Une Vie, Maupassant : Chapitre 6 extrait 2

Le rattrapage économique n’est il qu’un mythe?

Pritchett, économiste à la Banque Mondiale, a déclaré que l’accroissement des écarts de richesse entre les pays riches et les pays pauvres était “la caractéristique dominante de l’histoire économique moderne”. En effet, les différences de développement selon les régions et les pays sont parfois frappantes : selon une enquête du Programme des Nations Unies pour le Développement, le niveau de vie d’un habitant du Sierra Leone était le même que le niveau de vie mondial à la fin du 19e siècle. Pourtant, certains pays anciennement peu développés semblent avoir pris conscience de leur situation et, grâce à des politiques qui améliorent le niveau de vie de la population, ont pu entamer un rattrapage économique : c’est le cas de la Chine qui a pu observer une baisse de la pauvreté, passée de 60 à seulement 5% depuis les dernières dizaines d’années.

Le rattrapage économique est le fait qu’un pays peu développé puisse atteindre un niveau normal de développement après une période de retard par rapport aux grandes puissances développées, voire à croître plus rapidement puisque leur retard leur permet une marge de manoeuvre supérieure. On parle aussi de convergence puisque ces économies convergent vers un niveau similaire de développement. Cependant, ce phénomène n’est pas aussi simple que ce qu’avancent certains théoriciens car il reste compliqué à mettre en place et n’est pas automatique. On observe des difficultés pour certains pays à lutter contre les inégalités et l’écart entre pays développés à économies de marché (PDEM) et pays en voie de développement (PED) persiste et est au coeur des questionnements économiques aujourd’hui.

Ainsi, le rattrapage économique ne serait-t-il qu’un mythe ?

Il serait possible d’atteindre la convergence si les PED adoptaient des politiques qui garantiraient une croissance stable (partie I) mais malgré cette avancée, le rattrapage économique est impossible en réalité (partie II). Finalement, la convergence est légèrement observable empiriquement mais n’est pas viable à long terme (partie III).

Le rattrapage économique a été analysé par de nombreux économistes et est aujourd’hui un phénomène d’actualité pour de nombreuses économies anciennement peu développées et qui ont pu s’affirmer sur la scène internationale. Ainsi, il est possible d’atteindre la convergence des économies lorsque les pays en voie de développement mettent en place des politiques qui garantissent une croissance et un niveau de vie stable. Nous verrons tout d’abord quelles sont les solutions pour entamer le processus de rattrapage (partie A) puis leurs conséquences en démontrant que la convergence a des fins différentes selon les pays (partie B).

Un pays en voie de développement a plusieurs solutions et possède le plus souvent de nombreux outils pour entamer le processus de rattrapage économique. En effet, Solow déclare que la plupart des pays sont pauvres car ils sont faiblement dotés en capital. Cependant, en raison de cette faible dotation en capital, ils devraient pouvoir envisager un rendement de l’investissement plus élevé que pour les pays riches et ainsi observer leur niveau de productivité et leurs revenus converger vers un niveau semblable aux pays développés, et donc faciliter le phénomène de rattrapage. En parallèle de ces dotations, les pays en voie de développement doivent impérativement mettre en place des politiques qui permettront la croissance. Zedillo et ses coauteurs ont confirmé qu’il est nécessaire de mettre en place de bonnes réformes institutionnelles en Afrique afin de garantir une croissance soutenable. Cela permet d’inclure la population dans le phénomène de mondialisation, de créer des institutions efficaces et une meilleure productivité agricole. En parallèle, il faut aussi pouvoir mettre l’accent sur la recherche : Romer déclare qu’une croissance économique certaine est permise par l’accumulation d’idées. Cette dernière permet de faciliter les méthodes de production et donc de favoriser la consommation, ce qui permet une croissance durable. Il est donc nécessaire de prendre en considération l’apport bénéfique de la recherche et de protéger l’innovation qui en découle. Enfin, il est crucial pour l’avenir économique des pays en voie de développement de participer au commerce international et mettre en place une ouverture de marché. Dans l’ère de la mondialisation, les échanges de capitaux et de biens de productions et de consommation représente une opportunité pour les pays pauvres dont les ressources matérielles, technologiques ou même démographiques ne sont pas mises en avant par faute de moyens financiers. Bourguignon estime que les inégalités entre pays développés et pays en voie de développement ont fortement baissé depuis que ces derniers ont entamé leur processus de rattrapage grâce à la mondialisation. On peut prendre l’exemple de la délocalisation des activités en Asie qui a permis un développement lent mais certain du Japon d’abord puis des Dragons ensuite puis celui des Tigres, etc..

Ces politiques sont efficaces et permettent aux économies de converger vers un niveau de vie similaire, en permettant aux pays en développement de croître plus rapidement que les pays développés. La convergence est cependant différente selon les pays et témoigne donc de l’impact positif des politiques mises en oeuvres par certains et du retard accumulé par le reste. Nous pouvons prendre l’exemple de l’innovation : Schumpeter déclare en 1911 que l’innovation est la source de la croissance économique et que cette dernière est donc nécessaire lors de politiques de rattrapage. En effet, des pays comme la Chine, où l’accent était porté sur la fabrication de produits manufacturés, ont privilégié l’innovation en favorisant la recherche et le développement, et ont permis une montée en flèche de leur pouvoir commercial, permettant une croissance continue depuis ces dernières années. L’idée de rattrapage peut largement être associée au cas des latecomers de Gerschenkron et à la capacité des pays en voie de développement à décoller plus tardivement et toujours atteindre un niveau de vie et une croissance normale et satisfaisante. Tous les pays ne suivent pas le même modèle de développement décrit à travers les étapes de Rostow (passage d’une société traditionnelle par les conditions préalables au décollage, le take off, la marche vers la maturité pour arriver à l’ère de la consommation de masse) : Gerschenkron insiste sur le fait qu’il existe des pays à la structure sociale différente mais qui ne leur

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