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Un spectacle dans un fauteuil d'Alfred De Musset

Mémoire : Un spectacle dans un fauteuil d'Alfred De Musset. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  31 Janvier 2013  •  7 337 Mots (30 Pages)  •  2 680 Vues

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Ce drame historique romantique en cinq actes a été publié en 1834 dans le second volume d’Un spectacle dans un fauteuil, c’est-à-dire qu’initialement Musset n’envisageait pas de le mettre en scène.

La première représentation eut lieu en 1896, au théâtre de la Renaissance, à Paris, sans doute à l’initiative de Sarah Bernhardt qui joua le rôle de Lorenzo dans une version passablement mutilée pour pouvoir être représentée selon les conventions de l’époque.

Par la suite, ce drame est entré au répertoire de la Comédie-Française pour ne plus cesser d’être joué sans pourtant que les metteurs en scène ne renoncent à adapter son texte touffu aux exigences de la représentation théâtrale.

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Plan

Acte I

Acte II

Acte III

Acte IV

Acte V

Conclusion

Notes

Lorenzaccio a souvent été lu comme la pièce relatant les désillusions politiques de Musset après l’échec des « Trois Glorieuses ». D’une part, la Florence de la Renaissance a été une image de la monarchie de Juillet française bien perceptible pour les contemporains. Ils y ont sans peine reconnu la France de 1833 déçue : Côme qui remplaçait Alexandre, c’était Louis-Philippe, le roi « bourgeois », qui succédait à l’austère et autoritaire Charles X. Alors, la pièce a sans doute été perçue comme une réflexion acerbe et douloureuse sur l’inanité de toute action politique après la révolution ratée de Juillet 1830. Aujourd’hui Lorenzaccio reste bien cette tragédie du désenchantement, de l’idéal floué. Cette pièce pose la question de savoir si un mal peut justifier un bien dans l’action politique. Le désir de liberté peut-il justifier un crime et l’avilissement moral ? Cette pièce aborde aussi la crise des idéologies : peut-on simplement (nous pourrions dire naïvement) croire à des idéaux ? Quelle part de manipulation contiennent-ils ? Sont-ils finalement des mensonges ? Compte tenu de l’emprise de la vie politique dans nos démocraties, des scandales qui les agitent, des risques encourus par la liberté1, on peut comprendre que cette grille de lecture ait pu devenir prédominante à partir de la deuxième moitié du XXe siècle.

Cependant, si l’on sait que ce drame a été directement inspiré à Musset par une scène historique de George Sand (Une conspiration en 1537), il convient aussi d’y rechercher les traces de la propre vie de Musset à une époque où son existence vient d’être marquée de manière douloureuse et indélébile. Il convient de noter que le jeune Musset a mené jusque-là une adolescence dissipée de dandy. L’étudiant en droit et en médecine, n’a pas lésiné dans ses aventures féminines et ses débauches de table. Très doué, il a abusé de ses facilités et ne supporte pas l’échec.

En 1833, Musset a rencontré le grand amour de sa vie, la romancière George Sand, de sept ans son aînée. Leur passion a été tumultueuse, heurtée. Il ne pouvait en aller autrement entre deux personnalités aussi exigeantes que capricieuses. Le jeune amant a été déçu, trompé et blessé par sa muse lors du difficile voyage à Venise de 1834. C’est une crise profonde qui le fait accéder brutalement et douloureusement à l’âge adulte.

Musset va donc donner un peu de son expérience et surtout la fêlure de son âme à Lorenzo. Ce qui était réparti entre les Coelio et Octavio des Caprices de Marianne va être rassemblé dans Lorenzaccio. Cette ligne de partage au plus intime du personnage va fonder le tragique en prenant en particulier l’image théâtrale du masque.

La montée de la tension dramatique est réalisée par la progression du thème du masque au moyen de cinq couples :

dissimulation et honnêteté,

dissimulation et efficacité,

dissimulation et identité,

dissimulation et sincérité,

fin de la dissimulation et vide.

Acte I : honnêteté et dissimulation

Dès la 1re scène, nous abordons les thèmes de l’apparence et de la vérité profonde ; Musset insiste sur le regard aiguisé et cynique du libertin débauché qui sait deviner les êtres. Les deux protagonistes nous sont présentés en action. Le duc Alexandre est un consommateur de chair fraîche, et Lorenzo, le rabatteur, le pourvoyeur de ses plaisirs.

Je réponds de la petite. Deux grands yeux languissants, cela ne trompe pas. Quoi de plus curieux pour le connaisseur que la débauche à la mamelle ? Voir dans une enfant de quinze ans la rouée à venir ; étudier, ensemencer, infiltrer paternellement le filon mystérieux du vice dans un conseil d’ami, dans une caresse au menton ; tout dire et ne rien dire, selon le caractère des parents ; – habituer doucement l’imagination qui se développe à donner des corps à ses fantômes, à toucher ce qui l’effraye, à mépriser ce qui la protège ! Cela va plus vite qu’on ne pense ; le vrai mérite est de frapper juste. Et quel trésor que celle-ci ! tout ce qui peut faire passer une nuit délicieuse à Votre Altesse ! Tant de pudeur ! Une jeune chatte qui veut bien des confitures, mais qui ne veut pas se salir la patte. Proprette comme une Flamande ! La médiocrité bourgeoise en personne. D’ailleurs, fille de bonnes gens, à qui leur peu de fortune n’a pas permis une éducation solide ; point de fond dans les principes, rien qu’un léger vernis ; mais quel flot violent d’un fleuve magnifique sous cette couche de glace fragile qui craque à chaque pas ! Jamais arbuste en fleur n’a produit de fruits plus rares, jamais je n’ai humé dans une atmosphère enfantine plus exquise odeur de courtisanerie.

Lorenzaccio, I, 1.

Dès le début, Musset pose une thématique essentielle : celle de l’opposition entre l’intérieur et l’extérieur.

Cette intériorité n’est pourtant pas aussi secrète

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