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Marivaux, L'île des esclaves

Commentaire de texte : Marivaux, L'île des esclaves. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  14 Janvier 2021  •  Commentaire de texte  •  2 529 Mots (11 Pages)  •  868 Vues

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Introduction

        Un vent de nouveauté souffle sur une île bien intrigante... L'île des esclaves de Marivaux est le lieu de tous les possibles pour les valets du monde entier car dès l'instant où l'on foule son sol, les rôles maitre-valet s'échangent. Fidèle aux idées des Lumières, Marivaux met en scène une comédie qui propose de réfléchir à la condition du valet, à travers une remise en question profonde des liens qui l'unissent à son maître. L'île est un lieu utopique, un monde social inversé dans lequel vont évoluer les personnages d'Iphicrate et Arlequin, son valet. Ainsi, nous pourrons nous demander dans quelle mesure l'inversion des rôles permet-elle une réflexion sur la condition du valet. Le premier mouvement s'étend de la ligne 1 à la ligne 13 et montre les stratagèmes d'Iphicrate afin de conserver Arlequin dans son rôle de valet. Le second mouvement s'étend de la ligne 14 jusqu'à la fin du texte et met en scène la révolte d'Arlequin.

1er mouvement :

Iphicrate, retenant sa colère.  Mais je ne te comprends point, mon cher Arlequin.

-La didascalie permet d'inscrire Iphicrate dans la tradition du maître colérique et exigeant => la proposition subordonnée participiale « retenant sa colère ».

-Rupture entre Iphicrate et Arlequin qui s'exprime à travers la négation mise en valeurs à l'hémistiche de l'alexandrin« je ne te comprends point ». Les lois de l'île inversent la relation maître-valet traditionnelle et Iphicrate s'inquiète de voir Arlequin ne pas vouloir s’enfuir. Il craint donc que son valet ne prenne goût aux lois de cette étrange île. Crainte qui s'exprime également par la connotation affective et tournure de politesse inhabituelle « mon cher Arlequin ».

Arlequin. Mon cher patron, vos compliments me charment ; vous avez coutume de m'en faire à coups de gourdin qui ne valent pas ceux-là ; et le gourdin est dans la chaloupe.

-Ironie de la réponse de Figaro qui se moque de l'excès de politesse de son maître à travers l'épanadiplose « Mon cher patron » + le choix du verbe « me charment » qui prouve que Figaro a compris qu'il s'agissait d'une tentative de séduction de la part d'Iphicrate afin qu'ils quittent l'île au plus vite.

-Poursuite du ton ironique avec un rappel des violences faîtes précédemment, « coutume » + « coups de gourdin » renvoient à la fois à la condition des valets qui étaient souvent battus par leur maitre mais renvoie aussi à la tradition théâtrale du valet battu par son maître sur scène.

- « Le gourdin est dans la chaloupe », l'aspect symbolique des éléments est à prendre en compte. Le « gourdin » représente comme dit plus haut les violences coutumières faites aux valets et la chaloupe représente l'accès qui permet d'arriver sur l'île et de la quitter. Elle représente donc la société traditionnelle. Le gourdin est dans la chaloupe signifie que désormais, sur cette île, les accès de violence d'Iphicrate n'auront plus leur place et appartient à un autre lieu et un autre temps.

Iphicrate.  Eh ! Ne sais-tu pas que je t'aime ?

Arlequin. Oui ; mais les marques de votre amitié tombent toujours sur mes épaules, et cela est mal placé. Ainsi, tenez, pour ce qui est de nos gens, que le ciel les bénisse ! S'ils sont morts, en voilà pour longtemps ; s'ils sont en vie, cela se passera, et je m'en goberge.

-Structure identique à celle du début, à l'excès de politesse et d'un élan soudain d'Iphicrate pour son valet, Arlequin réplique avec ironie.

-Interjection + point d'exclamation qui souligne l'urgence d'Iphicrate à conserver Arlequin de son côté + interrogative négative pour appuyer sa déclaration d'amour «  eh ! Ne sais-tu pas que je t'aime ». Terme fort qui peut exprimer encore une fois la crainte du maitre de voir son valet se retourner contre lui.

-A cette déclaration d'amour, Arlequin réplique une affirmation franche « oui »...rapidement nuancée « mais ». Il ne cède pas aux flatteries d'Iphicrate et lui rappelle encore une fois ses mauvais traitements. Euphémisme ironique pour évoquer les coups qu'il reçoit régulièrement « les marques de votre amitié » + « tombent toujours sur mes épaules et cela est mal placé. ».

-Evocation du destin tragique des autres voyageurs et serviteurs d'Iphicrate, qui sont noyés. Ils sont tous rassemblés sous l’appellation « nos gens » qui généralise et englobe. On ne les connait pas individuellement mais ils appartenaient tous au maitre. La parole de Arlequin prend de l'assurance avec le // de construction qui met sur le même plan la vie et la mort de ces pauvres gens «  S'ils sont morts , en voilà pour longtemps ; s'ils sont en vie, cela se passera ». Arlequin se veut ici philosophe et accepte l'idée de la mort inéluctable, comme le souligne son dernier commentaire dans un registre de langue plus relâché «  je m'en goberge ».

Iphicrate, un peu ému. Mais j'ai besoin d'eux, moi.

Troisième tentative d'Iphicrate qui joue à présent sur le pathos, en espérant émouvoir son serviteur comme l'indique la didascalie « un peu ému » + l'expression de la nécessité « j'ai besoin d'eux. » Le maître se place au cœur de ses préoccupations => pronom personnel sujet « je » + rejet en fin de phrase du pronom tonique « moi ». Iphicrate est-il vraiment attristé ou joue-t-il la comédie afin d’attendrir Figaro ? Est-il triste de la mort de ses gens ou plutôt du fait qu'ils ne puissent plus le servir ?

Arlequin, indifféremment. Oh ! Cela se peut bien, chacun a ses affaires : que je ne vous dérange pas !

Troisième tentative avortée puisque la didascalie annonce l'échec du jeu d'Iphicrate avec l'adverbe « indifféremment ».

Iphicrate. Esclave insolent !

Iphicrate révèle alors son véritable visage. Tout dans cette courte réplique est faite pour rappeler à Arlequin son rang de valet :

-le GN «  esclave insolent ». Esclave est un terme encore plus fort que valet et insiste sur l’assujettissement total et « insolent » rappelle à la fois à Arlequin qu'il n'est pas libre de parole et qu'il doit le respect à son maitre.

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