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Étude de la pièce de théâtre Kean de Dumas

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Par   •  13 Décembre 2012  •  2 367 Mots (10 Pages)  •  1 999 Vues

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Introduction

Annonce du plan : Dans un dialogue dramatique, elle révèle, face à un Kean plus réservé, sa personnalité passionnée d’héroïne romantique et fait l’éloge du théâtre et de ses vertus.

I. La progression dramatique du dialogue : régularité, variété et suspense

1. La structure de la scène : régularité et variété

La scène se déroule au rythme du récit d’une guérison presque miraculeuse – trois jours ont suffi – marquée par des repères temporels précis : commencée « le jour même » (l. 9), dans « la soirée » du premier jour, et se poursuit « Le surlendemain » (l. 32), puis « Le lendemain » (l. 40).

Ce long récit progresse en quatre temps, sensibles dans la mise en page même : quatre longues répliques d’Anna sont à peine interrompues par trois questions laconiques de Kean, construites symétriquement, qui donnent au récit sa régularité mais aussi l’accélèrent.

2. Une guérison miraculeuse

Anna, dans les lignes qui précèdent l’extrait, décrit les symptômes de sa maladie – une grave « dépression » (on parlait alors de « neurasthénie ») –, qui la rendait indifférente à tout comme le marque la triple négation (« Je ne désirais rien, je n’espérais rien, je n’aimais rien »). À la fin de la scène, elle rappelle cet état critique, toujours sous le signe de la négation, dans un groupe ternaire plein d’émotion (« Je languissais sans force, sans désir, sans espoir »), ou sous le signe du manque (« mon sein était vide, mon âme en avait fui, ou n’y était pas encore descendue »...).

Son récit décrit presque médicalement son état physique : le vocabulaire du corps est très présent – « sang, cœur, yeux, oreilles, mains, bouche... » –, ainsi que celui des fonctions vitales : « respirer, parler, dire », « toutes les sensations amassées ». Anna énumère les symptômes cliniques qui marquent le début de la guérison : elle éprouve un sentiment « douloureux », puis un éblouissement («m’éblouirent»), une sensation d’étouffement; « muette et immobile », « froide et silencieuse [...], mais déjà ranimée et vivante », elle peut « parler déjà », ses « larmes coulent»... La guérison enfin est ramassée dans un groupe ternaire saisissant qui rend compte du progressif retour à la vie : « je commençais [...] à respirer, à sentir, à vivre ». Dans son récit, Anna Damby fait alterner le passé simple et l’imparfait pour mieux rendre sensibles les étapes de chaque « traitement » : le passé simple rend compte des circonstances spatio-temporelles du «traitement» («J’entrai dans la salle»; « Je rentrai à l’hôtel»; «on me conduisit»; «Je retournai »...), mais indique aussi l’élément qui sert de remède « déclencheur » : « toutes ces lumières m’éblouirent », « j’entendis une voix », « on me conduisit au More de Venise », « j’y trouvai la tête sombre et pâle d’Hamlet»... Enfin, il traduit les manifestations extérieures de cette guérison : « Je restai muette », « ce fut toujours le même ravissement », « mes mains battirent, ma bouche applaudit... ».

L’imparfait, lui, détaille les impressions intimes ; Anna Damby revit ses moments dans leur intensité et essaie d’analyser en profondeur les sensations qui l’envahissaient : « Cette voix disait des vers mélodieux... », « ce n’était plus la même voix ». Cette alternance dans les temps donne au récit un ton et un rythme variés.

3. Un récit à deux voix : le suspense

La scène se fait à deux voix que tout semble opposer : d’un côté une jeune femme, riche et malade, appartenant à la haute société, de l’autre un homme, acteur célèbre ; la première s’exprime avec volubilité et effusion, les répliques du second sont laconiques. Il semble qu’il n’y ait pas entre eux de véritable communication, comme si Anna, revivant son histoire, n’entendait pas son interlocuteur : seul un pronom personnel de la deuxième personne (« vous », l. 42), indique qu’elle sent vaguement sa présence, mais, en fait, s’adresse-t-elle vraiment à Kean, ou, à travers lui, au spectateur ?

Cependant, la forme du dialogue a une fonction dramatique. Les questions de Kean relancent la confidence d’Anna, comme celles d’un psychanalyste suscitent la remontée des souvenirs du patient ; elles assurent la dynamique de la scène. Par ailleurs, leur forme interrogative crée le suspense : le spectateur a, tout autant que Kean, envie de connaître l’identité de l’acteur capable de créer autant d’émotions chez les spectateurs.

Enfin, elles révèlent le personnage même de Kean : sont-elles la marque d’un certain recul de sa part, de son intérêt pour ainsi dire professionnel pour les effets que le jeu d’un acteur provoque sur un public ? Car l’acteur qui jouait Roméo, Othello, Hamlet, on s’en doute, c’est bien lui : il peut ainsi observer – avec un certain plaisir et une certaine fierté ? – les qualités de son propre jeu à travers le récit d’Anna. Est-ce de la curiosité et le senti- ment que, si l’acteur a su toucher ainsi cette spectatrice, l’homme qu’il est saura aussi séduire la jeune femme dans la vie ?

II. Anna, une héroïne de drame romantique

Le tempérament d’Anna, tel qu’il apparaît dans son récit, s’accorde bien aux passions tumultueuses des héros shakespeariens qu’elle vient de découvrir... Elle présente les caractéristiques de l’héroïne-type de drame romantique.

1. Le « moi » envahissant : une sensibilité exacerbée :
corps et « âme »
Pour les Romantiques, le « moi » n’est pas haïssable, bien au contraire. Aussi le récit d’Anna est-il entièrement centré sur elle-même. Les indices de la première personne, le plus souvent comme sujets des verbes, projetés en début de phrase, envahissent son discours. Son récit révèle une sensibilité frémissante et ses émotions passent d’abord par tous ses sens. Le verbe « sentir » apparaît plusieurs fois (l. 18, 56) et se décline tout au long du texte en sensations variées: elles sont liées au toucher et à l’odorat –

l’« atmosphère est chaude et embaumée », puis « l’air » apporte « un peu de fraîcheur » –, et à la vue à travers les « lumières » qui « éblouirent » ses « yeux ». Mais c’est l’ouïe qui prédomine, comme en témoigne le champ lexical de la « voix » : le mot est répété à trois reprises, puis rappelé par le vocabulaire de la parole – « vers », « paroles », « prononcer »... – ou de la musique comme « mélodieux ». La « voix » de l’acteur

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