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Léopold Senghor et Aimé Césaire : pour quelle negritude

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Par   •  12 Novembre 2012  •  Commentaire de texte  •  3 363 Mots (14 Pages)  •  2 953 Vues

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CHAPITRE UN:

HISTOIRE ET CONCEPTS

LEOPOLD SENGHOR ET AIME CESAIRE:

POUR QUELLE NEGRITUDE ?

NAJIB REDOUANE

Dans sa récente étude Césaire et Senghor. Un pont sur l’Atlantique,

Lylian Kesteloot rapproche, comme il est indiqué en quatrième couverture

de l’ouvrage,

le destin de deux hommes Léopold Sédard Senghor et Aimé Césaire, les

deux chefs de file du Mouvement de la négritude qui fut à l’origine de la

littérature négro-africaine et qui rappelle une histoire aujourd’hui oubliée:

celle qui mobilisa les intellectuels noirs d’Afrique et d’Amérique entre

1932 et 1960, pour protester contre le racisme, la ségrégation et la

colonisation. Le pont sur l’Atlantique fut alors virtuellement réalisé, reliant

l’Afrique à ses diasporas de l’Autre rive, dans la prise de conscience de

leur destin par les intellectuels noirs de toute provenance.

Nombreux sont les écrits, les études, et les communications de tous bords,

aussi bien de la part de défenseurs que d’adversaires, qui ont été consacrés

à la Négritude dont la parenté est communément attribuée à la troïka que

formaient Aimé Césaire, Léopolod Sédar Senghor et Léon Gontran

Damas. De leur côté, les fondateurs de ce concept eux-mêmes n’ont pas

cessé au fil du temps et des occasions d’enrichir et d’animer le débat,

d’apporter des explications et des éclaircissements sur la raison d’être de

la naissance et de l’essence de leur mouvement politico-littéraire.

On ne peut comprendre l’évolution de la notion de Négritude, qui a

connu, en effet, à la fois l’adhésion, l’acceptation, la contestation, la

dispersion et la transformation, sans retracer la genèse de sa création.

Ainsi, une remontée dans le temps, aussi brève soit-elle, évoquant des

éléments essentiels, voire fondamentaux, tels que le croisement de destins

de jeunes poètes noirs à Paris dans les années 30, la parenté du concept et

le contexte socio-politique et culturel de l’époque, ne peut que nous

permettre de mieux saisir le développement de ce mouvement qui est

devenu l’architecture de l’être noir et l’expression d’une force vitale pour

dire son refus de toute forme d’assimilation culturelle et pour affirmer ses

valeurs africaines.

Najib Redouane 11

Si Stanislas Adotévi dans Négritude et Négrologues a raillé la

rencontre entre Senghor et Césaire, et la naissance de ce sentiment racial1,

il n’en demeure pas moins que pour les fondateurs de ce concept

intellectuel, cette rencontre au hasard du temps s’avère décisive. Pour

Césaire, qui arrive à Paris en 1931, une amitié s’est nouée entre eux dès le

premier contact et qui allait changer le cours de leurs destins respectifs. Il

en retracera les circonstances lorsqu’en 1976 il recevra le président du

Sénégal dans sa mairie de Fort-de-France:

C’était, je m’en souviens, par un jour de l’automne parisien, le décor: la

montante rue Saint-Jacques et l’austère bâtisse du lycée Louis-le-Grand. Je

suis débarqué, il y a à peine quinze jours de mon île natale… un peu perdu,

un peu ahuri dans ce milieu sévère, voire rébarbatif. Et puis, tout à coup, le

monde s’éclaire comme d’un sourire, un jeune homme vient à moi, c’est un

Africain, un Sénégalais… Il me prend par les épaules et, de sa voix d’une

très particulière mélodie, me dit: alors mon frère, d’où viens-tu ?»

(Hommage à Léopold Sédar Senghor). (Sorel 44)

Un autre exilé venu de la Guyane s’ajoute à eux pour former un trio

dynamique, engagé, vivement intellectuel et original par la spécificité et la

singularité de chacun de ses membres. Jacqueline Sorel précise à ce sujet:

Aimé Césaire, natif de Fort-de-France, est arrivé après Senghor sur le sol

français. Il est plus jeune, plus emporté, plus susceptible et il a le goût des

grandes épopées. Léon-Gontran Damas, Guyanais d’origine, est un écorché

vif. Son tempérament le porte à l’agressivité et au combat. A côté, Senghor

fait figure de penseur. (43-44)

Conscients de la domination culturellement «blanche» à l’époque et face à

la politique d’assimilation catégorique, les trois amis qui «possèdent en

commun l’amour de la poésie mais aussi le sentiment diffus de l’existence

d’une culture nègre, philosophent ensemble et échangent leurs idées» (44).

Ils cherchent une manière d’affirmer leur singularité culturelle en lui

restituant sa dimension africaine. Exacerbés par la négation de leur être, ils

puisent

...

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