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Poème de Victo Hugo

Fiche : Poème de Victo Hugo. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  28 Janvier 2013  •  Fiche  •  915 Mots (4 Pages)  •  781 Vues

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I

Bien ! pillards, intrigants, fourbes, crétins, puissances !

Attablez-vous en hâte autour des jouissances !

Accourez ! place à tous !

Maîtres, buvez, mangez, car la vie est rapide.

Tout ce peuple conquis, tout ce peuple stupide,

Tout ce peuple est à vous !

Vendez l’état ! coupez les bois ! coupez les bourses !

Videz les réservoirs et tarissez les sources !

Les temps sont arrivés.

Prenez le dernier sou ! prenez, gais et faciles,

Aux travailleurs des champs, aux travailleurs des villes !

Prenez, riez, vivez !

Bombance ! allez ! c’est bien ! vivez ! faites ripaille !

La famille du pauvre expire sur la paille,

Sans porte ni volet.

Le père en frémissant va mendier dans l’ombre ;

La mère n’ayant plus de pain, dénûment sombre,

L’enfant n’a plus de lait.

II

Millions ! millions ! châteaux ! liste civile !

Un jour je descendis dans les caves de Lille

Je vis ce morne enfer.

Des fantômes sont là sous terre dans des chambres,

Blêmes, courbés, ployés ; le rachis tord leurs membres

Dans son poignet de fer.

Sous ces voûtes on souffre, et l’air semble un toxique

L’aveugle en tâtonnant donne à boire au phtisique

L’eau coule à longs ruisseaux ;

Presque enfant à vingt ans, déjà vieillard à trente,

Le vivant chaque jour sent la mort pénétrante

S’infiltrer dans ses os.

Jamais de feu ; la pluie inonde la lucarne ;

L’oeil en ces souterrains où le malheur s’acharne

Sur vous, ô travailleurs,

Près du rouet qui tourne et du fil qu’on dévide,

Voit des larves errer dans la lueur livide

Du soupirail en pleurs.

Misère ! l’homme songe en regardant la femme.

Le père, autour de lui sentant l’angoisse infâme

Etreindre la vertu,

Voit sa fille rentrer sinistre sous la porte,

Et n’ose, l’oeil fixé sur le pain qu’elle apporte,

Lui dire : D’où viens-tu ?

Là dort le désespoir sur son haillon sordide ;

Là, l’avril de la vie, ailleurs tiède et splendide,

Ressemble au sombre hiver ;

La vierge, rose au jour, dans l’ombre est violette ;

Là, rampent dans l’horreur la maigreur du squelette,

La nudité du ver ;

Là frissonnent, plus bas que les égouts des rues,

Familles de la vie et du jour disparues,

Des groupes grelottants ;

Là, quand j’entrai, farouche, aux méduses pareille,

Une petite fille à figure vieille

Me dit : J’ai dix-huit ans !

Là, n’ayant pas de lit, la mère malheureuse

Met ses petits enfants dans un trou qu’elle creuse,

Tremblants comme l’oiseau ;

Hélas ! ces innocents aux regards de colombe

Trouvent en arrivant sur la terre une tombe

En place d’un berceau !

Caves de Lille ! on meurt sous vos plafonds de pierre !

J’ai vu, vu de ces yeux pleurant sous ma paupière,

Râler l’aïeul flétri,

La fille aux yeux hagards de ses cheveux vêtue,

Et l’enfant spectre au sein de la mère statue !

Ô Dante Alighieri !

C’est de ces douleurs-là que sortent vos richesses,

Princes ! ces dénûments nourrissent vos largesses,

Ô vainqueurs ! conquérants !

Votre budget ruisselle et suinte à larges gouttes

Des murs de ces caveaux, des pierres de ces voûtes,

Du coeur de ces mourants.

Sous ce rouage

...

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