LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

La Descente Aux Enfers De Lorenzaccio

Mémoire : La Descente Aux Enfers De Lorenzaccio. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Avril 2012  •  2 499 Mots (10 Pages)  •  1 815 Vues

Page 1 sur 10

L'enfer se pressent à travers l'obscurité, l'absence du soleil comme le dit Philippe « Voilà la nuit; la ville se couvre de profondes ténèbres ». Dans l'acte I,1, on se retrouve en pleine nuit lors d'un clair de lune. Cela indique que dès le début de la pièce, on est plongé dans les abimes de l'enfer. Nous n'assisterons donc pas à la descente de Lorenzo en direct car il est déjà corrompu et débauché au début de la pièce; les gens de la ville le nomme déjà Lorenzaccio; il est déjà en enfer.

Cet enfer est en fait une recherche, c'est à dire une une suite d’efforts pour retrouver quelque chose que l’on a perdu. Lorenzaccio essaye de retrouver et de sauver, ce qui veut dire ramener en dehors des enfers dans ce cas-ci, son moi « pur » et « paisible », son moi passé. Néanmoins, cette épopée s'avère difficile. Lorenzaccio avoue qu'il y a seulement « un fil qui rattache aujourd’hui (son) cœur à quelques fibres de (son) cœur d’autrefois. » Le fil représente la fragilité, il peut se rompre à tout moment et par conséquent faire sombrer à jamais le bon Lorenzo en enfer, c'est à dire, le faire disparaître.

Le fil a aussi une symbolique mythologique, il fait penser à celui qu'utilisa le héros grec Thésée pour sortir du labyrinthe dans lequel il tua le Minotaure. Le labyrinthe, quant à lui, représenterait l'enfer au sens figuré. Plus on avance à l'intérieur, plus on se perd et plus on se rapproche du centre, l'endroit le plus profond. Dans les enfers grecs, le centre s'appelait le Tartare. C'est là-bas que siégeait le Dieu de la mort Hadès, mais c'était aussi la prison des pires criminels. Le Minotaure, qui se trouve au centre du labyrinthe, serait donc l'un de ces dangereux criminels. C'est après l'avoir tué que Thésée retrouva son chemin; il pourrait donc être assimilé au duc Alexandre dont la mort est pour Lorenzaccio, le seul chemin qui mène à la rédemption. En effet, il considère le duc comme une sorte de double maléfique qui l'a initié à la débauche et qui continuera d'agir de la sorte. En le tuant, il tuera la cause principale du vice qui l'entretient et pourra par conséquent récupérer sa vertu passé. Mais en allant encore plus loin, nous remarquons que finalement Lorenzo est Thésée mais aussi le Minotaure, il est à la fois le héros et le monstre qui sont tous deux opposés. Par conséquent, la mort du duc ne tuera pas le vice de Lorenzo car le mal s'est déjà incrusté en lui, il fait parti de lui. Il se compare d'ailleurs à la bête très explicitement « De quel tigre a rêvé ma mère enceinte de moi ? (...) ? De quelles entrailles fauves, de quels velus embrassements suis-je donc sorti ? » (Acte IV,3). C'est une référence directe au Minotaure car la bête est le fruit de l'union d'une femme et d'un taureau. Cette dernière avait été puni par Poseidon qui la fit tomber amoureuse de l'animal. Lorenzaccio se compare aussi à Ugolin della Gherardesca, un personnage de la Divine Comédie de Dante qui fut emprisonné aux enfers pour avoir mangé ses propres enfants « Coupons-le par morceaux, et mangeons, mangeons! (...) ô dents d’Ugolin ». Il évoque même Satan « Suis-je un Satan? ».Mais le côté pur de Lorenzo est aussi évoqué à maintes reprises « Ma jeunesse a été pure comme l’or », « j’étais pur comme un lis », « Quand je pense que j’ai aimé les fleurs, les prairies et les sonnets de Pétrarque », « je songeais aux jours où j’étais heureuse, aux jours de ton enfance, mon Lorenzino », « j’ai reconnu mon Lorenzino d’autrefois ». Le surnom Lorenzino, utilisé par Marie, est très affectif et représente le Lorenzo d'antan, le gentil.

Cette dimension symbolique des deux personnalités principales de Lorenzo (Lorenzino et Lorenzaccio), à travers le thème de la descente en enfer, nous fait mieux comprendre la nature de chacune. Lorenzino, qui aimait les fleurs et les prairies, symboles du soleil, n'est pas né en enfer mais y est descendu, et Lorenzaccio, figure du Minotaure, d'Hugolin et même de Satan, est en enfer depuis le début et sa place est là-bas. Le parcours du héros explique cette transformation. Tout d'abord, on a affaire au Lorenzino d'antan, jeune bon et pure, qui décide d'effectuer une catabase (en grec: descente aux enfers) pour tenter de sauver la belle et libre Florence défunte. Il doit ensuite effectuer une anabase (en grec: remontée des enfers) afin de faire revenir la ville à la lumière (dans la pièce l'anabase serait une révolution républicaine). Pour réussir sa tache, il doit se fondre dans l'environnement et agir comme un membre à part entière de l'enfer afin de se rapprocher du duc, le tuer et déclencher la révolte. Mais ressortir des enfers est une épreuve ardu et peu sont les héros grecs qui réussirent. Comme beaucoup d'entre eux, Lorenzo se perdit en chemin et se fit corrompre par l'environnement hostile et malsain, jusqu'à ne plus pouvoir enlever le masque qu'il s'était créé car ce dernier était devenu une véritable peau vivante, Lorenzaccio était vivant et faisait partie à présent du héros. Plus le temps passait, plus le mal s'emparait de Lorenzo et plus son côté pure se détériorait. Il finit par apprécier cet enfer. Mais il ne baissa pas pas les bras, « J’aime encore le vin et les femmes ; c’est assez, il est vrai, pour faire de moi un débauché, mais ce n’est pas assez pour me donner envie de l’être. », il essaya donc de retrouver le spectre de son ancien moi qui vacillait en enfer et qui était amené à disparaître s'il n'agissait pas. Entre temps Lorenzo a perdu la foi en la révolution dût aux républicains trop faible et peureux pour se décider à agir. Le meurtre du duc ne symbolise donc plus l'anabase de Venise mais celle de Lorenzo. En somme, Lorenzaccio doit retrouver le spectre de Lorenzino qui git en enfer, et le ramener à la lumière avec lui.

On retrouve encore un côté mythologique à ce schéma car il semble être inspiré de l'histoire d'Orphée et de sa femme défunte Eurydice. Ce dernier, n'acceptant pas la mort de sa bien aimée, décida d'entrer dans les enfers pour aller la trouver et la sauver. Il y a un grand parallèle avec la pièce de Musset. En effet, Orphée représenterait la figure de Lorenzo qui est descendu en enfer, c'est à dire Lorenzaccio et Eurydice serait Lorenzino, le « temps perdu », le moi passé et défunt de Lorenzaccio qui a sombré dans les abymes de l'enfer. La différence réside dans le fait qu'Orphée recherche une femme, un être

...

Télécharger au format  txt (14.5 Kb)   pdf (138.6 Kb)   docx (13.4 Kb)  
Voir 9 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com