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Le Retour De Thésée Chez Racine Et Chez Sénèque

Mémoires Gratuits : Le Retour De Thésée Chez Racine Et Chez Sénèque. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  11 Avril 2013  •  2 982 Mots (12 Pages)  •  1 479 Vues

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Près de dix-sept siècles séparent Sénèque, auteur et philosophe romain appartenant à la tradition du théâtre antique, de Racine, auteur et dramaturge français appartenant à la tradition du théâtre classique. Pourtant, on constate que le mythe de Phèdre et d’Hippolyte ne s’est pas perdu puisqu’il marque chacune de leur œuvre. Dans ce mythe de Phèdre et d’Hippolyte, aussi bien chez Sénèque que chez Racine, le passage qui nous intéresse est celui du retour de Thésée. Chez les deux auteurs, le retour de Thésée se situe au beau milieu de la pièce : Acte III, scène 5 pour Racine et Acte III pour Sénèque. Au niveau de la forme des deux extraits on observe une longue tirade de Thésée chez Racine et un dialogue entre Thésée et la nourrice chez Sénèque où Thésée a un temps de parole supérieur à celui de la nourrice. La tirade laisse penser à l’expression des sentiments de Thésée, à l’emportement de celui-ci face à l’atmosphère étrange qui règne au palais. L’intervention de la nourrice chez Sénèque, elle, permet d’une certaine façon de guider Thésée quant à ce qu’il se passe chez lui. On constate aussi, toujours au niveau de la forme que ces deux extraits sont faits d’alexandrins. Le thème du retour de Thésée aussi bien dans l’esthétique antique que dans l’esthétique classique est important. Dans les deux cas, cette scène représente un moment important de la pièce dans le sens où c’est une scène de bouleversements. En cela, on peut se demander en quoi le personnage de Thésée et son retour est source de basculement tragique aussi bien dans l’esthétique antique que dans l’esthétique classique. Dans un premier temps nous nous intéresserons à l’autoportrait de Thésée qui figure aussi bien chez Racine que chez Sénèque et dans un second temps, nous nous intéresserons au retour de Thésée qui mêle de façon confuse espoir et réalité.

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Dans la mythologie grecque, Thésée, fils d’Egée et d’Ethra, est un héros de l’Attique. Celui-ci est le roi-fondateur mythique de la ville d’Athènes.

Les deux extraits étudiés nous livrent un portrait du personnage de Thésée. Aussi bien chez Sénèque que chez Racine on observe l’utilisation de la première personne du singulier « je » (vers 853 chez Racine et vers 835 chez Sénèque). En plus de ce « je » qu’on trouve tout au long des deux extraits, on observe un ensemble de mots qui se rapporte à la première personne comme les déterminants possessifs que sont « mon » (vers 973, 981 chez Racine et vers 846 chez Sénèque) , « ma » (vers 956 chez Racine), « mes » (vers 954, 984 chez Racine et vers 843, 850 chez Sénèque). Ces utilisations du pronom personnel « je » et des déterminants possessifs qui se réfèrent à la première personne du singulier nous laissent voir à travers les paroles de Thésée, qui se retrouve de nouveau chez lui après un long périple, une description de lui-même. Thésée dresse ainsi son propre autoportrait aussi bien chez Sénèque que chez Racine.

Chez Racine, Thésée se dépeint comme un héros romanesque. Le héros romanesque a une identité, un statut social. Il se distingue des autres personnages par son parcours, par son importance, de sorte que l’attention soit fixée sur lui seul. Ce héros romanesque accomplit une ou plusieurs missions et a toujours un ami sur qui compter. De plus, le héros romanesque rencontre au cours de son parcours des adjuvants, qui l’aident, et des opposants qui lui font obstacle. On retrouve toutes ces caractéristiques chez le Thésée de Racine. En effet Thésée, fils d’Egée et d’Ethra, a un statut social important puisque c’est lui qui occupe le trône de l’Attique. C’est le roi de ce territoire. Les occurrences suivantes permettent de conforter Thésée dans sa position de héros romanesque : « je servais à regret ses dessins amoureux », vers 959, ou encore « Je n’avais qu’un ami » (Pirithoüs), vers 957. Ici, chez Racine, celui qui incarne l’opposant au périple de Thésée serait le « tyran de l’Epire », vers 958. Même si Thésée fut capturé par le « tyran de l’Epire », il se dépeint aussi comme un héros guerrier puisqu’il évoque au vers 981 comme il a servi la Grèce à plusieurs reprises : « La Grèce, à qui mon bras fut tant de fois utile, ». D’après les dire de Thésée ce n’est pas un simple guerrier, c’est un guerrier soutenu par les Dieux. Il invoque le ciel au vers 956 en utilisant le Ô lyrique : « Ô ciel ! ». Au vers 957, on peut lire « Les dieux après six mois enfin m’ont regardé ». Thésée ne se voit pas autrement qu’un héros. Il considère que ses hauts faits, son parcours, son périple, ses péripéties doivent engendrer une admiration venant de la part des autres. Après avoir échappé au « tyran », Thésée s’attend clairement à être reçu comme un héros. Il incarne, d’après cet autoportrait, un idéal, un surhomme faisant preuve d’abnégation. Dans cette tirade, Thésée met en avant une forte présence divine. Son rôle de héros tel qu’il le conçoit se situe dans la transcendance même, dans le dépassement la condition humaine.

En revanche, chez Sénèque l’autoportrait de Thésée est en totale opposition avec celui de chez Racine. Thésée, en effet fait une narration lasse et sans emphase de ses exploits. On observe le champ lexical de la douleur, de la souffrance : « endurais », vers 840, « incertain », vers 840, « maux », vers 841, « malheurs », vers 843, « las », vers 846, ou encore « tremble », vers 847 ». Thésée, sans voile, met en avant sa faiblesse d’homme mûr. On peut le voir au vers 846, « mon courage est las, n’a plus sa force ancienne ». Cet homme, Thésée, oppose clairement la force de sa jeunesse à la faiblesse de son âge élevé. Cela nous procure, à nous lecteur, à nous spectateur, une sensation de pesanteur, de lourdeur insupportable que subit le vieil homme. Il n’est plus l’homme des exploits d’antan. Son unique désir est de retrouver le repos, la tranquillité et la sérénité de son foyer. Les registres pathétique, tragique et élégiaque confirment ce mal être du personnage. De plus, on observe que chez Sénèque, Thésée ne s’adresse plus aux dieux comme chez Racine, mais il s’adresse à la nourrice de Phèdre. Par trois fois, la nourrice intervient pour répondre à Thésée. On le voit aux vers 854, « Phèdre est obstinément décidée à mourir », vers 857, « C’est bien là la raison qui la pousse au suicide » et vers 860-861, « elle n’en souffle pas mot, triste et secrète, et emporter au tombeau le mal dont elle meurt ». Cette nourrice a les traits habituels de ce personnage : c’est une femme âgée qui conseille et qui console. Chez Sénèque,

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