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Tentative De Dissertation : Le Lyrisme Dans Romances Sans Paroles

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Par   •  19 Octobre 2012  •  2 671 Mots (11 Pages)  •  3 938 Vues

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Paul Verlaine cherche à faire entendre, dans Romances sans paroles, « la voix d’un lyrisme impersonnel » Discutez ce propos.

Le recueil « Romances sans paroles » présente un paradoxe évident par son titre mais également son contenu. Ceci pourrait ne pas être très étonnant pour un « connaisseur » du poète Paul Verlaine, qui est lui-même un personnage très complexe, notamment en ce qui concerne l’incohérence entre ses « pensées », « idéaux » et ses actes. Le critique Jean-Pierre Richard par son affirmation nous mène à une analyse de ce recueil, une œuvre à priori « lyrique » mais qui pourtant tend en majorité vers l’expression d’une « sensibilité » qui se voudrait « universelle ». Ce lyrisme « impersonnel » s’illustre dans de nombreux poèmes, dans lesquelles nous percevons un manque d’individualité et une attirance vers le général, l’universel. De là découle un questionnement : Quelle forme peut prendre une voix impersonnelle, un lyrisme contre sa définition romantique, c’est-à-dire, qui dépasse l’individualité ?

Ainsi, pour tenter d’apporter un éclairage sur ce paradoxe qu’est le « lyrisme impersonnel » nous nous pencherons en premier lieu sur le refus de « l’identité », le retrait de l’individualité en faveur du collectif. Par la suite, nous pourrons pourtant trouver en ce recueil des caractéristiques lyriques, une certaine authenticité, une sensibilité singulière assimilable au lyrisme romantique. Enfin, cela nous amènera peut-être à un possible dépassement et reconnaitre en cette œuvre une transcendance, une élévation au-delà des signes que sont les « mots », à une dimension où la sensation est pure.

I. Un refus de ce qui est personnel contre ce qui est collectif :

1) Une poésie simplifiée

Les « Romances sans paroles » sont basées sur un oxymore. Ecrire de la romance sans paroles est un travail certainement complexe malgré son apparence de simplicité. Verlaine s’inspire certainement des chants autrefois composés par des artistes que l’on pourrait désignés d’artistes « de rues », de la « chanson populaire » comme le précise Olivier Bivort. Leur écrits étaient simples, naïfs. Le poète reprend ici ce principe, en usant de termes compréhensibles de tous, et non uniquement par des hommes de « lettres » comme peuvent l’être certaines poésies, complexes et enrichies d’un vocabulaire recherché. Une écriture qui en dit le moins, presque « muette » est donc nécessaire pour prétendre à un lyrisme qui tend à être universel. On constate par exemple dans l’Ariette VI des mots communs, de la vie quotidienne : « C’est le chien de Jean de Nivelle // Car la boulangère// en sa longue robe bleue ». Des mots que les lecteurs côtoient, et qui comme « boulangère » font référence à des chansons de la société de Verlaine connues de tous. Nous trouvons également dans Paysages belges dans le poème Walcourt des illustrations d’une simplicité lexicale à la limite de la description de la vie mondaine : « Guinguettes claires, / Bières, clameurs, / Servantes chères/ A tous fumeurs !/ ». Tout homme reconnait en ces mots un vécu, des souvenirs, et c’est d’autant plus évident dans Birds in the night lorsqu’il écrit : « je vous vois encor. J’entr’ouvris la porte, / Vous étiez au lit comme fatiguée. / ». Ici encore, ces mots usés de tous, parfois écorchés comme « j’entr’ouvris » sont reconnus par tous et montrent encore une fois la non complexité de l’écriture verlainienne et l’aspiration à un collectif, à une réalité vécu par tous.

Nous voyons dans ce recueil une simplicité qui est accompagné de façon évidente d’une tonalité affaiblie des mots, d’une poésie « fragilisée » dit Olivier Bivort.

Une tonalité des mots affaiblie en faveur du chant

Pour cet affaiblissement, Verlaine a recours à de nombreux procédés. On constate un usage de diminutifs très fréquent, par exemple dans l’Ariette V : « Tandis qu’avec un très léger bruit d’aile », ou encore « bien faible », dans Paysages belges, Bruxelles Simples fresques I : « tout doucement », « des petits arbres », « oiseau faible chante. » ou encore « Triste à peine s’effacent ». Ce lexique participe à la réalisation d’une poésie « faible » au sens où elle ne recherche qu’à effacer la complexité tant des mots que de la réalité qui entoure les individus. Ces termes rendent en quelque sorte la poésie verlainienne « vague », à la limite du « flou », pour que bientôt nos sens ne puissent plus laisser porter par une réalité précise, fixe et bien délimitée. Dans Paysages Belges, Malines, nous retrouvons des termes participant au même effet : « détail fin// Les wagons filent en silence/ parmi ces sites apaisés. / Dormez, les vaches ! Reposez, // le train glisse sans un murmure ». Ce vocabulaire du « calme » du « silence » affaiblit la vigueur qu’est censé produire une poésie lyrique. Verlaine cherche en quelque sorte à « atténuer » la réalité, à transporter son lecteur dans un monde poétique sans la secousse de mots complexes. Les mots paraissent être non un moyen « rhétorique » mais une sorte de véhicule qui nous porte vers le « non-dit ». Il faut chercher derrière les mots aussi simples qu’ils puissent paraître.

Par cette écriture qui s’enfonce dans l’abstrait, cette simplicité nous emporte, nous en oublierions même qui parle, qui écrit, que désigne « je » et qu’y-a-t-il sous ce « on » présent dans l’œuvre. On pourrait voir dans ces Romances sans paroles un effacement de celui qui écrit, de l’auteur, une poésie sans maître d’œuvre dans laquelle quiconque peut « vagabonder » sans rencontrer « d’identité ».

L’effacement du poète

Le lyrisme impersonnel tendrait donc en partie vers l’effacement de l’auteur, puisque pour approcher une universalité, il doit se « fendre dans la masse » ne pas dresser un mur qu’est sa « personnalité ». Ainsi, on se fraie un chemin dans ce recueil, qui nous permet d’explorer le monde grâce à différents moyens. Tout d’abord, on constate une présence nette de la nature, domaine qui est universel, qui ne se limite pas à un individu. Nous sommes tous à son contact qui que nous soyons, par exemple dans l’Ariette I on lit : « cela ressemble au cri doux/ que l’herbe agitée expire... », dans Paysages Belges, Charleroi : « Un buisson gifle/ l’œil au passant. ». Nous avons ici en quelque sorte l’expression d’une nature que le monde partage. Une nature qui ‘s’exprime’ et que le collectif reconnait

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