Ma Bohème Rimbaud

Lecture analytique n° 4 : « Ma Bohème » de Arthur Rimbaud, Les cahiers de Douai, 1870

Poème datant de 1870 figurant dans les cahiers de Douai qui fait référence implicitement à des expériences de fugues d'Arthur Rimbaud, fuyant la ville de Charleville et son univers familial et oppressant vers la Belgique et Paris..Toutefois, au delà de l'expérience autobiographique initiatique, le sonnet Ma Bohème est aussi une initiation (une fantaisie, qui est d'ailleurs le sous-titre donné à ce poème) poétique comme le montre le jeu sur les registres mêlant lyrisme et dérision.

Questions possibles à l'oral :

– Montrez que ce voyage par la nature est aussi un voyage en poésie.

– Comment ce poème se situe-t-il entre lyrisme et dérision ?

I Autoportrait du poète en coureur de chemins

1- L'expérience du voyage

– Une aventure vécue : L'emploi de la première personne (omniprésente dans le poème) et de l'imparfait à valeur itérative (de répétition) du verbe de mouvement « aller » installe dès les premiers vers le poème sous le signe de l'expérience vécue (des fugues de la même époque).

– Un portrait de vagabond : Rimbaud se décrit en vagabond : Ses vêtements sont élimés. Son « paletot » est si usé qu'il n'est plus qu'une idée de paletot « idéal » (v.2). « Ses poches » sont « crevées » (v.1) (et donc vides), son pantalon est troué : « Mon unique culotte avait un large trou » (v.5), ses « souliers » (et par métonymie ses pieds) sont « blessés » (v.14). La comparaison avec le « Petit-Poucet » suggère l'errance mais aussi l'abandon des enfants misérables. Contrairement à un poème comme « Sensation » qui décrit une promenade imaginaire par la nature, on trouve dans ce poème des éléments concrets qui retracent la fatigue, la réalité concrète du voyage.

Toutefois, on peut se demander dans quelle mesure cet autoportrait est réaliste et dans quelle mesure nous n'assistons pas là à la création du mythe Arthur Rimbaud (Le fils de famille se métamorphose en enfant abandonné et entièrement libre).

2- Un adolescent ivre d'espace et de liberté

Malgré ce dénuement, ce voyage est ressenti par le poète comme un moment de liberté totale, de plénitude.

- Tout d'abord, le poème est placé sous le signe d'une énergie libératrice. Le poète ne met pas ses mains dans ses poches mais ses poings (v.1), il ne cesse d'avancer comme le montre la répétition des verbes de mouvement (je m'en allais/j'allais/j'égrenais dans ma course). A noter aussi que l'imparfait correspond à une action non bornée dans le temps.

- Et il effectue un voyage vers l'immensité, la liberté. C'est un voyage non borné sous le ciel et les étoiles, sur les routes, avec comme auberge, « La grande Ourse », seule borne géographique et poétique.

- Ce voyage est heureux, insouciant, sans peur ni danger. Rimbaud est en osmose avec la nature comme le montrent l'emploi des possessifs « Mon auberge » (v. 7), « mes étoiles »(v.8). La nature est protectrice (la rosée lui offre un vin de vigueur, maternelle comme le montre l'onomatopée « f roufrou »(v. 8) (synesthésie entre la vue et le bruit léger d'une étoffe féminine...), les soirs sont qualifiés de « bons »(v.10).

Ainsi, la pauvreté de l'équipement est propice au rêve, le dénuement entraîne la liberté, l'absence d'entraves. Ceci est repris dans le titre du sonnet « Ma Bohème », faisant allusion à la vie de bohémien, de vagabond mais aussi à l'insouciance et la fantaisie des milieux littéraires portant ce nom « La Bohème littéraire ».

Transition :

Mais ce sont ses « rimes » (terme placé en rejet au v.7et donc mises en relief)

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