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Etude d'un livre-pamphlet - Allah N'est Pas Obligé (introduction).

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Par   •  30 Octobre 2013  •  2 338 Mots (10 Pages)  •  3 880 Vues

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L’auteur relate dans son livre-pamphlet exceptionnellement crue et réaliste le drame déplorable des guerres civiles et religieuses de l’Afrique de l’Ouest à travers le récit accablant d’un enfant-soldat, orphelin, d’une douzaine d’années qui gagne son pain avec sa kalachnikov pour survivre. Ce que Kourouma qui n’hésite pas à dévoiler les noms des dictateurs et dirigeants politiques responsables de ces crimes contre l’humanité condamne surtout, c’est l’utilisation des enfants innocents dans ces conflits meurtriers poussés à commettre les crimes les plus affreux.

Le protagoniste et narrateur du roman Allah n'est pas obligé d’Ahmadou Kourouma, Birahima, déclare que « L’enfant-soldat est le personnage le plus célèbre de cette fin du XXe siècle ». C’est pour cette raison qu’il a décidé de « raconter sa vie de merde » afin de dévoiler au monde l’enfer que ces enfants vivent quotidiennement. Allah n’est pas obligé est un réquisitoire contre l’exploitation des enfants orphelins à des fins de guerres fratricides en Sierra Léone et au Libéria. C’est un appel au secours qui doit nous faire réfléchir sur le sort des centaines de milliers d’enfants-soldats à travers le monde qui sont enrôlés à l’heure actuelle dans des guerres ethniques et religieuses des républiques corrompues et foutues » par des rebelles assoiffés de pouvoir politique pour servir d’éclaireurs, d’espions, de messagers, de garde du corps, de poseurs de mines, de boucliers humains et de tueurs.

I - 4e de couverture

« Je m'appelle Ibrahima. J'aurais pu être un sale gosse comme les autres (dix ou douze ans, selon les sources), ni meilleur ni pire, si j'étais né ailleurs que dans un foutu pays d'Afrique. Mais mon père est mort. Et ma mère, qui marchait sur les fesses, elle est morte aussi. Alors je suis parti à la recherche de ma tante Mahan, ma tutrice. C'est Yacouba qui m'accompagne. Yacouba, le féticheur, le multiplicateur de billets, le bandit boiteux. Comme on n'a pas de chance, on doit chercher partout, dans le Liberia et la Sierra Leone de la guerre tribale. Comme on n'a pas de sous, on doit s'embaucher, Yacouba comme grigriman et moi comme enfant-soldat. De camp retranché en ville investie, de bande en bande de bandits de grand chemin, j'ai tué pas mal de gens avec mon kalachnikov. C'est facile. On appuie et ça fait tralala. Je ne sais pas si je me suis amusé. Je sais que j'ai eu beaucoup mal. Mais Allah n'est pas obligé d'être juste avec toutes les choses qu'il a créées ici-bas. »

Ahmadou Kourouma (1927 - 2003) - Allah n'est pas obligé, Editions du Seuil, août 2000, 4e de couverture, Prix Renaudot et Goncourt des lycéens 2000.

II - Portrait de Birahima, l’enfant-soldat

« Je décide le titre définitif et complet de mon blablabla est Allah n'est pas obligé d'être juste dans toutes ses choses ici-bas. Voilà. Je commence à conter mes salades.

Et d'abord... et un... M'appelle Birahima. Suis p'tit nègre. Pas parce que suis black et gosse. Non! Mais suis p'tit nègre parce que je parle mal le français. C'é comme ça. Même si on est grand, même vieux, même arabe, chinois, blanc, russe, même américain; si on parle mal le français, on dit on parle p'tit nègre, on est p'tit nègre quand même. Ça, c'est la loi du français de tous les jours qui veut ça.

... Et deux... Mon école n'est pas arrivée très loin; j'ai coupé cours élémentaire deux. J'ai quitté le banc parce que tout le monde a dit que l'école ne vaut plus rien, même pas le pet d'une vieille grand-mère. (C'est comme ça on dit en nègre noir africain indigène quand une chose ne vaut rien. On dit que ça vaut pas le pet d'une vieille grand-mère parce que le pet de la grand-mère foutue et malingre ne fait pas de bruit et ne sent pas très, très mauvais.) L'école ne vaut pas le pet de la grand-mère parce que, même avec la licence de l'université, on n'est pas fichu d'être infirmier ou instituteur dans une des républiques bananières corrompues de l'Afrique francophone. (République bananière signifie apparemment démocratique, en fait régie par des intérêts privés, la corruption.) Mais fréquenter jusqu'à cours élémentaire deux n'est pas forcément autonome et mirifique. On connaît un peu, mais pas assez; on ressemble à ce que les nègres noirs africains indigènes appellent une galette aux deux faces braisées. On n'est plus villageois, sauvages comme les autres noirs nègres africains indigènes: on entend et comprend les noirs civilisés et les toubabs sauf les Anglais comme les Américains noirs du Liberia. Mais on ignore géographie, grammaire, conjugaisons, divisions et rédaction; on n'est pas fichu de gagner l'argent facilement comme agent de l'Etat dans une république foutue et corrompue comme en Guinée, en Côte-d'Ivoire, etc., etc.»

… Et trois… suis insolent, incorrect comme barbe d’un bouc et parle comme un salopard. Je dis pas comme les nègres noirs africains indigènes bien cravatés : merde ! putain ! salaud ! J’emplie les mots malinkés comme faforo ! (Faforo ! signifie sexe de mon père ou du père ou de ton père.) (…) Les Malinkés, c’est ma race à moi. C’est la sorte de nègres noirs africains indigènes qui sont nombreux au nord de la Côte-d’Ivoire, en guinée et dans d’autres républiques bananières et foutues comme Gambie, Sierra Leone et Sénégal là-bas, etc.

… Et quatre… je veux bien m’excuser de vous parler vis-à-vis comme ça. Parce que je ne suis qu’un enfant. Suis dix ou douze (il y a deux ans grand-mère disait huit et maman dix) et je parle beaucoup. Un enfant poli écoute, ne garde pas la palabre… (…) Mais moi depuis longtemps je m’en fous des coutumes du village, entendu que j’ai été au Liberia, que j’ai tué beaucoup de gens avec kalachnikov (ou kalach) et me suis bien camé avec kanif et les autres drogues dures.

… Et cinq… Pour raconter ma vie de merde, de bordel de vie dans un parler approximatif, un français passable, pour ne pas mélanger les pédales dans les gros mots, je possède quatre dictionnaires. Primo le dictionnaire Larousse et le Petit Robert, secundo l’Inventaire des particularités lexicales du français en Afrique noire et tertio le dictionnaire Harrap’s. Ces dictionnaires me servent à chercher les gros mots, à vérifier les gros mots et surtout à les expliquer. Il faut expliquer parce que mon blablabla est à lire par toute sorte de gens : des toubabs (toubab signifie blanc) colons,

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