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Commentaire sur la pièce de théâtre Les Mouches de Jean-Paul Sartre

Dissertation : Commentaire sur la pièce de théâtre Les Mouches de Jean-Paul Sartre. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Juin 2013  •  1 146 Mots (5 Pages)  •  1 870 Vues

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«Je suis libre, Électre»

ORESTE. - Je suis libre, Électre ; la liberté a fondu sur moi comme la foudre.

ÉLECTRE. - Libre? Moi, je ne me sens pas libre. Peux-tu faire que tout ceci n'ait pas été? Quelque chose est arrivé que nous ne sommes plus libres de défaire. Peux-tu empêcher que nous soyons pour toujours les assassins de notre mère?

ORESTE. - Crois-tu que je voudrais l'empêcher? J'ai fait “mon” acte, Électre, et cet acte était bon. Je le porterai sur mes épaules comme un passeur d'eau porte les voyageurs, je le ferai passer sur l'autre rive et j'en rendrai compte. Et plus il sera lourd à porter, plus je me réjouirai, car ma liberté, c'est lui. Hier encore, je marchais au hasard sur la terre, et des milliers de chemins fuyaient sous mes pas, car ils appartenaient à d'autres. Je les ai tous empruntés, celui des haleurs, qui court au long de la rivière, et le sentier du muletier et la route pavée des conducteurs de chars ; mais aucun n'était à moi. Aujourd'hui, il n'y en a plus qu'un, et Dieu sait où il mène mais c'est “mon” chemin. Qu'as-tu?

ÉLECTRE. - Je ne peux plus te voir ! Ces lampes n'éclairent pas. J'entends ta voix, mais elle me fait mal, elle me coupe comme un couteau. Est-ce qu'il fera toujours aussi noir, désormais, même le jour? Oreste ! Les voilà !

ORESTE. - Qui?

ÉLECTRE. - Les voilà ! D'où viennent-elles? Elles pendent du plafond comme des grappes de raisins noirs, et ce sont elles qui noircissent les murs ; elles se glissent entre les lumières et mes yeux, et ce sont leurs ombres qui me dérobent ton visage.

ORESTE.- Les mouches...

ÉLECTRE. - Écoute !... Écoute le bruit de leurs ailes, pareil au ronflement d'une forge. Elles nous entourent, Oreste. Elles nous guettent ; tout à l'heure elles s'abattront sur nous, et je sentirai mille pattes gluantes sur mon corps. Où fuir, Oreste? Elles enflent, elles enflent, les voilà grosses comme des abeilles, elles nous suivront partout en épais tourbillons. Horreur ! je vois leurs yeux, leurs millions d’yeux qui nous regardent.

ORESTE.- Que nous importent les mouches?

ÉLECTRE. - Ce sont les Érinnyes, Oreste, les déesses du remords.

Analyse

Une double thématique : Les quelques répliques qui constituent l'extrait opposent Oreste et sa sœur, Électre, à propos d'un acte qui est cité, le meurtre de Clytemnestre. Mais le contenu de leurs répliques ne s'oriente pas dans la même direction.

Les répliques d'Oreste sont dominées par l'affirmation d'une liberté («Je suis libre», ligne 1 - «ma liberté, c'est lui», ligne 8) développée à travers plusieurs images dans les lignes 6 à 15, la revendication d'un acte autonome et de sa responsabilité.

Les répliques d'Électre affirment le contraire (emploi de la négation à la ligne 2 : «je ne me sens pas libre»), appuyé par l'impossibilité du retour en arrière. Peu à peu, le thème précis de la liberté s'estompe au profit d'un autre, qui se traduit par l'absence de lumière (ligne 13), la souffrance (ligne 14), la présence obsédante des mouches (énumération de leurs actions et de leurs caractéristiques dans les lignes 17 à 20 et 21 à 26), représentations métaphoriques et symboliques de la culpabilité et du remords.

En quelques répliques inégales se révèle le thème de l’opposition : le même acte criminel (un assassinat) est revendiqué par l'un des personnages comme un acte de liberté et par l'autre comme une faute lourde, dont la culpabilité et les remords sont déjà des obsessions et un emprisonnement,

Les caractéristiques du dialogue : La simple observation du texte fait apparaître une

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