Un hémisphère dans une chevelure, Baudelaire

Un hémisphère dans une chevelure

Cours conçu par Mlle Stéphanie Lautner.

Juste un petit mot avant de commencer : je suppose que pour beaucoup d'entre vous,

c'est votre dernière année de Français et qu'elle est surtout monopolisée par l'objectif du

Bac. Sans perdre de vue cet objectif, je voudrais aujourd'hui vous faire découvrir

Baudelaire autrement, vous montrer la complexité de son œuvre et surtout vous donner

aussi envie de le lire pour votre plaisir.

Une de vos camarades me demandait la semaine dernière : Baudelaire a-t-il vraiment

voulu dire tout cela ? J'ai envie de vous répondre oui et non à la fois. Oui, parce que la

poésie est spéculaire, elle ne peut pas se penser autrement que comme une quête d'ellemême et se faisant, une quête de la totalité, et non, parce que le génie n'est pas toujours

quelque chose qui se calcule et que vos professeurs de Français on beaucoup d'imagination

Je voudrais vraiment faire en sorte que cette explication ne soit pas un cours magistral

(mieux vaut dormir dans son lit qu'au lycée) Donc n'hésitez pas à m'interrompre car je suis

très bavarde, à m'arrêter si je vais trop vite ou si vous ne comprenez pas quelque chose. Je

rajoute que je voudrais aussi vous entendre participer pour que cela soit un échange

Quelques mots d'introduction

Je voudrais en quelques mots vous permettre de comprendre la place du petit poème

en prose dans l'œuvre de Baudelaire. Plutôt que de me lancer dans de longues explications,

je vous donne une citation tirée de la préface des Petits Poèmes en Prose et qui définit

parfaitement l'importance de ce genre chez Baudelaire: « Quel est celui de nous qui n'a

pas, dans ses jours d'ambition, rêvé le miracle d'une prose poétique, musicale, sans rythme

et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de

l'âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de la conscience »

Pour Baudelaire, le petit poème en prose a donc une place aussi importante que les

poèmes versifiés que l'on trouve dans le recueil des Fleurs du Mal D'ailleurs, je voudrais

vous mettre en garde contre des simplifications critiques qui traînent parfois dans vos

Annabac et autres merveilles pour lycéens : on dit parfois que les petits poèmes en prose

sont des ébauches des poèmes en vers, de simples brouillons où le poète aurait fixé ses

idées sans contrainte de versification, c'est archi-faux. Pour Baudelaire les deux formes

coexistent sans se faire concurrence, parce qu'elles n'ont pas la même visée. D'ailleurs

d'après certaines études, « la chevelure » (forme versifiée) aurait été écrite avant « un

hémisphère dans une chevelure » (petit poème en prose)

En plus des liens évidents qu'on a déjà pu montrer entre « la chevelure » et « un

hémisphère dans une chevelure », notez que le petit poème en prose a aussi de nombreux

points communs avec le poème « Parfum exotique » qui se trouve également au début de

la première section des Fleurs du Mal.

Justement, savez-vous le titre de cette première section? « Spleen et Idéal ». Pour

schématiser très très grossièrement : « Spleen » c'est la conscience cruelle d'un réalité

sordide à laquelle on ne peut échapper (cf. « Spleen IV » « quand le ciel bas et lourd pèse

comme un couvercle. »

« Idéal » c'est la volonté de s'affranchir de la réalité pour tendre vers un ailleurs, à

n'importe quel prix – et parfois celui du mensonge (cf. un poème des Fleurs du Mal

1s'intitule « l'amour du mensonge »).

Pour situer « un hémisphère dans une chevelure », on est plutôt dans un moment

d'accalmie, une sorte de parenthèse heureuse, mais on va voir que les choses ne sont

jamais aussi simples et univoques chez Baudelaire. Souvenez-vous, dans « la chevelure »

l'oxymore, c'est par la nuit de la chevelure qu'est rendu au poète l'azur du ciel.

Ma problématique: (la tension du texte que l'on va essayer de résoudre).

Comment, dans quelle mesure le pouvoir évocateur du parfum peut-il transformer les

multiples métaphores de la chevelure en allégorie unique du souvenir?

C'est le commentaire lui-même qui va fournir la réponse.

Le plan que je vous propose

1) les variations métaphoriques de la chevelure.

2) l'idéalisation de la femme par le parfum.

3) l'évocation du souvenir entre concentration et vaporisation.

1) Les variations métaphoriques de la chevelure.

a) la quête de la poésie dans le poème en prose.

Il est très important pour vous de vous souvenir que les textes que vous étudiez

appartiennent à des genres et qu'il est bon de

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