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Tristan et Iseut, analyse

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Par   •  6 Novembre 2017  •  Cours  •  6 230 Mots (25 Pages)  •  1 567 Vues

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Littérature française du Moyen-Age

Aucun des textes ne relate la légende dans son entièreté, la légende nous est parvenue de façon fragmentaire. Les textes ne relatent pas tous les mêmes épisodes, et de la même façon = lecture différente du mythe, signification différente, mais tous traitent le mythe différemment de ce que nous avons l'habitude de penser de Tristan et Iseut.

L'image la plus habituelle du couple est celle d'un amour plus fort que tout, capable de braver les interdits. En fait, aucun texte du Moyen-Age ne relate la légende, mais elle nous a été transmise dans une version reconstruite et reconstituée à la fin du 19e siècle, par Joseph Bédier. Il la résume en une formule : « il s'agit d'un beau conte d'amour et de mort ». Cependant, cette reconstitution à transformé les textes médiévaux. C'est pourtant cette reconstitution qui s'est imposée dans nos imaginaires, qui a donné cette version du mythe la plus prégnante aujourd'hui.

L'histoire de Tristan et Iseut traite plus du désir que de l'amour, en réalité.

Dans le roman de Béroul, le désir est pensé en opposition à la loi sociable (de la société) ; le désir est un interdit.

Dans le roman de Thomas, nous allons voir un travail très précis d'analyse pour distinguer le désir du plaisir, et le désir de l'amour. Il réfléchit à la nature bien particulière du désir, qu'est-ce que c'est par rapport à l'amour ou au plaisir.

Dans tous les cas, tous les poètes réfléchiront sur l'articulation du désir et de la liberté. Le désir est-il assumé par le couple ? Ou est-il subit ?

Dans les textes du Moyen-Age, ce qui lie les deux est une passion irrépressible ; ils vivent cette passion, mais ils sont loin d'y consentir sereinement. Vivre cette passion est pour eux l'objet de questionnement et de souffrance. La passion qui lie les amants se distingue d'une représentation toute autre de l'amour, très fréquent au Moyen-Age, que l'on nomme la fin'amor (l'amour parfait).

Le fin'amor.

Lancelot incarne un amour fondé sur une maîtrise de soi et une volonté radicale, il choisit d'aimer, il s'engage totalement pour servir sa dame, et cela, peu importe les obstacles qu'il doit traverser.Le choix d'aimer conduit alors le fin' amant à une découverte de lui-même et à une amélioration de lui-même pour aimer celle qu'il considère comme la plus belle, la plus vertueuse, la plus parfaite. L'amant parfait accroît ses mérites. L'amour parfait est un amour qui élève et qui permet à l'être de s'accomplir.

Pour Tristan et Iseut, la configuration est différent ; ils désirent, se désirent, suivant les versions, assument ou subissent une passion, mais son en proie à des hésitations, des doutes, des revirements.  Parfois, il la vive même avec une certaine perversité. Cette passion n'a rien d'un mouvement d'élévation. La passion de Tristan et Iseut s'inscrit dans leur corps ; ils sont meurtris, abîmes par la passion (dégradation physique, corps dégradés par les regards ou paroles des personnages). La passion s'inscrit comme une brûlure, une souffrance et parfois une déchéance.

La passion inscrit aussi le discours des amants ; elle peut alors refléter la déchéance qu'impose l'amour. Dans le texte de Béroul, les deux mentent (or, le mensonge est un péché grave au Moyen-Age). La passion transforme la parole des personnages par le mensonge, ou reflète les tourments, la folie. C'est le cas dans les Folies Tristan ou dans le roman de Thomas, où Tristan développe très souvent des argumentations sophistique d'une complexité extrême, comme si la passion venait dérégler l'ordre du discours et sa rationalité (défaillance de la raison).

Autrement dit, Tristan et Iseut sont des personnages auxquels la formule « tomber amoureux » est juste ; pour eux, l'amour est vraiment une chute. Ils ne cessent de tomber par amour. Là encore, cette chue sera appréhendée de façon différente ; elle est funeste, elle les conduit à la mort. Elle peut entraîner une déchéance sociale. Mais pourtant, cette chute fatale peut apparaître moins sordide et dégradante que les compromissions et les lâchetés d'une société pervertie. Du moins, c'est une vision que propose Béroul.

Ce n'est pas le choix qu'opèrera Thomas ; il ne pense pas la question du désir au regard de la loi.

Tous les versions ne sont donc pas aussi conciliantes que celle de Béroul. Thomas réfléchit davantage sur la nature de la pulsion amoureuse.

Malgré tout, chez Thomas, le tourment des amants s'accompagne toujours de lucidité, de courage, d'audace. La grandeur du couple provient moins du fait d'aimer, que de s'observer en train d'aimer et d'essayer de comprendre leur amour, comment il agit en eux.

L'amour de Tristan et Iseut apparaît sous un jour négatif, mais il est aussi un moyen de vivre un destin hors-norme, d'opposer une forme de résistance à une convention sociale, c'est une source de réflexion, de combat intérieur, d'affirmation de soi contre les autres, l'amour est aussi un moyen de densifier sa vie. Les personnages ne cessent de fasciner, parce qu'ils refusent la résignation et le désespoir. Le mythe donne une représentation sombre, mais fascinante de la passion.

Le Mythe.

La légende de Tristan et Iseut est relatée par plusieurs textes subsistant à l'état de fragments. Cette légende semble remonter à un passé mythique, précédant même l'écriture. Bédier, lorsqu'il a reconstitué le mythe, parle d'un poème sauvage qui appartiendrait au folklore celte. Aujourd'hui, on pense plutôt ce poème n'a jamais existé.

Constitution et transmission de la légende de Tristan et Iseut.

Les textes nous sont parvenus par des manuscrits, dût à plusieurs auteurs, dans plusieurs langues ; on parle alors d'une constellation de textes. Ils ont aussi été composés à des époques différentes, dans des contextes culturels diversifiés. On a donc tenté d'établir un classement, une typologie de ces textes, pour les associer en deux familles.

La première famille correspond à la version « commune » de la légende ; cette version commune regroupe le texte de Béroul (le Roman de Tristan), dont la date se situe entre 1180 et 1190, de Berne (Folie Tristan) qui date de la fin 12e siècle, et d'Eilhiart d'Oberg (Tristran). La version commune correspond à la version la plus proche de celle d'origine.

La deuxième famille correspond à la forme « courtoise » de la légende ; le roman de Thomas (Le Roman de Tristan) est l'un des représentant, dont la date se situe dans les années 1170-1173. Thomas a remanié la légende pour l'adapter aux exigences éthiques et esthétiques de la cour. Il y a aussi le texte d'Oxford (Folie Tristan), de Marie de France (Le Chèvrefeuille), une saga norroise, un autre en allemand (Gottfried de Strasbourg), et un autre en Moyen-Anglais (Sire Tristremm, début 13e siècle).

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