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L'utilisation des images et de l'imagination dans la poésie de Victor Hugo

Étude de cas : L'utilisation des images et de l'imagination dans la poésie de Victor Hugo. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  9 Novembre 2018  •  Étude de cas  •  5 051 Mots (21 Pages)  •  672 Vues

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        La poésie est, peut-être, le genre littéraire qui se sert le plus de l’imagination pour rendre compte d’une vision du monde et d’un mode de pensée. La relation entre l’image et le sens devient dès lors capitale pour le lecteur qui est, ainsi, appelé à un effort de coopération. De ce point de vue, la poésie de Victor Hugo se caractérise par une prolifération d’images puisées dans le fonds culturel, commun, mais aussi issues de ses propres fantasmes, images qui tentent de créer un univers propre où le lecteur se reconnaîtrait facilement - ambition exprimée dès la préface des Contemplations : «  Ma vie est la vôtre, votre vie est la mienne, vous vivez ce que je vis ; la destinée est une.» La réversibilité du « je » et du « tu » est d’ailleurs évoquée explicitement par le mot « image », dans la même préface : « Ceux qui s’y pencheront retrouveront leur propre image dans cette eau profonde et triste, qui s’est lentement amassée là, au fond d’une âme. ». Mais notre sujet, grâce à la polysémie du mot « image », ouvre la réflexion à un usage beaucoup plus large : l’image en tant que produit de l’imagination. Or, l’abondance d’images dans Les Contemplations nous conduit à nous nous poser la question de leur rôle dans le volume, de leur intégration dans le tissu du discours poétique, de leur participation à la construction de la signification globale du texte.

Problématique : comment l’emploi des images, et donc de l’imagination, contribue-t-il à infléchir la signification Les Contemplations ?

        Dans un premier temps, nous présenterons la fonction symbolique des images employées par VH, la manière dont ces images participent à l’incarnation des idées, des croyances et des certitudes de leur auteur. Ensuite nous étudierons leur fonction herméneutique, la façon dont les images participent à la construction du sens de la poésie hugolienne. Dans un dernier temps, nous examinerons la fonction esthétique, c’est-à-dire leur intégration dans le discours poétique et leur influence sur la poétique du texte.

  1. La fonction symbolique des images ou comment les images incarnent-elles des idées, représentent-elles l’abstrait par le concret ou bien le pouvoir de représentation des images grâce à l’analogie sur laquelle elles reposent.

  1. La réalité des Contemplations est peuplée d’images qui deviennent tout autant de symboles sur le chemin du poète-mage, dans sa quête de la Vérité.

De ce point de vue, les images d’éléments naturels offrent l’exemple le plus fréquemment utilisé par Victor Hugo. Certes, ce n’est pas une nouveauté apportée par le volume des Contemplations, les images naturelles étant présentes dès les débuts de la poésie romantique. Dans Les Méditations poétiques parues en 1820, Lamartine proposait déjà un nouveau rapport du poète à la nature : « le paysage-état d’âme », relation de « miroir » où la nature symbolisait les sentiments du poète, elle participait à ce que Lamartine déclarait, dans sa préface, avoir remplacé « la lyre à sept cordes de convention » par « les fibres même du cœur de l’homme ». Si VH ne fait jamais mention à Lamartine dans Les Contemplations, par contre il revendique comme modèle esthétique Virgile et la tradition latine. Les notations bucoliques et pastorales qui magnifient l’image des éléments naturels saturent la poésie hugolienne en général et celle des Contemplations, en particulier, surtout dans les premiers livres. Le poème « Vere novo »= « au début du printemps » rend hommage à Virgile dès le titre, dérivé d’un vers du maître. La filiation virgilienne est pleinement assumée par VH et exprimée déjà dans la préface du Rhin (1842), volume de lettres : la poésie de Virgile « sort de la nature » disait VH.

Comme le matin rit sur les roses en pleurs !

Oh ! les charmants petits amoureux qu’ont les fleurs !

Ce n’est dans les jasmins, ce n’est dans les pervenches

Qu’un éblouissement de folles ailes blanches

Qui vont, viennent, s’en vont, reviennent, se fermant,

Se rouvrant, dans un vaste et doux frémissement.

=alexandrins qui ouvrent le poème et célèbrent l’amour des éléments naturels pour le mettre tout de suite après en relation avec le monde humain, établissant une analogie d’ordre symbolique :

Ô printemps ! quand on songe à toutes les missives

Qui des amants rêveurs vont aux belles pensives,

À ces cœurs confiés au papier, à ce tas

De lettres que le feutre écrit au taffetas

Mais VH ne se contente pas de reprendre « le paysage –état d’âme » des romantiques, il emploie la métaphore récurrente de la nature-livre qui remplace les textes sacrés sur lesquels se fondent les religions révélées.

Je lisais. Que lisais-je ? Oh ! le vieux livre austère,

Le poëme éternel ! — La Bible ? — Non, la terre. (v. 1-2)

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Oui, la création tout entière, les choses,

Les êtres, les rapports, les éléments, les causes,

Rameaux dont le ciel clair perce le réseau noir,

L’arabesque des bois sur les cuivres du soir,

La bête, le rocher, l’épi d’or, l’aile peinte,

Tout cet ensemble obscur, végétation sainte,

Compose en se croisant ce chiffre énorme : DIEU. (v. III, 8, « Je lisais…. »)

= la communion poète-nature et l’harmonie initiale des romantiques s’est transformée en nature-religion. Dieu devient le moi profond de la Nature : décliner les éléments naturels par une énumération prolongée sur plusieurs où la limite du vers ne coïncide pas avec la fin de la construction syntaxique imprime un souffle épique qui aboutit avec la chute-révélation finale en majuscules : DIEU.

        Si la réalité offre un spectacle naturel magnifié par des images bucoliques et pastorales mais qui symbolise en même temps la conception que VH se fait de la religion, le monde intérieur du poète, lui aussi, est occasion d’un déploiement d’images.

  1. Les images d’abîme, de chaos, de vertiges issues de la contemplation intérieure du poète servent à traduire et à symboliser sa souffrance, le passage des ans, à rendre visible l’intériorité.

Le contemplateur, triste et meurtri, mais serein,

Mesure le problème aux murailles d’airain,

Cherche à distinguer l’aube à travers les prodiges,

Se penche, frémissant, au puits des grands vertiges,

Suit de l’œil des blancheurs qui passent, alcyons,

Et regarde, pensif, s’étoiler de rayons,

...

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