Dissertation Lamartine - « Le philosophe, l’homme politique, le poète doivent avoir beaucoup voyagé. Changer d’horizon moral, c’est changer de pensée »

« Le philosophe, l’homme politique, le poète doivent avoir beaucoup voyagé. Changer d’horizon moral, c’est changer de pensée »

Lamartine, voyage en orient.

Montaigne disait dans son œuvre Essais que « les voyages forment la jeunesse ». En effet, selon lui, l'expérience du voyage était un outil qui sous-entendait la découverte d'autres façons de vivre et de penser, notions nécessaires à la connaissance et l'éducation. Ce proverbe rejoint alors la citation de Lamartine qui fera l'objet de notre réflexion, tirée de son ouvrage Voyage en Orient publié en 1835. Son œuvre, écrite sous forme d'un journal de voyage, évoque les multiples séjours qu'il a effectués accompagné de sa femme et sa fille en Orient. Dans l'un de ses chapitres sur l'île de Chypre, il explique que le voyage est un moyen de résumer sa vie en peu d'années et qu'il s'agit d'un exercice essentiel que l'homme peut vivre pour alimenter son cœur et sa pensée. Il déclare ainsi que : « Le philosophe, l’homme politique, le poète doivent avoir beaucoup voyagé. Changer d’horizon moral, c’est changer de pensée ». Ici, l'auteur émet un parallèle entre le voyage et le fait de changer d'horizon moral c'est à dire, changer la façon dont nous voyons les choses et nous pensons. Pour ce faire, il prend l'exemple d'hommes lettrés et intellectuels tels que le philosophe, l'homme politique et le poète car selon lui, ce sont des hommes complets car ils ont beaucoup voyagé. Nous comprenons alors aisément le message de Lamartine sur son intérêt attaché au voyage mais ce qu'il faut tenter de déceler, ce sont les différentes représentations qui existent de cette notion.

Ainsi, nous allons analyser la citation du poète romantique en se demandant quels sont les différents concepts du voyage qui peuvent être une source d'ouverture pour changer d'horizon moral. Dans une première partie, nous réfléchirons alors sur le voyage concret comme moyen essentiel à la formation morale et intellectuelle de l'homme (I), dans une deuxième partie de l'Expérience comme nouvel horizon moral (II) et dans une troisième partie le voyage personnel et intérieur, celui de notre esprit (III).

D'abord, il est important de comprendre qu'il existe plusieurs concepts du voyages qui, comme Lamartine l'explique, permettent de changer d'horizon moral. En effet, lorsque nous parlons du voyage, nous avons tendance à penser en premier temps au voyage concret c'est-à-dire lorsque nous nous déplaçons physiquement à un autre endroit. Le voyage corporel peut nous apporter beaucoup, notamment d'autres approches de la vie et de pensée comme l'a déclaré Lamartine. Par exemple, voyager dans un autre pays où habite une autre civilisation dotée d'une toute autre culture peut être l'occasion de mettre fin à notre ethnocentrisme ; qui est la tendance à valoriser uniquement le modèle culturel d'origine où nous avons grandit pour en faire une référence. Cette notion a notamment été le sujet de réflexion de Claude Lévi-Strauss dans son œuvre Race et Histoire où il développe que la diversité culturelle demeure très incomprise car la première réaction de la conscience humaine est de la considérer comme le résultat aberrant d'un écart par rapport à une norme supposée être objective. Or, cette norme selon Lévi-Strauss n'existe pas car elle est établie uniquement par la culture qui nous est instituée depuis notre naissance. Ainsi voyager, c'est donc changer et s'ouvrir à la découverte d'une nouvelle culture qui permet alors de lever le voile de notre ethnocentrisme. Celui ci qui aveuglait notre pensée disparaît pour laisser place à une nouvelle façon d'observer les faits et événements qui nous entoure et à une ouverture d'esprit qui se développe.

Comme Lamartine le dit : « Changer d'horizon moral, c'est changer de pensée. ». Nous l'avons précédemment, le voyage permet de découvrir de nouvelles cultures et donc de s'exposer à de nouveaux horizons moraux. S'ouvrir à un horizon nouveau permet plusieurs constatations. En effet, nous pouvons soit être confortés dans notre pensée d'origine tout en la décentralisant vis à vis du nouvel horizon moral que nous découvrons, soit nous en découvrons un tout nouveau qui nous fait changer d'avis et de façon de penser. Ainsi, s'ouvrir à une nouvelle culture qui nous touche grâce au voyage, c'est un moyen de construire son horizon moral future. Cela permet alors de sortir de soi pour se retrouver et se renouveler. Le voyage permet donc l'évolution et le renouvellement de notre façon d'être et de penser. C'est d'ailleurs pour cela que Lamartine relie le philosophe, l'homme politique et le poète à cette notion car ce sont des hommes qui changent souvent de pensée et de façon d'être. Ils sont sans cesse en quête de renouvellement comme l'a été notamment Lamartine lui-même au fil de sa vie et de sa carrière d'auteur. On peut donc également dire que cette citation lui est autobiographique.

Si l'on prend la citation dans son intégralité, on peut alors comprendre que le voyage permet finalement le développement de la morale et l'intellectualité. En effet, nous pouvons remarquer que la plupart des auteurs, poètes, philosophe ou tout simplement grands hommes de lettres de nos siècles précédents se sont forgés et construits au fur et à mesure de leur voyages. D'ailleurs, Émile Zola a écrit dans Aventures du grand Sidoine et du petit Médéric que « rien ne développe l'intelligence comme les voyages » car le fait de voyage nous éduque sur de nouvelles perspectives et développe notre ouverture d'esprit qui est une qualité intellectuelle tout comme la culture général. C'est également une source d'inspiration et de créativité, de nombreux auteurs ont écrit sur leurs nombreux séjours comme par exemple Henry de Monfreid qui était un commerçant et écrivain français. A partir de ses aventures, il a commencé à développer son horizon moral et à écrire des contes et romans sur ses voyages en Éthiopie ou en Mer Rouge. C'est le cas également de l'écrivain et photographe suisse Nicolas Bouvier qui a publié L'Usage du monde en 1963 et qui est considéré aujourd'hui comme un chef-d'oeuvre de la littérature du voyage. En effet, selon Bouvier, l'écriture naît du voyage et de la contemplation que ce dernier procure. Ainsi, dans ses récits il a développé les qualités que lui avaient apporté ses aventures. Nous

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