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Une Certaine Tendance Du Cinéma Français

Note de Recherches : Une Certaine Tendance Du Cinéma Français. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  17 Mars 2015  •  5 040 Mots (21 Pages)  •  825 Vues

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DIX OU DOUZE FILMS...

 

Si le cinéma Français existe par une centaine de films chaque année, il est bien entendu que dix ou douze seulement méritent de retenir l'attention des critiques et des cinéphiles, l'attention donc de cesCahiers.

Ces dix ou douze films constituent ce que l'on a joliment appelé la Tradition de la Qualité, ils forcent par leur ambition l'admiration de la presse étrangère, défendent deux fois l'an les couleurs de la France à Cannes et à Venise où, depuis 1946, ils raflent assez régulièrement médailles, lions d'or et grands prix.

Au début du parlant, le cinéma Français fut l'honnête démarquage du cinéma américain. Sous l'influence de Scarface nous faisions l'amusant Pépé le Moko. puis le scénario Français dut à Prévert le plus clair de son évolution, Quai des brumes reste le chef d'oeuvre de l'école dite du réalisme poétique.

La guerre et l'après-guerre ont renouvelé notre cinéma. Il a évolué sous l'effet d'une pression interne, et au réalisme poétique - dont on peut dire qu'il mourrut en refermant derrière lui Les portes de la nuit - s'est substitué le réalisme psychologique, illustré par Claude Autant-Lara, Jean Delannoy, René Clément, Yves Allégret et Marcel Pagliero.

 

DES FILMS DE SCENARISTES

 

Si l'on veut bien se souvenir que Delannoy a tourné naguère Le Bossu et La Part de l'ombre, Claude Autant-Lara Le Plombier amoureux et Lettres d'amour, Yves Allégret La Boîte aux rêves et Les Démons de l'aube, que tous ces films sont justement reconnus comme des entreprises strictement commerciales, on admettra que les réussites ou les échecs de ces cinéastes étant fonction des scénarios qu'ils choisissent, La Symphonie pastorale, Le Diable au corps, Jeux interdits, Manèges, Un homme marche dans la ville sont essentiellement des films de scénaristes. Et puis l'indiscutable évolution du cinéma français n'est-elle pas due essentiellement au renouvellement des scénaristes et des sujets, à l'audace prise vis-à-vis des chefs-d'oeuvre, à la confiance, enfin, faite au public d'être sensible à des sujets généralement qualifiés de difficiles? C'est pourquoi il ne sera question ici que des scénaristes, ceux qui, précisément, sont à l'origine du réalisme psychologique au sein de la Tradition de la Qualité : Jean Aurenche et Pierre Bost, Jacques Sigurd, Henri Jeanson (nouvelle manière), Robert Scipion, Roland Laudenbach, etc...

NUL N'IGNORE PLUS AUJOURD'HUI...

Après avoir tâté de la mise en scène en tournant deux courts métrages oubliés, Jean Aurenche s'est spécialisé dans l'adaptation. En 1936 il signait, avec Anouilh, les dialogues de Vous n'avez rien à déclarer etLes Dégourdis de la 11e. Dans le même temps Pierre Bost publiait à la N.R.F. d'excellents petits romans. Aurenche et Bost firent équipe pour la première fois en adaptant et dialoguant "Douce", que mit en scène Claude Autant-Lara. Nul n'ignore plus aujourd'hui qu'Aurenche et Bost ont réhabilié l'adaptation en bouleversant l'idée que l'on en avait, et qu'au vieux préjugé du respect à la lettre ils ont substitué, dit-on, celui contraire du respect à l'esprit, au point qu'on en vienne à écrire cet audacieux aphorisme : "Une adaptation honnête est une trahison" (Carlo Rim, "Travelling et Sex-appeal").

DE L'EQUIVALENCE...

De l'adaptation telle qu'Aurenche et Bost la pratiquent, le procédé dit de l'équivalence est la pierre de touche. Ce procédé suppose qu'il existe dans le roman adapté des scènes tournables et intournables et qu'au lieu de supprimer ces dernières (comme on le faisait naguère) il faut inventer des scènes équivalentes, c'est-à-dire telles que l'auteur du roman les eût écrites pour le cinéma.

"Inventer sans trahir", tel est le mot d'ordre qu'aiment à citer Jean Aurenche et Bost, oubliant que l'on peut aussi trahir par omission. Le système d'Aurenche et Bost est si séduisant dans le l'énoncé même de son principe, que nul n'a jamais songé à en vérifier d'assez près le fonctionnement.

C'est un peu ce que je me propose de faire ici.

Toute la réputation d'Aurenche et Bost est établie sur deux points précis :

1) La fidélité à l'esprit des oeuvres qu'ils adaptent;

2) Le talent qu'ils y mettent.

CETTE FAMEUSE FIDELITE...

Depuis 1943 Aurenche et Bost ont adapté et dialogué ensemble : "DOUCE" de Michel Davet. "LA SYMPHONIE PASTORALE" de Gide, "LE DIABLE AU CORPS" de Radiguet, "UN RECTEUR A L'ILE DE SEIN" (DIEU A BESOIN DES HOMMES) de Queffelec, "LES JEUX INCONNUS" (JEUX INTERDITS) de François Boyer, "LE BLE EN HERBE" de Colette. De plus ils ont écrit une adaptation du"JOURNAL D'UN CURE DE CAMPAGNE" qui n'a jamais été tournée, un scénario sur "JEANNE D'ARC" dont une partie seulement vient d'être réalisée (par Jean Delannoy) et enfin scénario et dialogues deL'AUBERGE ROUGE (mis en scène par Claude Autant-Lara). On aura remarqué la profonde diversité d'inspiration des oeuvres et des auteurs adaptés. Pour accomplir ce tour de force qui consiste à rester fidèle à ,l'esprit de Michel Davet, Gide, Radiguet, Queffelec, François Boyer, Colette et Bernanos, il faut posséder soi-même, j'imagine, une souplesse d'esprit, une personnalité démultipliée peu communes ainsi qu'un singulier éclectisme.

Il faut aussi considérer qu'Aurenche et Bost sont amenés à collaborer avec les metteurs en scène les plus divers; Jean Delannoy, par exemple, se conçoit volontiers comme un moraliste mystique. Mais la menue bassesse du GARCON SAUVAGE, la mesquinerie de LA MINUTE DE VERITE, l'insignifiance de LA ROUTE NAPOLEON montrent assez bien l'intermittence de cette vocation. Claude Autant Lara, au contraire, est bien connu pour son non-conformisme, ses idées "avancées", son farouche anti-cléricalisme; reconnaissons à ce cinéaste le mérite de rester toujours, dans ses films, honnête avec lui-même. Pierre

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