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Mouvement romantique

Analyse sectorielle : Mouvement romantique. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Avril 2014  •  Analyse sectorielle  •  4 598 Mots (19 Pages)  •  491 Vues

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Le mouvement romantique a vu le jour au XIXe siècle, avec des auteurs comme Nerval, Lamartine ou encore Alfred de Musset. Dans un contexte politique trouble et agité, avec un pouvoir en proie aux protestations de la jeunesse, Musset « l’enfant prodige » compose un théâtre rempli de symboles, et libéré des contraintes formelles classiques. L’œuvre est, selon les termes de Musset, un « spectacle dans un fauteuil ». Celle-ci possède cinq actes, mais tous ne sont pas de consistance et de densité égales, car les quelque trente pages qui constituent les huit scènes de l’Acte V font pâle figure face aux cinquante feuillets du précédent. De ce fait, le cinquième acte peut donc paraître moins complet et plus insignifiant que les autres, bien qu’en réalité il porte les marques d’un véritable dénouement. Il a d’ailleurs souvent été supprimé des versions contemporaines de mise en scène, et atrophié voire dénaturé dans certaines rééditions modernes. Mais si Alexandre de Médicis est tué à la fin de l’acte IV, Lorenzo, lui, meurt mis en pièces par le peuple durant cet acte. Le couple Cibo se reforme pour faire bonne figure, le cardinal tire, dans l’ombre, les ficelles secrètes qui lui permettront de s’assurer un contrôle du pouvoir, et la vague républicaine qui aurait dû naître dans le sillage de l’épée de Lorenzo reste très timide. Pourquoi les enjeux de cet ultime élément dramaturgique sont-ils éminemment nécessaires à l’œuvre ? Comment l’acte V confère-t-il un éclairage nouveau, plus pessimiste, à l’action, et oriente le lecteur vers une interprétation plus nuancée des conséquences de l’assassinat du tyran ? Pour répondre à cette interrogation, il convient de montrer en quoi ce dernier acte remplit l’office de dénouement de l’intrigue principale, où un Lorenzino protéiforme lutte contre la tyrannie, et également des deux intrigues secondaires : la marquise de Cibo qui tente de séduire le duc dans un but républicain, action détournée par le cardinal pour servir ses propres intérêts, ainsi que la famille Strozzi qui construit, parallèlement, sa vengeance. Ensuite, nous verrons comment l’auteur cherche à donner un sens différent, plus résonnant, à l’ensemble de son œuvre en dépeignant l’éternel retour de la vicissitude et le pessimisme, voire la lâcheté des héros républicains face à la situation. Il faudra également étudier la valeur autobiographique donnée par Alfred de Musset à cette partie de la pièce, dans laquelle il laisse entrevoir toutes ses désillusions après la révolution ratée de juillet 1830. Enfin, il sera judicieux d’étudier la perception que le lectorat a eu, et a actuellement de ce dernier acte. Nous chercherons à comprendre les limites inhérentes à l’acte V qui, sans doute parce qu’il veut crier un message trop fort pour cette époque, semble multiplier les difficultés qu’un metteur en scène peut avoir à le représenter…

Dans un premier temps, on peut dire que l’acte V constitue véritablement le dénouement de toutes les intrigues de Lorenzaccio : en effet, il permet au lecteur de mieux cerner les enjeux du texte et de comprendre pourquoi le personnage de Lorenzo reste si énigmatique, si triste et ironique à la fois. La ville de Florence résonne des discours cyniques des commerçants et des seigneurs, désabusés et, pour la plupart, sans espoirs. L’ultime partie de l’œuvre clôture ainsi toutes les questions laissées en suspens, en accentuant l’effet d’accélération de l’action par une binarité des lieux (Florence-Venise) et par un rétrécissement du temps (les scènes I à IV ont lieu dans la même journée du 6 janvier ; les scènes V à VII le lendemain matin).

Tout d’abord, l’intrigue dramatique centrale se referme apparemment bel et bien sur la mort du duc Alexandre de Médicis : la formule employée par Lorenzo à l’attention de Scoronconcolo (« Attends ! Tire ces rideaux. », scène XI de l’acte IV) est une métaphore qu’opère l’auteur, perpétrant une mise en abyme, un théâtre dans le théâtre. L’action semble donc terminée, la scène rendue à son obscurité naturelle par les rideaux refermés. Pourtant, le mouvement reprend à nouveau dans le dernier acte, qui s’ouvre magistralement sur le grand débat des seigneurs conservateurs, désireux de nommer au plus vite un nouveau duc pour Florence, au moins par régence, avant que la nouvelle ne s’ébruite et vienne compromettre le régime qu’ils eurent tant de peine à établir. Pendant ce temps, Lorenzo est à Venise, à l’abri des murs du cabinet de Philippe Strozzi. Malgré cette apparence de protection, le Conseil des Huit ne tarde pas à l’accabler du meurtre de son cousin éloigné en mettant sa tête à prix (« À tout homme, noble ou roturier, qui tuera Lorenzo de Médicis, traître à la patrie, et assassin de son maître, […] il est promis […] », scène II de l’acte V). Dès lors, ceci permet au lecteur de comprendre que le destin du antihéros, poussé à la limite de la schizophrénie par le contraste total entre son habit de vice, son masque de luxure et une âme qui fut jadis pure et studieuse, est scellé. Ce passage nous fait entrevoir un personnage radicalement orienté vers l’autodestruction : un Lorenzo qui ne veut pas redevenir un simple homme et survivre d’une vie calme et sans remous. Mû par cette ivresse du geste accompli, il paraît déjà plongé dans une mélancolie profonde. Dans la scène II, le monde qui l’entoure, son vieil ami Philippe essayant de le congratuler (« Laisse-moi t’appeler Brutus », et « mon grand Lorenzo ! ») n’ont que peu d’importance à ses yeux. Le processus dramatique est à son apogée dans le dernier acte. Même la clé de sa chambre, devenue le tombeau d’Alexandre, n’a plus qu’une valeur symbolique, il délègue la gloire de l’Histoire à d’autres que lui. Ce désintérêt croissant est illustré par deux répliques : « Philippe, je t’apporte le plus beau joyau de ta couronne », « Je ne nie pas l’histoire, mais je n’y étais pas. ». Nous pouvons donc affirmer que c’est un héros déjà fragilisé, brisé par le rôle de lâche et de déluré qu’il a dû jouer durant tant d’années, qui parle ici de son accomplissement personnel comme d’un fardeau presque oublié, laissé à l’appréciation d’autres juges que lui. Serait-ce parce qu’il a eu la prémonition de ce qui allait arriver à l’objet de toutes ses dévotions, la mère souillée qu’est Florence ?

L’avant-dernière scène élimine le dernier résidu d’espoir que Lorenzo avait en lui. Elle s’ouvre directement, sans transition, sur l’entrée de ce dernier qui tient une lettre lui apprenant le décès de Marie Soderini, la mater dolorosa qui soutint son fils jusqu’aux confins de la tristesse

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