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Ionesco - Rhinocéros, étude

Dissertation : Ionesco - Rhinocéros, étude. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  13 Juin 2012  •  5 067 Mots (21 Pages)  •  2 547 Vues

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Pièce ambitieuse "en trois actes et quatre tableaux", Rhinocéros est créée en 1959 à Düsseldorf. À Paris, l'année suivante, Jean-Louis Barrault assure sa consécration. Cette pièce traite du totalitarisme, de l'endoctrinement et de la fanatisation qui agissent souvent comme une véritable épidémie. Pour rendre sensible ce phénomène, Ionesco en propose une illustration concrète : les petits fonctionnaires d'une ville imaginaire se métamorphosent les uns après les autres en rhinocéros. Protégés par leur carapace et armés de leur corne, ils détruisent systématiquement tout ce qui ne leur ressemble pas. Seul un marginal alcoolique, Bérenger, fait figure de conscience isolée qui résiste à cette contamination. Aux yeux du dramaturge, il représente la " conscience universelle " dans son isolement et sa douleur.

" Donc, logiquement, mon chien serait un chat "

Sur une place, dans une petite ville de province, deux amis, Jean et Bérenger, ont rendez-vous. Le premier reproche à l'autre son " triste état " physique et moral. II tente de le ramener sur le chemin du devoir et de la dignité. Entre-temps, " le Vieux Monsieur " et " le Logicien " sont venus s'asseoir près d'eux pour discuter du " syllogisme ", puis sont sortis... Le passage d'un rhinocéros interrompt ensuite la conversation des deux amis et provoque la stupeur générale. L'incident est clos. Jean reproche de nouveau à Bérenger son ivrognerie.

BÉRENGER.

Je n'aime pas tellement l'alcool. Et pourtant si je ne bois pas, ça ne va pas. C'est comme si j'avais peur, alors je bois pour ne plus avoir peur.

JEAN.

Peur de quoi ?

BÉRENGER.

Je ne sais pas trop Des angoisses difficiles à définir le me sens mai à l'aise dans l'existence, parmi les gens, alors je prends un verre. Cela me calme, cela me détend, j'oublie.

JEAN.

Vous vous oubliez !

BÉRENGER.

Je suis fatigué, depuis des années fatigué J'ai du mal à porter le poids de mon propre corps…

JEAN.

C'est de la neurasthénie alcoolique, la mélancolie du buveur de vin...

BÉRENGER, continuant.

Je sens à chaque instant mon corps, comme s'il était de plomb, ou comme si je portais un autre homme sur mon dos je ne me suis pas habitué à moi-même. Je ne sais pas si je suis moi. Dès que je bois un peu, le fardeau disparaît, et je me reconnais, je deviens moi.

JEAN.

Des élucubrations ! Bérenger, regardez-moi. Je pèse plus que vous. Pourtant, je me sens léger, léger, léger (II bouge ses bras comme s'il allait s'envoler. Le Vieux Monsieur et le Logicien qui sont de nouveau entrés sur le plateau ont fait quelques pas sur la scène en devisant. Juste à ce moment, ils passent à côté de jean et de Bérenger. Un bras de jean heurte très fort le Vieux Monsieur qui bascule dans les bras du Logicien.)

LE LOGICIEN, continuant la discussion.

Un exemple de syllogisme . (Il est heurté.) Oh !...

LE VIEUX MONSIEUR, à Jean.

Attention. (Au Logicien.) Pardon.

JEAN, au Vieux Monsieur.

Pardon

LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur.

Il n'y a pas de mal.

LE VIEUX MONSIEUR, à Jean.

Il n'y a pas de mal.

(Le Vieux Monsieur et le Logicien vont s'asseoir à l'une des tables de la terrasse, un peu à droite et derrière Jean et Bérenger )

BÉRENGER, à Jean.

Vous avez de la force.

JEAN.

Oui, j'ai de la force, j'ai de la force pour plusieurs raisons. D'abord, j'ai de la force parce que j'ai de la force, ensuite j'ai de la force parce que j'ai de la force morale. J'ai aussi de la force parce que je suis pas alcoolisé. Je ne veux pas vous vexer, mon cher ami, mais je dois vous dire que c'est l'alcool qui pèse en réalité.

LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur.

Voici donc un syllogisme exemplaire Le chat a quatre pattes. Isidore et Fricot ont chacun quatre pattes Donc Isidore et Fricot sont chats.

LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien.

Mon chien aussi a quatre pattes.

LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur.

Alors, c'est un chat.

BÉRENGER, à Jean.

Moi, j'ai à peine la force de vivre. Je n'en ai plus envie peut-être.

LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien après avoir longuement réfléchi.

Donc, logiquement, mon chien serait un chat.

LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur.

Logiquement, oui. Mais le contraire est aussi vrai.

BÉRENGER, à Jean.

La solitude me pèse. La société aussi.

JEAN, à Bérenger.

Vous vous contredisez. Est-ce la solitude qui pèse, ou est-ce la multitude ? Vous vous prenez pour un penseur et vous n'avez aucune logique.

LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien.

C'est très

...

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