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Lorenzaccio, Un héros Romantique

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Par   •  2 Décembre 2012  •  2 384 Mots (10 Pages)  •  1 347 Vues

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1. Lorenzo, un héros ?

La caractérisation de Lorenzo en tant que héros fait question. La pièce porte son nom et l’intrigue principale est centrée sur son geste et son évolution mais si l’on s’intéresse à sa présence scénique et à ses prises de parole, on remarque que Lorenzo est présent dans 15 scènes sur 39 (si l’on exclut la scène 2 du premier acte où il ne fait qu’une apparition déguisé en nonne), ce qui peut sembler assez peu. En revanche, si l’on considère sa présence de manière plus large, on se rend compte qu’il est souvent l’objet des discussions d’autres personnages, ce qui témoigne de son rayonnement dans l’intrigue. Lorenzo fait parler, suscite de multiples interrogations et les remarques des uns et des autres permettent de le caractériser au-delà de l’image qu’il donne à voir et de compléter, en quelque sorte, son portrait.

• L'homme aux deux portraits : public et privé

À cet égard, les autres personnages dressent de lui un portrait très discordant. Deux visions de Lorenzo s’opposent :

- d’une part, Lorenzo est caractérisé selon son image « publique ». Cette image est peu valorisante : « ivrogne », « un gredin » (I, 2) », « le plus fieffé poltron ! une femmelette, l’ombre d’un ruffian énervé ! un rêveur », « glissant comme une anguille », « mon entremetteur », « ce petit corps maigre, ce lendemain d’orgie ambulant », « libertin », « le modèle titré de la débauche florentine », « Double poltron ! fils de catin ! » (I, 4) ; « ce misérable », « cette canaille » (II, 5) ; « traître à la patrie et assassin de son maître » (décret) (V, 2).

C’est une image peu positive et peu héroïque de Lorenzo qui se construit mais il manifeste toutefois des qualités, mises au service du vice : il est séducteur, habile, rusé, hypocrite et particulièrement redoutable dans son rôle d’espion. Dès le début, des indices le présentent comme un potentiel traitre présentant une menace pour le duc. On craint son geste : il apparaît donc comme un personnage peu fiable voire inquiétant. À bien des égards, il se distingue comme une sorte de contre modèle ou de faux modèle.

- D’autre part, Lorenzo est évoqué dans une sphère plus privée, par des personnages qui le connaissent plus intimement. Là encore sont évoqués plusieurs Lorenzo par sa mère : « un spectre hideux qui vous tue en vous appelant encore du nom de mère », « Ce ne sera jamais un guerrier », « Lorenzino d’autrefois », « cet enfant » (I, 6).

Marie semble vouloir conserver l’image passée, enfantine et intacte, de Lorenzo. Elle évoque même, dans un de ses rêves, un paradis perdu où elle se voit bercée par une représentation idéale de son fils. Cette vision maternelle contraste avec l’image publique que renvoie le Lorenzo du présent.

• Un combattant déterminé

Si l’image d’un Lorenzo guerrier est niée par sa mère, Lorenzo tend pourtant à s’affirmer comme un combattant, un personnage de défi. Il apparaît d’ailleurs comme une fine lame lors de son entraînement avec le spadassin Scoronconcolo (III, 1), bien loin de l’image publique de couard s’évanouissant à la vue d’une épée (I, 4). Surtout, c’est à travers les yeux de Philippe Strozzi que Lorenzo apparaît comme un libérateur. « Tu es un Médicis toi-même, mais seulement par ton nom », « que l’homme sorte de l’histrion », « Ne m’as-tu pas parlé d’un homme qui s’appelle aussi Lorenzo, et qui se cache derrière le Lorenzo que voilà ? » (III, 3). Philippe l’exhorte à s’affirmer et à retrouver son honneur et sa vertu par un geste fort. « O notre nouveau Brutus ! », « Mon Brutus ! mon grand Lorenzo ! » (V, 2). Lorenzo est ainsi lié, pour Philippe, à son image de sauveur de la cité.

Mais si Lorenzo apparaît bien souvent en public comme un être carnavalesque et léger, il manifeste une détermination assurée. Son geste est-il lié à un désir de vengeance ? Quelles en sont les motivations ? « Il faut que je sois un Brutus », « j’ai travaillé pour l’humanité », « je voulais… me prendre corps à corps avec la tyrannie vivante » déclare-t-il, acte III, scène 3. Son acte résulte d’une réflexion, d’une maturation, d’une préparation de plusieurs années. Ce désir de délivrer Florence de la tyrannie semble converger avec les idées républicaines. Pourtant Lorenzo exprime un désir de vengeance envers les républicains et le mépris qu’ils lui ont manifesté, le croyant au service du tyran. À travers eux, il manifeste un désir de reconnaissance bien plus général envers tous ceux qui l’ont conspué : « Et me voilà dans la rue, moi, Lorenzaccio ? Et les enfants ne me jettent pas de la boue ? » (III, 3). Ainsi, Lorenzo, en prenant de la distance par rapport à Lorenzaccio, tend à réaffirmer son amour propre auprès de l’humanité : « voilà assez longtemps… que l’exécration des hommes empoisonne le pain que je mâche […] Il faut que le monde sache un peu qui je suis, et qui il est » (III, 3).

2. Une identité problématique

• Héros de la duplicité

« Il faut que le monde sache un peu qui je suis ». Cette déclaration pose problème car Lorenzo est le héros insaisissable, le héros de la duplicité. Cette duplicité est suggérée par ses multiples noms et par les réactions contrastées qu’il suscite chez les autres (et les visions opposées qui en découlent). Elle est également suggérée par son rôle d’espion au service d'Alexandre qui lui impose d’être double. Mais surtout, elle s’exprime à travers les images contradictoires que Lorenzo donne de lui-même. Les thèmes du masque et du double sont évidemment liés chez Lorenzo et concourent à construire de lui une identité très incertaine.

Lorenzo se donne à voir tantôt comme un libertin dépravé : « Les lits des filles sont encore chauds de ma sueur », « Je suis devenu vicieux, lâche, un objet de honte et d’opprobre » (III, 3), tantôt comme un intellectuel pacifique : « Si l’on vous a dit que je suis un soldat, c’est une erreur ; je suis un pauvre amant de la science » (I, 4), « j’étais un étudiant paisible et je ne m’occupais alors que des arts et des sciences » (III, 3). De même, il se représente tantôt comme un pleutre incommodé par la vue d’une arme (I, 4), tantôt comme un redoutable et vaillant guerrier (« tigre ») fort intéressé par les instruments du combat : « Montre-moi cette épée. Ah garçon, c’est une brave lame » (III, 2). L’image la plus contradictoire

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