Dissertation sur le poème Le Dormeur Du Val de Rimbaud

Rimbaud est un poète de la seconde moitié du XIXe siècle qui refuse la réalité telle qu’elle se présente et qui veut suggérer des images au lecteur plutôt que de les décrire, descriptions qui étaient davantage l’apanage du courant réaliste. Rimbaud se perçoit comme un « voyant », un élu qui entrevoit les mystères du monde et qui peut ainsi mieux les traduire aux lecteurs. Le désir de suggérer au lieu de décrire ainsi que la certitude d’être un élu ne sont pas propres qu’à Rimbaud, mais à la plupart des poètes symbolistes. Un des poèmes les plus lus de Rimbaud, Le Dormeur du val, s’inscrit bien dans le courant du symbolisme. Cette affirmation sera d’abord prouvée par la présence de symboles et ensuite par la musicalité se trouvant dans ce poème.

Le Dormeur du val peut d’abord être associé au courant du symbolisme par le fait qu’il suggère plusieurs correspondances, c’est-à-dire des symboles, au lecteur. Il détient notamment des correspondances horizontales, qui établissent un rapprochement entre deux choses qu’il est possible de voir ou de sentir. Rimbaud semble privilégier celles qui mettent en scène les sens, comme dans la première strophe exposant l’environnement du drame où « la lumière pleut ». Le poète effectue alors une synesthésie en rapprochant deux sens : la vue - sollicitée par la « lumière » -, et le toucher - suggéré par la pluie. Les rayons solaires, souvent perçus de façon agréable, se changent en averse peut-être excessive. Ce sensualisme est typique des auteurs symbolistes qui désirent percevoir le monde physiquement et le communiquer de la même façon. Le premier vers, dans lequel « chante une rivière », fait état du même sensualisme. La rivière personnifiée est perçue comme vivante et chantante, elle stimule l’ouïe, éveille le corps du poète et du lecteur de façon agréable. Il y a également présence de correspondances verticales dans Le Dormeur du val, et cette caractéristique est encore typique de l’esthétique symboliste. Les correspondances verticales associent, elles, un élément tangible à un élément intangible. Dans le poème, Rimbaud présente au lecteur un soldat qui semble dormir paisiblement. Il le fait en utilisant le champ lexical du sommeil : « dormeur », « dort », « lit », « somme ». Le sommeil apparent cache en fait la mort bien réelle du soldat, tué par deux balles. Le poète se sert donc d’un fait quotidien, commun, le « sommeil », afin de représenter un concept abstrait : le repos éternel, la mort, dont la justification dépasse l’entendement humain. Une autre correspondance verticale est créée par les vers suivants : « […] D’argent; où le soleil, de la montagne fière / Luit; c’est un petit val qui mousse de rayon. » Ici, le poète joue avec la luminosité, la brillance, pour évoquer l’idée du paradis où repose peut-être le soldat. Le personnage, entouré de lumière tel un ange, a probablement rejoint des cieux plus cléments. Ainsi, par la présence de correspondances autant horizontales que verticales, il est possible d’affirmer que Le Dormeur du val appartient bien au courant du symbolisme.

Une autre caractéristique symboliste que ce poème respecte est celle de la musicalité qui est extrêmement travaillée et qui accompagne ou souligne le propos du poète. Dans Le Dormeur du val, Rimbaud utilise

...