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Que signifie pour l’homme « être sujet » ?

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Par   •  16 Avril 2021  •  Dissertation  •  2 440 Mots (10 Pages)  •  462 Vues

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Que signifie pour l’homme « être sujet » ?

                En septembre 2014, Luka Rocco Magnotta, surnommé le « dépeceur de Montréal », s’avoue l’auteur dès le premier jour des audiences du meurtre de Lin Jun, mais ses avocats plaident « non coupable », compte tenu de son état mental au moment des faits. Sa défense vise à le faire reconnaître comme pénalement irresponsable, parce que souffrant de schizophrénie. Cette pathologie se caractérise par des troubles de la conscience, du langage et du comportement et s’accompagne d’une perte de contact avec la réalité. Elle s’oppose par là même à la notion  de sujet, qui recouvre la capacité d’un individu d’avoir conscience de lui-même et de son identité et offre une évidence du sentiment de son existence.

Le mot "sujet" vient du latin subjectum qui a pour très large sens "ce qui est dessous ». Dans le langage courant, on constate une pluralité des sens : grammatical, le sujet d'une phrase, c'est le terme qui commande le sens de la phrase ; thématique, le sujet d'une conversation, d'un tableau, d'un film, ce dont on parle, ou encore politique, c’est lorsqu'une personne se soumet à une autorité, à une instance supérieure. Dans la philosophie moderne, le sujet désigne plus précisément ce qui s'oppose à l’objet et tient donc à l'existence d'une âme ou d'une subjectivité.

Il s’agira dès maintenant de comprendre ce principe lorsqu’il se rapporte à l’homme, et de savoir quels éléments, facteurs et phénomènes doivent être pris en considération pour le définir.

Pour ce faire, nous nous pencherons initialement sur la question de la conscience, puis sur sa constitution, avant d’en aborder les limites.

 

                En premier lieu, « être sujet » c’est avoir conscience de soi. La disposition de notre conscience nous donne le statut d’êtres  lucides et responsables de nos actes. La conscience de soi peut être définie comme le savoir intérieur immédiat que l’homme possède de ses propres pensées, sentiments et actes. Cette notion ne se réduit pas à l’idée de la « conscience spontanée », le fait d’être éveillé et attentif, puisqu’elle peut être directement apparentée à l’idée d’âme ou de psychisme. Elle devient de fait un lieu de vie intérieure et l’expression de notre « Moi », marque de notre identité.

        Plus qu’un simple être vivant, l’homme se distingue des choses. Il est le producteur de la pensée, par opposition à l’objet, produit par le sujet qui pense, ce dont il est conscient. Selon Hurssel, la conscience implique une forme ambiguë de dualité et d’unité entre le sujet et l’objet, il parle d’intentionnalité pour désigner l’acte par lequel la conscience se rapporte à l’objet qu’elle vise. Il affirme que « la conscience  est toujours conscience de quelque chose », et que c’est là son essence. Le monde nous est présent grâce à l’activité de la conscience. Le sujet se place alors devant le monde, la conscience se caractérise avant tout par la distance qui existe entre moi et moi-même et entre moi et le monde extérieur. D’une part, ce dernier ne peut être saisi, pour le sujet conscient, que par l’intermédiaire des sens, qui le mettent en rapport avec le réel sensible situé hors de lui : c’est ce qu’on appelle la sensation. Celle-ci serait à la fois un outil d’adaptation lié à l’instinct de conservation et l’origine de nos idées. Locke suppose que « rien n’est dans l’esprit qui n’ait d’abord été dans les sens ». Plusieurs sensations, (au sens d’usage de nos cinq sens) accumulées conduisent à la perception d’une chose. Cependant, l’essence d’un objet se différencie de son apparence, et n’est donc pas qu’un assemblage de qualités sensibles. D’autre part, la conscience et la connaissance de soi passent nécessairement par la présence d’autrui, en tant que celui qui est à la fois comme moi et un autre que moi, un alter ego. Cette intersubjectivité désigne la relation réciproque des consciences les unes avec les autres, comme étant à l’origine de la constitution d’un monde commun.

        Aussi, il est important de faire la différence entre substance étendue et substance pensante. L’étendue d’un corps correspond à la proportion et la manière spécifique dont il occupe l’espace dans le réel. Pour Descartes, l’homme est une substance pensante, absolument distincte du corps : il sait qu’il est l’objet de pensées et qu’il a le pouvoir de dire « Je ». Cette capacité exprime le pouvoir unificateur de la conscience. Cette théorie est soutenue par Kant, pour qui l’homme est le seul, à partir d’un certain âge, à se représenter par le simple pronom « Je ». Dans son Anthropologie du point de vue pragmatique, il s’exprime ainsi : « Avant de dire Je, l’enfant avait simplement le sentiment de lui-même ; désormais ; il en a la pensée. » Grâce à ce « Je », l’homme a en effet la possibilité de se qualifier lui-même comme étant doué de raison, capable de penser et de se diriger lui-même. L’existence du sujet devient dès lors une certitude que rien ne peut remettre en cause, ce qu’exprime très clairement la formule « cogito ergo sum » (« Je pense donc je suis », Discours de la méthode, Descartes). Cette caractéristique première de la conscience humaine est le propre d’une  subjectivité qui enferme le sujet dans un point de vue particulier pouvant déformer les choses. L’homme se révèle à ce titre contradictoire et parfois obscur à lui-même, car il croit savoir, mais peut tout à fait se tromper sur les choses et sur sa propre personne. Cette subjectivité peut se dissocier par exemple de l’objectivité de la Nature. On parle de « comportements » et de « réactions », lorsqu’il s’agit d’un animal, et non pas de ses « actes » ou de ses « actions », même s’il ne faut pas oublier qu’il possède une vie psychique propre, à travers des émotions et des rêves.

        Par ailleurs, le terme « conscience » s’accompagne le plus souvent du terme « morale », à savoir la connaissance et la différenciation du bien et du mal, du juste et de l’injuste. Il rend l’homme juge de ses propres actions et constitue sa dignité. Mais à la question « la conscience fait-elle la grandeur ou la misère de l’homme ? », Pascal répond qu’elle fait aussi bien l’une que l’autre. La « voix de la conscience », la « bonne » ou la « mauvaise conscience », sont des valeurs innées et universelles sans lesquelles le sujet ne pourrait se guider. Ce sont pourtant ces mêmes valeurs qui arrachent l’homme à l’innocence du monde, et lui ouvrent les yeux, notamment sur l’univers et sur le fait qu’il est condamné à mourir.

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