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« Femmes à la Renaissance, femmes de la Renaissance »

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Par   •  27 Février 2013  •  3 768 Mots (16 Pages)  •  1 865 Vues

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Val 26/04/2011

Romain

M1 Recherche

Images de femmes dans les Nouvelles récréations et joyeux devis

de Bonaventure des Périers

Travail présenté en vue du séminaire

« Femmes à la Renaissance, femmes de la Renaissance »

Mme MAGNIEN

Université Michel de Montaigne, Bordeaux

Entre le conte de fées et le conte populaire, Bonaventure des Périers, auteur présumé des Nouvelles récréations et joyeux devis, a choisi. Puisqu’il s’agit de faire rire, rien de tel que le conte populaire, qui livre au lecteur des univers domestiques qu’il connaît bien, et lui offre la possibilité d’introduire des décalages dans le monde qui forme son quotidien : voilà l’essence du comique. Les murs des maisons, des églises, des ateliers et des couvents deviennent transparents, et ce sont des avatars de lui-même et se son entourage que le lecteur voit évoluer, et dont il rit. De ce point de vue, le conte populaire se doit de faire la part belle à la femme, mais à une femme dépouillée de tous les codes du roman courtois. La femme, chez des Périers, est sournoise ou naïve, souvent adultère, parfois vulgaire, quelquefois sage ; elle est celle que l’on peut croiser dans la rue. Nous sommes donc amenés à penser que la fonction du conte est de faire rire en reflétant la société. Quelle place attribuer alors à l’auteur ? N’est-il qu’un simple rapporteur ? Ou bien est-on autorisé à travailler sur une vision du monde dans les Nouvelles récréations ? Il conviendra donc d’examiner dans quelle mesure les images de femmes de ce recueil peuvent être interprétées comme le signe d’une société inégalitaire, qui leur fait injustice. C’est une question hardie qui met en jeu le problème critique essentiel lorsqu’il s’agit de des Périers : on ne sait pas qui est réellement l’auteur de ces nouvelles. Sur une question telle que celle de l’intention, la subjectivité est inévitable. Nous essaierons de faire en sorte qu’elle puisse, en toute honnêteté, se justifier elle-même.

Présence(s) de femmes

Le premier élément qu’il peut paraître intéressant d’étudier, en même temps que celui qui saute aux yeux, est celui de la présence quantitative des femmes dans les nouvelles de ce recueil. Elle est relativement peu importante si on la considère en simples termes de proportion : sur quatre-vingt-dix nouvelles, seulement quarante-et-une comportent des personnages féminins. Cela ne reflète guère la composition de la société, à part quasi-égale entre hommes et femmes, d’autant plus que le personnage principal des nouvelles est, dans l’immense majorité des cas, un homme. Il suffit pour s’en apercevoir, à titre symptomatique, d’observer une liste des titres des nouvelles. Les femmes apparaissent dans vingt-sept d’entre eux, mais elles ne sont désignées comme personnage principal qu’à sept reprises (nouvelles 5, 31, 42, 43, 54, 57, 86). Cependant, le recueil est très marqué par la présence féminine car les femmes apparaissent toujours comme représentatives de leur sexe, et non dans la neutralité sexuelle, et donc identitaire, qui caractérise la plupart des hommes des Nouvelles récréations. Le personnage masculin est une toile vierge sur laquelle l’auteur peut fixer tous les caractères ; le personnage de la femme dénote toujours son sexe et les clichés qui l’accompagnent, ce qui n’est pas le cas dans toutes les œuvres de cette époque.

Le problème majeur de l’étude des Nouvelles récréations et joyeux devis provient de l’auteur lui-même. Il n’est pas identifié avec certitude, et la vie de celui-là même à qui elles sont attribuées d’ordinaire est assez mal connue. Bonaventure des Périers était secrétaire de Marguerite de Navarre. Il est donc nécessaire d’avoir à l’esprit les écrits de cette dernière pour lire ces nouvelles, plus encore que le contexte ne le réclame déjà par la seule célébrité des textes de la femme de lettres, à commencer par l’Heptaméron. Sans entrer dans la polémique qui entoure la date d’élaboration de cette œuvre, nous pouvons supposer sans prendre trop de risques que des Périers a probablement eu connaissance, tout au moins, du projet de sa maîtresse, et sans doute en a-t-il connu le texte en détail. Par le biais de Marguerite de Navarre, c’est tout un héritage qui échoit à des Périers : traditions des contes et fabliaux médiévaux, italiens et français, oraux et populaires, mise en recueil… Toutefois, la comparaison avec l’Heptaméron met rapidement en relief une différence fondamentale qui éclaire la question des femmes chez des Périers sous un autre jour. L’absence de cadre narratif, qui donne son unité à l’ensemble des nouvelles, comme l’assemblée de nobles gens bloqués par une crue chez Marguerite de Navarre, empêche chez des Périers l’émergence de caractères féminins transversaux. Il n’y a donc pas dans les Nouvelles récréations de figures féminines aussi soigneusement élaborées, aussi psychologiquement déterminées, que les narratrices de l’Heptaméron telles que Parlamente, Longarine ou Oisille. Pas non plus de manifestation d’une volonté de parité aussi éclatante que celle de Marguerite de Navarre, qui emploie cinq narratrices et cinq narrateurs, rompant par là avec Boccace, son modèle, qui fait paraître dans le Décaméron sept femmes et trois hommes. De fait, les figures féminines chez des Périers sont des types, des rôles, proprement des personnages de fabliaux, ce qui n’empêche pas une certaine profondeur psychologique, mais tend à ramener la femme dans les caractéristiques de son type pour produire un effet comique.

Contrairement à l’Heptaméron, les Nouvelles récréations ouvrent la palette des personnages à toutes les couches de la société ; peut-être même peut-on dire que le milieu favori des histoires de Marguerite de Navarre, c’est-à-dire la très haute aristocratie, est celui qui est le moins représenté par des Périers. Il peint beaucoup plus volontiers les classes laborieuses : la femme est donc souvent épouse d’artisan, de paysan, de marchand, de bourgeois, ou encore chambrière d’avocat, de savant, de curé. Elle est donc doublement définie par sa condition d’épouse ou de servante, et

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