L'art est-il explicable?

L'art est-il explicable ?

        La définition de l’œuvre d'art est particulièrement problématique. Selon une première dentition classique, l'art est une création d'objet dotées de caractères esthétiques, c'est à dire capables de toucher la sensibilité. Or selon une seconde définition l'art est une activité de création désintéressée, ainsi la phrase « l'art pour l'art » de Théophile Gauthier prend tout son sens. L'art contemporain notamment ne permet pas de donner des critères de ce qu'est une œuvre d'art, il y aurait donc des critères pour qu'une œuvre devienne une œuvre d'art. Expliquer, c'est rendre intelligible une chose, en dévoilant ses causes. L'explication apporte donc une forme de connaissance.  Expliquer une œuvre d'art, serait-ce donner les causes à l'origine de son statut artistique ?

Peut-on répondre par une « explication » à la question « pourquoi cette œuvre est-elle une œuvre d'art  ? » Ne peut-on pas supposer que ce qui rend artistique une œuvre est plutôt de l'ordre du sentiment que de l'ordre de la raison ? Ou alors « Tout ce que l'esprit produit est-il explicable ? »

        Toute œuvre consiste souvent en la reproduction de corps, d’apparence visant toujours une émotion esthétique. De cette façon, un certain savoir technique chez l’artiste est indispensable afin de pouvoir mettre en forme ce qu’il essaie d’exprimer à travers l’œuvre d’art. Mais tout ce que l'esprit produit est-il explicable ? On peut expliquer une œuvre d’art de plusieurs façons, tout d’abord, on peut tenter de l’expliquer techniquement. Les trois composantes de l’œuvre sont : la composante sensorielle, la composante affective et la composante de sens. La composante sensorielle permet de toucher celui qui regarde l’œuvre par le biais de sensations, les couleurs et les sons représentent donc un véritable langage qui parle à l'âme. La couleur provoque « une vibration sur l'âme » selon Kandinsky. La composante de sens qui provoque une recherche de sens lorsque l’œuvre comporte un élément mystérieux ou absurde comme par exemple les « ready-made » de Duchamp qui ont révolutionné l'art comme Fontaine en 1917. On appelle cela l'art conceptuel : le concept est plus fort que la réalisation esthétique de cette œuvre alors selon Baudelaire « le beau est toujours bizarre » . La composante affective va elle jouer sur les émotions et la sensibilité, ainsi la beauté de l’œuvre va compter. Or une œuvre d'art n'est pas nécessairement belle car la beauté est relative et les normes de beauté évoluent grâce notamment à l'évolution des techniques, c'est justement la signification que nous y trouvons et les sentiments que l’œuvre nous procure qui en fait la beauté "L’œuvre d’art n’est pas la représentation d’une belle chose, mais la belle représentation d’une chose. » Kant.

On appelle classicisme l’idée selon laquelle l’œuvre d’art obéit à des règles qu’on peut définir et qu’on peut apprendre. Ces règles sont appelés les canons. Par exemple, dans la peinture classique, il y a toujours une organisation géométrique : une œuvre réussie est une œuvre où l’on ne peut voir cette organisation. Une œuvre d’art n’est qu’une représentation utilisant la technique. Tout le monde peut devenir artiste, être artiste consiste en l’apprentissage de certains savoirs techniques indispensables pour créer une œuvre d’art. Cette explication de l’art ne va pas sans poser de problèmes : en effet, comment est-il possible d’établir des règles communes à partir de la diversité des œuvres d’art ? En effet, pour Kant, la beauté libre est l'expression d'un acte créateur qui ne suit aucune norme, aucun but, aucun concept, c'est cette beauté qui représente la beauté artistique.  Chez Platon, l'artiste qui imite le monde sensible en respectant toutes ses règles (mimésie) est prisonnier et se prive de la connaissance et de la vérité. La théorie des canons exprime la beauté adhérente qui est la représentation parfaite d'un objet que l'on retrouve dans la nature. La pluralité des composantes de l’œuvre et la pluralité des opérations de création entraîne des difficultés à interpréter le sens de l’œuvre.

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