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La Leçon De Musique Dans Tous Les Matins Du Monde

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Par   •  2 Avril 2013  •  2 001 Mots (9 Pages)  •  1 254 Vues

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Alain Corneau, le réalisateur du film Tous les Matins du Monde, avait commandé un scénario à Quignard afin de faire un film sur la musique, chose dont il rêvait depuis longtemps. Quignard fit un roman du même nom, duquel le film sera tiré. Les deux œuvres se font donc véritable leçon de musique pour le spectateur, à la fois à travers les élèves des deux grands musiciens Sainte Colombe et Marais (lorsqu’il est vieux), mais également à travers les leçons apprises par ces deux musiciens eux-mêmes. Le spectateur est alors plongé dans un univers musical qui reste très subjectif en fonction du point de vue adopté.

Les leçons de musique données par Sainte Colombe et Marin Marais sont les leçons que l’on repère en premier, car plus visibles et plus abordables.

La première leçon que l’on voit à l’écran dans le film de Corneau n’est pas à proprement parler celle de Marais. Un gros plan sur le visage de celui-ci dormant nous en informe immédiatement, tandis que l’on entend un maître de Versailles en voix hors champ harceler de critiques un élève maladroit : « Vos tirés sont trop forts ! », « Il faut accélérer ! » ; reproches qui réveillent et indignent Marais. La leçon n’est pas à son goût. Il montre alors comment interpréter un morceau de manière sentie, expressive, et commence un récit, celui de son maître de qui il a tout appris : « Je suis un imposteur (…) J’avais un maître.. ». Tout le film pendant lequel on découvre la vie de ce maître, Sainte Colombe, n’est en fait que la leçon de Marais, qui se termine à l’épilogue du film. Mais cette leçon n’est pas seulement la vie de Monsieur de Sainte Colombe ; elle véhicule des valeurs comme celles du silence, des sentiments ressentis dans la musique que Marais a enfin appris et retransmet à ses élèves. On aperçoit également un morceau d’enseignement de la part de Marin Marais lorsqu’il fait répéter à l’orchestre de Versailles la pièce de Lully, la Marche Turque , au chapitre 23. Dans le film, il dirige avec de grands mouvements précis et efficaces, afin que les musiciens sentent bien le rythme et ne se décalent point. La musique est mathématique, et pour jouer ensemble il faut être exact dans ce que l’on joue, sinon il n’y a plus d’ordre et partant, plus d’harmonie. On voit également l’importance de la concentration lorsque Marais, après avoir refusé de se rendre au chevet de Madeleine commence à y réfléchir et à culpabiliser : son mouvement est moins précis, et à plusieurs reprises il doit se recentrer sur la musique.

Sainte Colombe est lui, le personnage présenté comme le maître de musique de Tous les Matins du Monde, de par l’admiration de la voix off de Marais le vieux pour lui. « C’était un maître réputé » chapitre 1. Dès le début, un élément important de sa vie est donné : il est janséniste. Cette information rejoint le portrait que Marais avait fait de lui dans le prologue : « il n’était qu’austérité et colère. Il était muet comme un poisson ». On le voit ensuite donner des leçons de chant à ses filles, accompagné par Monsieur de Bures leur précepteur. C’est la première fois qu’on le voit aussi expressif en jouant de la viole : il ferme les yeux, à des mouvements de buste lorsque la musique acquiert plus d’intensité, incline la tête de temps à autre… Lorsqu’il déménage dans sa Vorde, on apprend par la voix off qu’il « s’exerç[ait] jusqu’à cinq heures par jour ». La musique est difficile à apprendre, il faut persévérer et savoir donner de son temps pour bien jouer ; Monsieur de Sainte Colombe est tellement passionné qu’il s’entraine beaucoup plus que la normale. Nous avons même la description de toutes les techniques qu’il a inventées : il inventa une nouvelle manière de tenir la viole entre les jambes, ajouta un septième corde, et trouva une nouvelle manière de tenir l’archet grâce à laquelle « il arrivait à imiter toutes les inflexions de la voix humaine » selon un de ses élèves, Côme le Blanc le père. (Chapitre 1). Au chapitre 8, il souligne le fait que « c’est jouer qu’il faut ». C’est à ce moment que l’on comprend l’importance de l’expression des sentiments pour lui.

Nouvelle leçon aux chapitres 9 et 10, lorsqu’il va chez Baugin, un ami peintre, avec Marais devenu son élève. A la manière d’un sage oriental, il trouve de la musique dans les éléments naturels : « Vous entendez monsieur, comment se détache l’aria par rapport à la basse ? » en parlant du vent sifflant ; il montre également la technique de l’archet en la comparant à celle de l’archet du peintre, celle du détaché en écoutant l’urine d’un petit garçon « crevant la neige » chapitre10, et dit enfin que l’emphase d’une phrase musicale doit être pareille à celle présente lorsqu’une actrice du jeu de paume déclame des vers.

L’importance de l’émotion dans la musique revient lorsque Marais est renvoyé, au chapitre 13 : « Ecoutez monsieur, les sanglots que la douleur arrache à ma fille : ils sont plus près de la musique que vos gammes ».

Grâce à ces deux musiciens, le spectateur ou le lecteur acquiert quelques notions sur la musique en général et sur la musique selon le caractère du musicien. Mais ces deux musiciens émérites ont eux aussi des leçons à apprendre.

En effet, Marin Marais a reçu des leçons de plusieurs personnages avant de devenir le musicien virtuose de sa vieillesse ; et a lui-même appris certaines choses à Monsieur de Sainte Colombe.

Monsieur de Sainte Colombe est un maître réputé dans le jeu de la viole de gambe, mais il est également connu pour être taciturne, parlant peu : « Il était muet comme un poisson » dit de lui Marais dans le prologue du film. Au fil de l’histoire, il se rendra compte que cela est un obstacle à beaucoup de choses et déclarera à sa femme : « Vous avez raison de m’adresser ce reproche. La parole ne peut jamais dire ce dont je veux parler et je ne sais comment le dire… » chapitre 15.

Il expliquera également à ses filles ce manque d’expression dans les paroles au chapitre 2 : « Il s’excusa une autre fois auprès d’elle de ce qu’il ne

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