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L'Horloge, les Fleurs du mal - Baudelaire

Commentaire de texte : L'Horloge, les Fleurs du mal - Baudelaire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  14 Décembre 2016  •  Commentaire de texte  •  3 628 Mots (15 Pages)  •  2 170 Vues

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Charles Baudelaire, « L’Horloge », Les Fleurs du mal (section « Speen et Idéal »)

Introduction :

      (captatio) Le temps, élément indissociable de la vie, occupe une place privilégiée dans la poésie à travers les siècles. Les poètes regrettent avec émotion de le voir s’enfuir, ou dénoncent avec lucidité son pouvoir destructeur. Tous en ont une conscience aigüe, souvent douloureuse, source d’inspiration qui varie et se renouvelle selon les époques. (présentation du texte) « L’Horloge », dernier poème de la section « Spleen et Idéal », clôt la longue série de poèmes consacrés au temps[1]. Il marque l’aboutissement d’un parcours qui sanctionne l’échec de l’idéal et la victoire du spleen. « L’Horloge » reflète enfin l’état moral de Baudelaire en 1861 : ce dernier, désespéré, ne voit d’issue que dans la mort et pense à se suicider. (caractérisation du texte : forme, structure, thèmes) Le poème est composé de six quatrains d’alexandrins rythmés très régulièrement, aux rimes embrassées, ces vingt-quatre vers correspondant aux vingt-quatre heures d’une journée, le poème fonctionnant donc comme une mécanique d’horloge. Comme une vanité[2] picturale, le poème de Baudelaire se présente sous la forme d'une allégorie, d'une métaphore, d'un discours à deux visages, à deux sens. L'Horloge (on notera la majuscule) personnalise évidemment le temps qui passe. (éléments de problématisation) Il de s’agira donc de mettre en évidence l’effet à la fois invocatoire et incantatoire du poème dans lequel le temps est en fait un symbole du drame dont l’homme est le théâtre. (annonce du plan) Dans cette perspective, nous montrerons tout d’abord que ce poème propose une présentation dramatique du temps. Nous soulignerons ensuite la dimension tragique du combat entre l’homme et le temps en insistant  la portée philosophique du poème « L’Horloge ».

  1. Une présentation dramatique du temps

  1. Dramatisation par la présence obsessionnelle de la fuite du temps
  1. Le réseau lexical du temps

      On remarque que l’essentiel du vocabulaire est axé sur le temps. Dès le premier vers, on le trouve présenté par un symbole évident : l’horloge. Il est ensuite fait allusion aux différentes unités de temps, l’ « instant » (v.7), « La Seconde » (v.9), « Les minutes » (v.15) ; puis « Le jour » et « la nuit » (v.19) ; et enfin la « saison » (v.8).

      On note aussi la fréquence des adverbes de temps, certains exprimant l’imminence du moment fatal comme aux vers 3 et 4,  « Les vibrantes Douleurs… / Se planteront bientôt comme dans une cible », ou au vers 21, «  Tantôt sonnera l’heure » (l’adverbe « tantôt » a ici le sens de « bientôt »). D’autres adverbes marquent la fin d’un sursis comme au vers 24, « …il est trop tard ! » et certains, enfin, enregistrent la confrontation entre hier et aujourd’hui, « …Maintenant dit : je suis Autrefois » (v.11). « Autrefois », en renvoyant à un passé déjà lointain, souligne la fugacité de l’instant présent.

  1. La lutte de l’homme contre le temps

      Le temps est puissant comme un dieu, le poème évoque un « dieu sinistre » au vers 1. L’horloge  pourrait être une représentation du dieu grec Chronos, dieu du temps qui, dans la tradition orphique, était figuré comme un serpent à trois têtes, l'une d'homme, l'autre de lion et la troisième de taureau. Cette triade pourrait expliquer les trois adjectifs : «sinistre», «effrayant», «impassible». «Sinistre» peut avoir ici ses deux sens : «ce qui dit l’avenir» et «ce qui fait craindre un malheur», «qui conduit à la mort». Le dieu est encore «effrayant», et d'autant plus qu'il est «impassible», c'est-à-dire incapable d'éprouver la douleur ou le plaisir, de faire preuve de compassion. Le hiatus «effrayant, impassible», qui n'est pas fortuit, qu’il eût été facile d'éviter en utilisant le mot «effroyable» qui a la même racine qu’«effrayant» et un sens plus fort, accentue encore cette impression pénible. Le caractère ternaire se vérifie encore par le rythme 3 / 3 / 3 / 3 du vers, qui n'a ici rien de dansant : il rend le tic-tac de l'horloge, le balancement du pendule, le martèlement régulier des secondes.

Les attributs de la puissance du dieu sont « le doigt » qui menace (v.2) et « la loi » (v.18). Ce doigt peut correspondre au doigt du Dieu de l’Ancien Testament (qui ne cesse de se dresser devant chacun de nous, pour nous persécuter) mais aussi, plus simplement, à l’aiguille de l’horloge ou au gnomon[3] du cadran solaire.

        L’écoulement du temps est marqué du sceau de la fatalité, l’adjectif « sinistre » du vers 1 annonce un funeste présage et l’échéance est déjà fixée comme le souligne le début du vers 21, «Tantôt sonnera l’heure », la diminution du sursis résonne comme un glas, « Souviens-toi » (v.17). Le dénouement inattendu intervient au dernier vers, « Meurs (…) il est trop tard! ».

      La progression du temps est inexorable, elle obéit à une loi mathématique fixée une fois pour toutes, « Trois mille six cent fois par heure, la Seconde / Chuchote » (v.9-10).

      L’ «insecte » du vers 11, synonyme d’activité sans relâche, traduit cette avancée constante du temps. Le temps est toujours vainqueur, comme le souligne le vers 18, le temps « gagne (…) à tout coup ».

      L’accélération du temps provoque enfin un effet de dramatisation. Il s’exprime d’une manière précipitée, « Rapide avec sa voix / D’insecte » (V.10-11); le leitmotiv « Souviens-toi » revient de plus en plus souvent.

  1. Dramatisation par les personnifications

      La personnification assimile des notions abstraites à des êtres humains, comme le montre d’ailleurs la présence de la majuscule au début de certains noms communs. Elle possède une double fonction : elle donne vie aux abstractions et parvient ainsi à rendre l’idée d’un conflit dramatique entre deux ennemis irréconciliables : l’homme et le temps.

  1. La personnification  du « Plaisir »

      Au vers 6, le «Plaisir» est comparé à «une sylphide»[4], c’est-à-dire, le terme venant du latin «sylphus» qui signifie «génie», une créature imaginaire issue des mythologies gauloise, celte et germanique, décrite comme un esprit élémentaire de l'air par Paracelse[5], se situant à mi-chemin entre l’ange et l’elfe, considérée comme un symbole de beauté, de subtilité et d'aspiration spirituelle. Elle est ainsi le symbole de l’être humain qui ne tient qu’un court rôle dans cette immense pièce de théâtre qu’est la vie de l’humanité.

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