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Le Théatre Destiné à être Lu Ou Représenter ?

Dissertation : Le Théatre Destiné à être Lu Ou Représenter ?. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  6 Mars 2015  •  2 864 Mots (12 Pages)  •  1 239 Vues

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Dissertation : Gilles Aillaud affirme qu’il est des pièces qui ne sont pas à représenter mais à lire alors même qu’il travaille à la scénographie de Bérénice la Comédie Française. Qu’en pensez-vous ?

Autrefois dans la Grèce antique, le théâtre était un art destiné à être regardé par un public. Le théâtre, notamment en France, est reconnu aujourd’hui aussi bien comme un domaine littéraire qu’un art du spectacle, et les valeurs littéraires des pièces de théâtre ne cessent de s’intensifier dans les yeux des amateurs. Nous possédons deux voies majeures pour aborder une pièce de théâtre, soit en tant que spectateur, soit en tant que lecteur. La représentation consiste à présenter une pièce de théâtre une nouvelle fois, avec entre autre, des transformations éventuelles entre plusieurs représentations, ce qui la rend unique. En introduisant la pièce aux yeux des spectateurs, elle la rend vivante et actuelle. Chaque représentation est alors une recréation de la pièce par le metteur en scène, créant un lien entre les spectateurs et les acteurs qui regardent sur scène. Mais Gilles Aillaud, scénographe de Bérénice à la Comédie Française pense plutôt qu’il existe des « pièces qui ne sont pas à représenter mais à lire », telle que Bérénice de Racine. La lecture d’une pièce de théâtre peut aider les lecteurs à percevoir au mieux l’aspect poétique d’une pièce en vers comme Bérénice. Le lecteur est appelé à se plonger dans les lignes d’écriture, en essayant de comprendre le message qu’on a voulu lui transmettre derrière des figures de styles, des expressions. Il prend du temps pour aller et venir entre les parties de l’œuvre et n’hésite pas à reprendre la lecture en entier. La lecture permet ainsi de savourer seul la beauté de la langue utilisée. Mais est-ce que la beauté d’une œuvre théâtrale est valorisée avant tout par la lecture et moins par la mise en scène ?

En essayant de répondre à cette question, nous allons voir dans un premier temps les pistes fécondes que la lecture peut offrir à un lecteur attentif dans sa découverte de l’œuvre. Nous soulignerons ensuite qu’en en effet la représentation d’une pièce semble difficilement négligeable dans la mesure où elle apporte au spectateur d’autres aspects admirables d’une œuvre qui ne peuvent pas être perçus dans une lecture. Finalement, nous tenterons de faire de la lecture et de la représentation, deux éléments complémentaires pour aboutir à la meilleure approche possible du texte théâtral.

Lire semble être une excellente approche d’un texte théâtral. La question du temps consacré à la lecture n’est pas une contrainte, ce qui autorise une libre circulation dans l’œuvre. Cet élément est capital pour une meilleure compréhension de l’œuvre afin de se rendre compte de toutes ses valeurs. Enfin, la lecture individuelle provoque souvent chez le lecteur des sensations personnelles, qui peuvent faire naître le plaisir de posséder quelque chose à soi.

Dans la lecture, le lecteur est libre dans le choix de la quantité de temps consacrée à la lecture. Il a la possibilité de prendre du temps pour découvrir un langage théâtral, qui n’est pas forcément familier. Cette distance proviendrait du vocabulaire de l’époque, car par exemple, l’usage des mots au XVIIème siècle n’est pas le même qu’actuellement. Les mots comme « feux », « ennui », « déplaisirs » n’ont plus aujourd’hui une signification aussi intense que dans Andromaque de Racine ou Horace de Corneille. Il en va de même pour le registre, le contexte historique et religieux ou encore le style comme l’écriture en vers dans les pièces de théâtre classiques. Si le lecteur arrive à se donner du temps pour se familiariser peu à peu avec le langage d’une pièce, la distance temporelle entre l’époque de l’auteur et celle du lecteur peut très bien se raccourcir, voire disparaître. Et puisque le temps n’est plus une contrainte comme dans une représentation où il est limité, le lecteur a droit à une libre circulation dans l’œuvre. Il est donc invité à revenir sur des passages nécessaires quand il le désire, voire à reprendre la lecture de l’œuvre intégrale plusieurs fois. De telles reprises sont impossibles au théâtre même si on revoit une représentation d’une même troupe car chaque représentation est unique et ne peut être reproduite à l’identique.

Cette possibilité de concevoir des allers-retours dans l’œuvre est capitale tout d’abord pour cerner le message implicite que l’auteur a voulu cacher derrière son écriture. Chaque élément, qu’il soit dans les répliques ou dans les didascalies a un sens, rien n’est anodin car même dans les pièces que l’on peut qualifier d’ « absurdes », les messages sont très nombreux. Dans En attendant Godot de Beckett, la chaussure qu’Estragon essaie désespérément de s’enlever ou la ceinture qui se casse quand Vladimir essaie de se pendre traduisent toutes deux une certaine impuissance face au destin déjà dessiné. La compréhension ne peut tout de même pas s’effectuer totalement suite à une seule rencontre avec l’œuvre. Il s’agit d’un travail de construction continuel et précis d’où l’importance de pouvoir revenir sur certains passages que l’on n’a pas vraiment compris.

Dans un second temps, les promenades du lecteur dans l’œuvre lui permettent de contempler la beauté de l’écriture utilisée. L’aspect poétique dans Bérénice de Racine mérite d’être étudiée en profondeur par le biais de multiples figures de styles comme métaphore, comparaison, antithèse, ou chiasme, ou par la richesse des rimes dans les alexandrins. Le travail sur l’étymologie des mots utilisés comme « enfant », « cruauté », « limbes » peut s’avérer passionnant. Il aide parfois fortement à comprendre le côté implicite de l’œuvre. Absolument passionant les moments d’exaltation dans un monde absolument absurde et pleins de fadaises.

Finalement, suite à un certain temps consacré à l’œuvre, le lecteur est libre dans la « concrétisation » de l’image des acteurs, leur voix, leur taille, leur jeu, mais aussi pour tout ce qui concerne les cadres spatio-temporels comme les décors, les costumes, et les objets théâtraux. Il peut imaginer sa propre « représentation » car il n’y a pas d’images qui lui sont imposées comme dans le cas d’un spectateur au théâtre. Il est important de souligner que les metteurs en scène doivent être tout d’abord des lecteurs de théâtre pour pouvoir arriver à représenter une pièce. Ainsi, chaque lecteur a sa propre interprétation des éléments dans la pièce. Il est très souvent le seul à éprouver certains

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