformateur, de démocrate, un « précurseur de la Révolution française ». Il critique les abus mais respecte les institutions. Son principe est de montrer aux gens leurs défauts afin qu'ils puissent se corriger. Il reconnaît même que certains maux sont inévitables. Le ton des Caractères est presque constamment celui de la plus mordante satire. Il ressent profondément, malgré son affectation d’indifférence stoïcienne, l’inégalité du mérite et de la fortune. Son grand grief contre la société du XVIIe siècle est précisément de ne pas faire la place au mérite personnel. Son humeur aigrie est admirablement servie par un style incisif, âpre et nerveux. Sa phrase, courte, brusque, saccadée, est déjà celle du XVIIIe siècle ; le réalisme de l’expression, la crudité de certains traits, la tendance à peindre l’extérieur, les gestes des personnages, sont presque du XIXe. Il est le premier écrivain pour qui le style ait eu une valeur propre, indépendante du sujet. Il est le premier en date des stylistes.

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