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Suite De 'les Bonnes De Jean Genet

Mémoires Gratuits : Suite De 'les Bonnes De Jean Genet. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  7 Décembre 2014  •  1 276 Mots (6 Pages)  •  1 692 Vues

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Jean Genet, Les Bonnes, (1947)

Deux bonnes, Solange et Claire, ont pris l'habitude d'imiter leur maîtresse en son absence pour libérer l'agressivité et la frustration qu'elles ont accumulées envers elle.

« Madame » surprend le jeu des Bonnes. Vous imaginerez la scène.

Madame entre en scène et reste un temps immobile devant le spectacle qui s'offre à elle. Les Bonnes, qui ne la voient pas, poursuivent leur manège : Solange apporte à Claire une robe blanche.

CLAIRE. - Mais pas celle-là, petite sotte ! La blanche pailletée ! Aurez-vous un jour l'obligeance de m'écouter quand je vous parle ? Si cela continue, je n'hésiterai pas à vous congédier, surtout si vous vous êtes laissé engrosser par ce...

SOLANGE. - Que Madame m'excuse, mais...

CLAIRE. - Cessez donc de jacasser et apportez-moi cette robe ! Je n'ai pas de temps à perdre avec vos sottises !

SOLANGE, avec une courbette soumise. - Oui, Madame...

Elle se dirige vers l'armoire située à droite de la porte et aperçoit Madame qui la fixe. Elle sursaute et pousse un petit cri.

SOLANGE. - Madame !

CLAIRE, tout en continuant à s'admirer dans la glace. - Eh bien quoi encore, petite idiote ?

SOLANGE. - Claire !

CLAIRE, furieuse. - Pour vous, ce sera Madame ! Madame, entendez-vous ? Mad...

Elle vient d'apercevoir, dans le miroir, Madame qui la regarde à l'entrée de la chambre. Les yeux écarquillés, elle se retourne lentement sur sa chaise. Madame jette un regard méprisant à Solange, qui s'écarte pour la laisser passer. Madame s'avance vers Claire, qui se lève lentement de sa chaise et s'écarte. Madame, lentement, s'y assoit.

MADAME, après un silence, cinglante. - Ce tilleul (elle prononce bien tilleul) est froid. Vous m'en ferez un autre, Claire.

Claire esquisse une légère courbette, et fait mine de sortir.

MADAME. - Pas maintenant ! Quand j'aurai besoin de vos services, je vous le signifierai. En attendant, vous allez me faire le plaisir de me présenter vos excuses ! (D'un ton sadique.) Allons, répétez après moi : « Nous sommes deux bonnes méprisables qui ne méritons pas Madame comme maîtresse ! »

CLAIRE (la rage au cœur) et SOLANGE (d'un air soumis). - Nous sommes deux bonnes méprisables qui ne méritons pas Madame comme maîtresse !

MADAME, même manège. - Nous sommes profondément désolées de notre conduite, qui ne se renouvellera pas.

CLAIRE ET SOLANGE, même manège. - Nous sommes profondément désolées de notre conduite, qui ne se renouvellera pas.

MADAME, même manège. - Dorénavant nous vous servirons et vous respecterons, car vous êtes notre modèle, vous avez tout pouvoir sur nous... (sur un ton qui se fait mielleux) et nous vous aimons.

CLAIRE (presque inaudible), SOLANGE (machinalement). - Dorénavant nous vous servirons et vous respecterons, car vous êtes notre modèle, vous avez pouvoir sur nous... (au supplice, les larmes aux yeux) et nous vous aimons.

MADAME sourit, satisfaite. - Parfait !... Maintenant, Claire, allez ranger cette chambre, c'est un véritable capharnaüm ! Solange, voulez-vous bien suspendre cette robe ?

SOLANGE. - Oui, Madame.

MADAME. - Vous ai-je demandé votre assentiment ? (Solange baisse les yeux.) Bien. À présent, suspendez cette robe. Et sans la froisser, maladroite ! Vous, Claire, venez par ici. (Claire s'exécute.) Si j'ai bien saisi les propos de Solange, je dois vous féliciter pour cet heureux événement ? Tournez-vous... Cela ne se voit guère, ou vous le cachez bien.

CLAIRE. - Mais, Madame, je ne suis pas...

MADAME. - Nous le verrons bien dans quelques mois. Il faudra que je cherche quelqu'un pour vous remplacer. Je ne voudrais pas vous porter préjudice, dans votre état...

CLAIRE. - Ce ne sera pas nécessaire, Madame.

MADAME. - Fort bien. Qui vivra verra. En attendant, arrangez-vous un peu, vous avez une mine épouvantable, avec votre teint verdâtre et vos yeux délavés. Il ne vous arrive jamais de vous dégoûter, ma petite ? (Silence.) Apparemment non. Au moins,

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