Le Roi Se Meurt - Ionesco

Le Roi se meurt

I. Résumé

Les terres du Roi Bérenger sont inondées, les montagnes s’affaissent, les frontières reculent, les villes sont rasées et envahies. Son palais délabré tombe en ruines, malgré les efforts de Juliette, femme de ménage et infirmière au service de Sa Majesté. Ses balais sont usés, les toiles d’araignées n’arrêtent pas de repousser.

La Reine Marguerite, première épouse du Roi, entre dans la salle du trône, où elle attend qu’il se réveille pour lui annoncer sa mort très proche. Le Garde est fatigué, il a froid. La cour souffre et se plaint de l’état du Royaume, dont Margueritte juge le Roi responsable en raison de sa négligence.

Entre alors la Reine Marie, seconde épouse du Roi, plus jeune et attrayante que Marguerite. Marie est triste, elle pleure. Elle veut croire au rétablissement du Roi et refuse de lui annoncer sa mort. Pour elle, il est encore tout jeune et subit le déclin de son Royaume, impuissant face à la nature et à la force des choses. Marguerite accuse quant à elle Marie de ne pas avoir préparé le Roi à sa mort et condamne leur frivolité, leur douceur de vivre. Juliette, les yeux égarés, quitte la pièce, sur ordre de la première Reine. Marie est finalement convaincue par Marguerite de la nécessité d’annoncer la mort du Roi, à condition de le faire avec douceur. Le Médecin - également bourreau et astrologue - juge la situation irrémédiable en voyant les arbres mourir et les nuages pleuvoir des grenouilles. Mars en Saturne sont entrées en collision.

Le Garde annonce l’arrivée du Roi, en musique. Ayant peur qu’il attrape froid, Marie demande à Juliette de lui mettre ses pantoufles, pendant que le Médecin salue mielleusement Sa Majesté. Le Roi a mal aux pieds, ses membres sont engourdis. Bien qu’il se plaigne du bruit et de ses maux de tête, il pense avoir encore du pouvoir sur sa santé, sur son Royaume, sur les nuages. Il constate alors la peine de Marie et accuse Marguerite de la lui avoir causée.

Prenant conscience de son état de santé, le Roi entre en contradiction : « Je boîte ? Je ne boîte pas. Je boîte un peu ». Marguerite lui annonce alors sa mort, pensée désagréable qu’il refuse. Il mourra plus tard. Quand il voudra. Il est soutenu dans ce déni par Marie, qui, après avoir à nouveau changé d’avis, lui demande de ne pas y croire. Alors que Marguerite et le Médecin précisent au Roi qu’il mourra à la fin du spectacle, Juliette annonce que les ministres qu’elle était partie chercher sont tombés dans le ruisseau, qui a lui-même coulé dans l’abîme. Le Roi croît alors à un complot, à de la sorcellerie et demande au Garde d’arrêter Marguerite et le Médecin. A sa grande surprise, le Garde est incapable de bouger. L’armée est paralysée par ses ordres.

Le Roi se lève alors et le Garde s’écrit : « Vive le Roi ! » Puis le Roi tombe et le Garde annonce : « Le Roi est mort. » Il se relève puis retombe et la scène se répète dans un effet comique, amplifié par les annonces très spontanées du Garde. Marie, qui refuse toujours d’accompagner le Roi vers sa mort, lui donne son sceptre. Mais lorsque Marguerite la fait taire, elle lui obéit pour la première fois et s’immobilise. Le Garde passe également sous le contrôle de Marguerite et devient incapable d’acclamer le Roi. Les mots ne sortent plus de sa bouche. Marie et le Garde n’arrivent plus, malgré eux, à obéir au Roi et ce dernier se fatigue à essayer d’exercer son pouvoir sur les gens, les arbres, le palais, en vain.

Le Garde annonce que la cérémonie commence. Le Roi, sur son trône, Marie à ses côtés, comprend alors qu’il va mourir et supplie qu’on l’aide. Marie prend alors conscience de son vieillissement fulgurant et commence à parler de lui au passé. Le Roi, en colère, reproche à Marguerite de l’avoir prévenu trop tôt, de l’avoir averti trop tard. On l’a trompé, on lui avait promis qu’il ne mourrait que lorsqu’il l’aurait décidé lui-même. Puis il commence à regretter de ne pas s’y être préparé et inspire à Juliette de la pitié. Tantôt il entre en désespoir, tantôt il réclame de l’aide. Il a peur. Alors qu’il appelle le peuple au secours par la fenêtre, Marguerite a honte et lui reproche de se fatiguer, tandis que Marie veut qu’il tente toutes ses chances, toujours pas résignée.

Juliette sort puis revient avec un fauteuil d’infirme à roulettes portant l’insigne du Royaume. Le Roi pleure, il a des rhumatismes. Il veut se promener, prendre l’air. Juliette revient à nouveau, portant cette fois une couverture, un vêtement chaud et une bouillotte. Le Roi lutte pour monter les marches du trône mais n’y parvient pas. Semblable à un enfant, il refuse de mettre le bonnet que lui tend Juliette et veut garder son sceptre. Il proteste et écarte maintenant Marie, effrayé par sa pitié.

Sa vie, bien que longue, est passée trop vite. Il disait toujours qu’il avait tout son temps pour apprendre à la connaître et affirme aujourd’hui qu’il n’a jamais eu le temps. Marguerite lui fait pourtant remarquer qu’il avait à sa disposition les plus grands savants, qu’il n’a jamais écoutés, et des livres, qu’il n’a jamais lus. D’après le Médecin, s’il refuse de se résigner, c’est qu’il commence à se résigner. Ce dernier le complimente enfin et énumère les nombreux accomplissements du Roi, évoquant une vie bien remplie, une vie de héros, selon Marie, immédiatement contredite par Marguerite. Mais le Roi admet qu’il n’est plus la loi et veut être un bébé, pour tout recommencer. Il s’accroche encore à la vie souhaite que tous meurent pourvu qu’il vive éternellement.

Le Roi Bérenger se résigne enfin et a peur, il s’enfonce, il s’engloutit, il n’est plus rien, il n’a jamais été. Il meurt et demande aux morts de l’aider à franchir la porte. Il veut être indifférent, serein. Selon Marie, il retournera là où il était avant de naître. Marguerite et Marie sont enfin d’accord sur ce point. Malheureusement, le Roi ne se souvient pas de ce monde. Il ne parvient pas à gravir les marches du trône et tombe dans le fauteuil à roulettes. On lui met alors la bouillotte et la couverture.

Hébété, le Roi s’intéresse à Juliette pour la première fois et s’émerveille de choses banales, allant jusqu’à être ravi des malheurs et de la simplicité de sa vie de bonne. Il rêve de pot-au-feu et demande qu’on lui en amène un, ce à quoi s’opposent le Médecin et Marguerite, qui jugent que cela aggraverait son état de santé et l’empêcherait de se détacher de ses désirs. Le Roi, fatigué, renonce au pot-au-feu. Il change physiquement. Il se rapproche de la mort.

Alors

...