Commentaire Madame Bovary

Dans de nombreuses oeuvres romanesques, le topos de la mort de l’héroïne est traité, comme chez Madame de la Fayette ou encore chez Zola. En effet, il peut avoir diverses fonctions: faire surgir des émotions chez le lecteur, introduire une morale ou une critique comme dans Madame Bovary écrit par Flaubert où la mort d’Emma apparaîtra. Ce passage reflète d’une écriture réaliste, en effet cet écrit ayant été publé en 1856 s’inscrit dans le réalisme, mouvement littéraire prédominant durant la seconde moitié du XIXème siècle. C’est ainsi que que cette extrait décrit l’agonie de l’héroïne entourée d’un groupe de personnes, et de l’intervention d’un personnage extérieur, l’Aveugle, qui joue un rôle majeur.

Il s’agira donc de se demander en quoi les personnages et le réalisme de la scène influent sur la mort du personnage.

Dans un premier temps, la dimension réaliste sera évoquée puis viendra le traitement des personnages.

Le genre du texte est immédiatement perçu, pour ce l’auteur a recours à différents procédés afin de fournir une précision digne d’une scène de vie.

Tout d’abord, l’utilisation d’un point de vue externe est adopté, effectivement l’auteur, par ce choix, peut alors nous livrer les sentiments de chacun des personnages. Les pensées de Charles nous sont donc ainsi livrées «Il ne fallait peut-être pas se désespérer, pensa-t-il.» ou encore «Charles se rappela un jour». Quant à Emma, sa démence est également fournie, «Emma se mit à rire [...] croyant voir la face hideuse du misérable» et ce avec sa propre interprétation de sorte qu’à la lecture, la mort qui s’infiltre peu à peu en elle et sa crainte face à l’Aveugle soient détaillées le plus réellement possible.

Ce choix de narration contribue au réalisme en nous fournissant des précisions sur l'intériorité des personnages, ainsi le lecteur peut se faire une idée précise de leur caractère et mieux percevoir leur nature.

Ce qui notamment remarquable dans la façon de décrire cette mort sont les nombreux renseignements et détails que l’auteur apporte. En effet, les comparaisons «ses yeux [...] palissaient comme deux globes de lampes qui s’éteignent» et «Emma se releva comme un cadavre que l’on galvanise» permettent une scène visuelle auquel on y apporte du mouvement avec le verbe «releva». De plus ces yeux ainsi qualifiés prouvent bien la fin de vie de leur propriétaire, qui s’éteint également. Le récit va être accélérer par un ensemble de symptômes «haleter rapidement», «la langue lui sortit toute entière hors de la bouche», ou encore «l’effrayante accélération de ses côtes». Ces références à différentes parties de l’anatomie résultent d’une totale perte de contrôle qu’Emma à de son corps et une lente dégradation de son état.

Le récit de l’agonie est rédigé par le biais d’une écriture clinique en approfondissant le caractère plausible de la scène sans rechercher à atténuer la violence de la situation.

L’auteur, après avoir rendu un tableau mouvementé y a ajouté des sonorités. En effet, par les différentes sollicitations auditives, le lecteur peut donc entièrement recréer l’univers que Flaubert a imaginé. Ces précisions «un souffle furieux», «une ruine qui tombe» décrivent une atmosphère oppressante. Ces deux recours au son caractérisent l’état d’Emma, elle n’est absolument plus maîtresse de ses actions, encore moins lorsque le bruit de «frôlement d’un bâton» intervient, effectivement il s’agit de l’Aveugle qui va plonger la moribonde dans une détresse encore plus grande qui se note par son «rire atroce, frénétique, désespéré». Ces adjectifs, disposés de sorte à former une gradation, décrivent bien le son de son rire qui est totalement déraisonné. Les sollicitations auditives permettent non seulement de donner des renseignements sur l’état de l’héroïne et sur l’irruption de l’Aveugle mais aussi de donner un cadre dans lequel le lecteur peut à la fois imaginer et entendre la scène et donc appuyer le réalisme du texte.

...