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La Bruyère, « Des Jugements », Les Caractères, 1688-1696

Mémoire : La Bruyère, « Des Jugements », Les Caractères, 1688-1696. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  8 Novembre 2014  •  625 Mots (3 Pages)  •  1 251 Vues

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Texte A : La Bruyère, « Des jugements », Les Caractères, 1688-1696

Petits hommes, hauts de six pieds1, tout au plus de sept, qui vous enfermez aux

foires comme géants, et comme des pièces rares dont il faut acheter la vue, dès que

vous allez jusques à huit pieds ; qui vous donnez sans pudeur de la hautesse et de

l’éminence2, qui3 est tout ce que l’on pourrait accorder à ces montagnes voisines du ciel

et qui voient les nuages se former au-dessous d’elles ; espèce d’animaux 5 glorieux et

superbes4, qui méprisez toute autre espèce, qui ne faites pas même comparaison avec

l’éléphant et la baleine ; approchez, hommes, répondez un peu à Démocrite5. Ne ditesvous

pas en commun proverbe : des loups ravissants6, des lions furieux, malicieux

comme un singe ? Et vous autres, qui êtes-vous ? J’entends corner sans cesse à mes

10 oreilles : L’homme est un animal raisonnable. Qui vous a passé7 cette définition ? sontce

les loups, les singes, et les lions, ou si8 vous vous l’êtes accordée à vous-mêmes ?

C’est déjà une chose plaisante, que vous donniez aux animaux, vos confrères, ce qu’il y

a de pire, pour prendre pour vous ce qu’il y a de meilleur. Laissez-les un peu se définir

eux-mêmes, et vous verrez comme ils s’oublieront, et comme vous serez traités. Je ne

15 parle point, ô hommes, de vos légèretés, de vos folies et de vos caprices, qui vous

mettent au-dessous de la taupe et de la tortue, qui vont sagement leur petit train, et qui

suivent sans varier l’instinct de leur nature ; mais écoutez-moi un moment. Vous dites

d’un tiercelet de faucon9 qui est fort léger, et qui fait une belle descente sur la perdrix :

« Voilà un bon oiseau » ; et d’un lévrier qui prend un lièvre corps à corps : « C’est un

20 bon lévrier. » Je consens aussi que vous disiez d’un homme qui court le sanglier, qui le

met aux abois, qui l’atteint et qui le perce : « Voilà un brave homme. »10 Mais si vous

voyez deux chiens qui s’aboient, qui s’affrontent, qui se mordent et se déchirent, vous

dites : « Voilà de sots animaux » ; et vous prenez un bâton pour les séparer. Que si l’on

vous disait que tous les chats d’un grand pays se sont assemblés par milliers dans une

25 plaine, et qu’après avoir miaulé tout leur soûl, ils se sont jetés avec fureur les uns sur

les autres, et ont joué ensemble de la dent et de la griffe ; que de cette mêlée il est

demeuré de part et

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