LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Honoré de Balzac,Le Père Goriot-1835

Commentaire d'arrêt : Honoré de Balzac,Le Père Goriot-1835. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  18 Octobre 2014  •  Commentaire d'arrêt  •  2 234 Mots (9 Pages)  •  933 Vues

Page 1 sur 9

Textes :

Texte A : Honoré de Balzac,Le Père Goriot, 1835.

Texte B : Emile Zola,Germinal, 1885.

Texte C : Guy de Maupassant,Bel Ami, 1885.

Texte D - Victor Hugo,Quatrevingt-treize, 1874.

Texte A : Honoré de Balzac,Le Père Goriot, 1835.

[Sous la Restauration, durant le règne de Louis XVIII, en 1819, la duchesse de Langeais, aristocrate de haut rang du faubourg Saint-Germain, raconte à son amie madame de Beauséant, le parcours d'un certain M. Goriot dont elle déforme systématiquement le nom.]

— Oui, ce Moriot a été président de sa section1pendant la Révolution ; il a été dans le secret de la fameuse disette, et a commencé sa fortune par vendre dans ce temps-là des farines dix fois plus qu'elles ne lui coûtaient. Il en a eu tant qu'il en a voulu. L'intendant de ma grand-mère lui en a vendu pour des sommes immenses. Ce Goriot partageait sans doute, comme tous ces gens-là, avec le Comité de Salut Public. Je me souviens que l'intendant disait à ma grand-mère qu'elle pouvait rester en toute sûreté à Grandvilliers, parce que ses blés étaient une excellente carte civique. Eh bien ! ce Loriot, qui vendait du blé aux coupeurs de têtes, n'a eu qu'une passion. Il adore, dit-on, ses filles. Il a juché l'aînée dans la maison de Restaud2, et greffé l'autre sur le baron de Nucingen3, un riche banquier qui fait le royaliste. Vous comprenez bien que, sous l'Empire4, les deux gendres ne se sont pas trop formalisés d'avoir ce vieux Quatre-vingt-treize5chez eux ; ça pouvait encore aller avec Buonaparte6. Mais quand les Bourbons sont revenus, le bonhomme a gêné monsieur de Restaud, et plus encore le banquier. Les filles, qui aimaient peut-être toujours leur père, ont voulu ménager la chèvre et le chou, le père et le mari ; elles ont reçu le Goriot quand elles n'avaient personne ; elles ont imaginé des prétextes de tendresse. « Papa, venez, nous serons mieux, parce que nous serons seuls ! » etc. Moi, ma chère, je crois que les sentiments vrais ont des yeux et une intelligence : le cœur de ce pauvre Quatre-vingt-treize a donc saigné. Il a vu que ses filles avaient honte de lui ; que, si elles aimaient leurs maris, il nuisait à ses gendres. Il fallait donc se sacrifier. Il s'est sacrifié parce qu'il était père : il s'est banni de lui-même. En voyant ses filles contentes, il comprit qu'il avait bien fait. Le père et les enfants ont étés complices de ce petit crime. Nous voyons cela partout. Ce père Doriot n'aurait-il pas été une tache de cambouis dans le salon de ses filles ? Il y aurait été gêné, il se serait ennuyé. Ce qui arrive à ce père peut arriver à la plus jolie femme avec l'homme qu'elle aimera le mieux : si elle l'ennuie de son amour, il s'en va, il fait des lâchetés pour la fuir. Tous les sentiments en sont là. Notre cœur est un trésor, videz-le d'un coup, vous êtes ruinés. Nous ne pardonnons pas plus à un sentiment de s'être montré tout entier qu'à un homme de ne pas avoir un sou à lui. Ce père avait tout donné. Il avait donné pendant vingt ans, ses entrailles, son amour ; il avait donné sa fortune en un jour. Le citron bien pressé, ses filles ont laissé le zeste au coin des rues.

1 - section : il était à la tête d'une des circonscriptions administratives de Paris sous la Révolution.

2 - Maison de Restaud : nom de la famille de l'époux de la fille aînée du Père Goriot.

3 - baron de Nucingen : l'époux de la seconde fille du Père Goriot.

4 - Empire : le premier Empire (1804-1815).

5 - ce vieux Quatre-vingt-treize : appellation péjorative d'un révolutionnaire durant la Terreur de 1793.

6 - Buonaparte : Napoléon Bonaparte, devenu Napoléon 1er en 1804.

Texte B : Emile Zola,Germinal, 1885.

[Maheu est un mineur. Nous assistons en ce début de roman à son travail pénible au fond de la mine.]

C'était Maheu qui souffrait le plus. En haut, la température montait jusqu'à trente-cinq degrés, l'air ne circulait pas, l'étouffement à la longue devenait mortel. Il avait dû, pour voir clair, fixer sa lampe à un clou, près de sa tête ; et cette lampe, qui chauffait son crâne, achevait de lui brûler le sang.

Mais son supplice s'aggravait surtout de l'humidité. La roche, au-dessus de lui, à quelques centimètres de son visage, ruisselait d'eau, de grosses gouttes continues et rapides, tombant sur une sorte de rythme entêté, toujours à la même place. Il avait beau tordre le cou, renverser la nuque : elles battaient sa face, s'écrasaient, claquaient sans relâche. Au bout d'un quart d'heure, il était trempé, couvert de sueur lui-même, fumant d'une chaude buée de lessive. Ce matin-là, une goutte, s'acharnant dans son œil, le faisait jurer. Il ne voulait pas lâcher son havage1, il donnait de grands coups, qui le secouaient violemment entre les deux roches, ainsi qu'un puceron pris entre deux feuillets d'un livre, sous la menace d'un aplatissement complet. Pas une parole n'était échangée. Ils tapaient tous, on n'entendait que ces coups irréguliers, voilés et comme lointains. Les bruits prenaient une sonorité rauque, sans un écho dans l'air mort. Et il semblait que les ténèbres fussent d'un noir inconnu, épaissi par les poussières volantes du charbon, alourdi par des gaz qui pesaient sur les yeux. Les mèches des lampes, sous leurs chapeaux de toile métallique, n'y mettaient que des points rougeâtres. On ne distinguait rien, la taille2s'ouvrait, montait ainsi qu'une large cheminée, plate et oblique, où la suie de dix hivers aurait amassé une nuit profonde. Des formes spectrales s'y agitaient, les lueurs perdues laissaient entrevoir une rondeur de hanche, un bras noueux, une tête violente, barbouillée comme pour un crime.

Parfois, en se détachant, luisaient des blocs de houille3, des pans et des arêtes, brusquement allumés d'un reflet de cristal.

Puis, tout retombait au noir, les rivelaines4tapaient à grands coups sourds, il n'y avait plus que le halètement des poitrines, le grognement de gêne et de fatigue, sous la pesanteur

...

Télécharger au format  txt (13 Kb)   pdf (133.6 Kb)   docx (14.3 Kb)  
Voir 8 pages de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com