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Par   •  31 Juillet 2012  •  593 Mots (3 Pages)  •  1 077 Vues

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Dialogues de Monsieur le baron de Lahontan et d’un Sauvage dans l’Amérique, du baron de Lahontan (1703)

Adario. — [...] Crois-moi, mon cher frère, songe à te faire Huron pour vivre longtemps. Tu boiras, tu mangeras, tu dormiras et tu chasseras en repos ; tu seras délivré des passions qui tyrannisent les Français ; tu n’auras que faire d’or ni d’argent pour être heureux ; tu ne craindras ni voleurs ni assassins ni faux témoins ; et si tu veux devenir le roi de tout le monde, tu n’auras qu’à t’imaginer de l’être et tu le seras.

Lahontan. — Écoute, il faudrait pour cela que j’eusse commis en France de si grands crimes qu’il ne me fût permis d’y revenir que pour y être brûlé, car, après tout, je ne vois point de métamorphose plus extravagante à un Français que celle de Huron. Est-ce que je pourrais résister aux fatigues dont nous avons parlé ? Aurais-je la patience d’entendre les sots raisonnements de vos vieillards et de vos jeunes gens, comme vous faites, sans les contredire ? Pourrais-je vivre de bouillons, de pain, de blé d’Inde, de rôti et bouilli sans poivre ni sel ? Pourrais-je me colorer le visage de vingt sortes de couleurs comme un fou ? Ne boire que de l’eau d’érable ? Aller tout nu durant l’été, me servir de vaisselle de bois ? M’accommoderais-je de vos repas continuels où trois ou quatre cents personnes se trouvent pour y danser deux heures devant et après ? Vivrais-je avec des gens sans civilité qui, pour tout compliment, ne savent qu’un je t’honore ? Non, mon cher Adario, il est impossible qu’un Français puisse être Huron, au lieu que le Huron se peut aisément faire Français.

Adario. — À ce compte-là, tu préfères l’esclavage à la liberté ; je n’en suis pas surpris après toutes les choses que tu m’as soutenues. Mais si, par hasard, tu rentrais en toi-même et que tu ne fusses pas si prévenu en faveur des mœurs et des manières des Français, je ne vois pas que les difficultés dont tu viens de faire mention fussent capables de t’empêcher de vivre comme nous. Quelle peine trouves-tu d’approuver les contes des vieilles gens comme des jeunes ? N’as-tu pas la même contrainte quand les Jésuites et les gens qui sont au-dessus de toi disent des extravagances ? Pourquoi ne vivrais-tu pas de bouillons, de toutes sortes de bonnes viandes ? Les perdrix, poulets d’Inde, lièvres, canards, chevreuils ne sont-ils pas bons, rôtis et bouillis ? À quoi servent le poivre, le sel et mille autres épiceries si ce n’est à ruiner la santé ? Au bout de quinze jours, tu ne songerais plus à ces drogues. Quel mal te feraient les couleurs sur le visage ? Tu te mets bien de la poudre et de l’essence aux cheveux et même sur les habits ? N’ai-je pas vu des Français qui portent des moustaches, comme les chats, toutes couvertes de cire ? Pour la boisson d’eau d’érable, elle est douce, salutaire, de bon goût et fortifie la poitrine ; je t’en ai vu boire plus de quatre fois. Au lieu que le vin et l’eau-de-vie détruisent la chaleur naturelle, affaiblissent l’estomac, brûlent le sang, enivrent et causent mille désordres. Quelle peine aurais-tu d’aller nu pendant qu’il fait chaud ? Au moins tu vois que nous ne le sommes pas tant que nous n’ayons le devant et le derrière couverts. II vaut bien mieux aller nu que de suer continuellement sous le fardeau de tant de vêtements

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