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Explication du texte littéraire: un exercice de revitalisation

Commentaire d'oeuvre : Explication du texte littéraire: un exercice de revitalisation. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  10 Octobre 2014  •  Commentaire d'oeuvre  •  3 274 Mots (14 Pages)  •  782 Vues

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L’explication de texte littéraire : un exercice à revivifier

Intervention au séminaire national sur les nouveaux programmes de lycée (IA-IPR de Lettres /

Professeurs formateurs), les 16 et 17 mars 2011.

Pour une discipline, la parution de nouveaux programmes, les infléchissements et objectifs

rénovés qu’ils proposent, sont une occasion précieuse de réfléchir aux exercices canoniques qui sont

en usage dans les classes. Chacun s’accorde à reconnaître que ce bel exercice de l’explication

littéraire, tel qu’il se pratique aujourd’hui dans beaucoup de cours de lettres, est, sinon à refonder, du

moins à rénover. C’est Valère Novarina, le grand promoteur de la Parole vive au théâtre, qui a sans

doute porté l’estocade la plus fatale mais aussi la plus salutaire. Lisons-le une fois encore, pour

prendre la mesure d’un problème connu de beaucoup mais surtout pour nous efforcer de travailler à

rendre caduque l’actualité de ce texte et d’en faire bientôt, au plus vite, un document daté, un mauvais

souvenir largement dépassé :

« La scène la plus comique du Malade imaginaire est celle où le jeune Thomas Diafoirus, pour la charmer, propose à sa

fiancée une séance de dissection : ainsi procèdent les manuels scolaires qui présentent un fragment d’oeuvre recouvert d’un

compliqué appareillage : notes, notules, astérisques, encadrés, flèches pointillées, renvois, rubriques, sous-notules. Un

morceau de littérature s’offre à nous comme le boeuf en effigie chez le boucher : gîte à la noix, macreuse, tendron, contre-filet,

second talon, bavette, flanchet, échine et jambonneau…Un morceau de texte est là comme un cadavre sur la page, ouvert et

prêt à être décortiqué…Juste à côté, la panoplie de scalpels : adjuvants séquentiels, dislocuteur-sujet, morphème vectorisant,

charmeur sensoriel, moteur de temporalisation, levier métaphorique, pinces carnatives, transvaseur potentiel, locutant,

brumisateur spatiotemporel, prélocuteur second, écarteur de doute, phonorisateur de e muet, vecteur de métachronie, agent

discursif, désagisseur vocalisant, excitant du circuit oeil-corde vocale dans la lecture subvocalisée, mobilisateur oculaire du

nominateur par défaut, dénominateur causal, agent chronotrope.

205. Devant le cadavre – la page arrachée au livre et que l’on épingle, devenue un objet étale et fléché- livré aux

Sciences de la Communication, élèves et professeurs deviennent médecins légistes. Tout le monde est rassemblé et les

instruments sont prêts pour que s’ouvre une leçon de Littérature légale.

206. Seul le cadavre sera atteint…L’utilité d’une dissection est surtout de nous enseigner comme la vie nous échappe :

l’esprit du texte ne peut être touché par le scalpel…L’esprit du texte, c’est le souffle donné par toi, lecteur : l’action de ton

haleine qui soulève les mots, trouve le mouvement, l’émotion, rassemble les pages, les nage, redonne vie aux lettres mortes et

fait du livre un seul corps dansant. L’esprit du texte, son souffle, est une réalité matérielle invisible et très concrète, qui restera à

jamais hors d’atteinte des flèches pédagogiques. (…)

212. En ces temps de communication galopante, c’est à dessein que les manuels coupent le souffle. Otent l’esprit. Ils

veulent faire de chacun d’entre nous des écouteurs de signaux, des obéisseurs dociles, des exécuteurs à deux temps, des

parleurs monosyllabiques. De parfaits sujets dressés à acheter, rire et pleurer, s’indigner, s’enthousiasmer tous ensemble – où

il faut, quand il faut ; ils nous ôtent le souffle pour tenter de nous assujettir aux formules, slogans – et que nous devenions des

animaux bien dressés à exécuter, à brandir des mots creux : abrégés, comprimés, décharnés, compactés, formatés et vite dits,

des « mots surgelés » - et que nous devenions des télégraphes à saisir au plus vite et à instantanément transmettre les signaux

reçus ! C’est très-très sciemment que la chair très obscure et très impure du langage : son ombre, son sous-sol, sa mémoire,

ses méandres, son esprit spiral, ses volutes, sont partout interdits – et de partout chassés –, et qu’il faut désormais parler clair

en langue aseptique – et écrire en déjà traduit.

213. Au lieu qu’il faudrait descendre de plus en plus dans le langage, dans son corps profond, dans son labyrinthe, dans

sa caverne incandescente, dans son drame. Parce que, dans l’intériorité du langage,- dans la profondeur de son corps, dans

son passage

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