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Le secret bancaire face à la procédure fiscale et la procédure civile

Dissertation : Le secret bancaire face à la procédure fiscale et la procédure civile. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  12 Février 2023  •  Dissertation  •  2 477 Mots (10 Pages)  •  176 Vues

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LE SECRET BANCAIRE FACE À LA PROCÉDURE FISCALE ET LA PROCÉDURE CIVILE

 

        Le devoir du banquier de respecter la confidentialité par rapport aux affaires de son client est un principe ancien et majeur de la profession bancaire. Le banquier tient, dans ses relations avec son client, un rôle de « confident nécessaire » au regard des informations du caractère financier et patrimonial, mais également du caractère personnel. Le secret constitue un élément essentiel de ces relations et assure le droit au respect de la vie privée consacré, parmi d’autres, par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales.

        Malgré son importance, le secret bancaire n’est pas absolu (à l’opposé du secret professionnel auquel, par exemple, les professions médicales sont astreintes) mais a une nature dite relative, comportant des exceptions et dont le professionnel assujetti peut être délié par la personne qui en bénéficie.

        Le secret bancaire a fait l’objet d’une législation protectrice depuis le début du XXème siècle en Suisse comme au Luxembourg. En France, depuis sa reconnaissance par la loi nº 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit et figurant aujourd’hui à l’article L. 511-33 du Code monétaire et financier, le secret bancaire a subi plusieurs évolutions, notamment en matière de ses exceptions. Ces évolutions proviennent des développements législatifs aussi bien que jurisprudentiels. Par exemple, la loi nº 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a permis aux établissements de crédit de communiquer des informations couvertes par le secret professionnel aux agences de notation ainsi qu’aux personnes avec lesquelles ils « négocient, concluent ou exécutent » un certain nombre d’opérations. Côté jurisprudentiel, il convient de mentionner de certains arrêts qui ont récemment changé la jurisprudence antérieure, tel que par exemple l’arrêt de la Cour de cassation du 15 mai 2019 remis en question l’interdiction de produire une photocopie d’un verso de chèque en vertu du secret bancaire, précédemment aperçu comme une règle gravée dans le marbre.

        On peut alors remarquer un certain affaiblissement du secret bancaire face aux autorités fiscales, surtout au niveau international, et aux juridictions civiles (I). Il y a lieu aussi de constater que la recherche d’un juste équilibre entre l’obligation de tenir le secret bancaire et les intérêts publics et enjeux de procédure civile est toujours en cours (II).

  1. L’affaiblissement du secret bancaire face aux autorités fiscales et juridictions civiles 
  1. Les limites du secret bancaire devant le juge civil

Le secret bancaire n’est pas opposable au juge pénal. En revanche, il l’est à l’égard du juge civil. Les articles 10 du Code civil et 11 du Code de procédure civile imposent aux parties d’apporter leur concours en vue de la manifestation de la vérité. Néanmoins, une telle obligation n’est prévue qu’en l’absence « d’empêchement légitime », ce qui comprendrait le secret bancaire. La Cour de cassation a confirmé cette hypothèse à plusieurs reprises, en soulignant, parmi d’autres, que le secret bancaire ne cessait pas avec la disparition de la personne qui en bénéficie et s’étendait aux personnes qui ont eu le pouvoir de faire fonctionner le compte (Cass. com., 25 février 2003, nº 00-21.184).

Cependant, le principe du secret bancaire a connu récemment des évolutions importantes exigeant l’approche plus nuancée à l’interprétation de cet empêchement légitime.

Il y a lieu de distinguer deux situations : l’une où la banque est partie à l’instance et l’autre où la banque n’y est qu’un tiers.

Dans la première hypothèse, la banque est soumise à l’obligation générale de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention (article 9 du Code de procédure civile). L’empêchement légitime résultant du secret bancaire ne cesse pas du seul fait que l’établissement financier est partie à un procès, dès lors que son contradicteur n'est pas le bénéficiaire du secret auquel le client n’a pas lui-même renoncé. L’arrêt de la Cour de cassation rendu le 10 février 2015 en est une parfaite illustration :  la Haute juridiction a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel de Paris dans la partie autorisant l’huissier de justice à rechercher et prendre copie d'éléments portant atteinte au secret bancaire dans le cadre d’un litige entre les deux sociétés ayant pour objet le courtage d'instruments financiers (Cass. com., 10 février 2015, n° 13-14.779).

 Pourtant, il en faut distinguer une situation où l’établissement financier décide de lever son secret sur son initiative lors d’un litige vis-à-vis de son client. La jurisprudence a confirmé que la banquier doit ainsi pouvoir faire état de ses arguments afin de se défendre lorsque ses intérêts s’opposent à ceux d’un client, même si cela l’oblige à communiquer des informations confidentielles.  Tel est le sens d’un arrêt de la Cour de cassation rendu le 29 novembre 2017 énonçant que le secret bancaire ne constitue pas un empêchement légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile lorsque la demande de communication de documents est dirigée contre l’établissement de crédit non en sa qualité de tiers confident mais en celle de partie au procès intenté contre lui en vue de rechercher son éventuelle responsabilité dans la réalisation de l’opération contestée (Cass. com., 29 novembre 2017, n° 16-22.060). Cette approche a été confirmée par la Haute juridiction le 4 juillet 2018 dans l’arrêt par laquelle elle a ordonné à la cour d’appel d’estimer la nécessité de fournir des preuves contenant le secret bancaire et le degré de proportionnalité de la révélation de ces informations aux besoins du procès équitable (Cass. com., 4 juillet 2018, nº 17-10.158) tout en confirmant que le secret bancaire tend à s’effacer au profit d’un droit à la preuve.

La deuxième hypothèse, quant à elle, nécessite aussi une approche nuancée. Tandis que la jurisprudence avait considéré de façon constante que le secret bancaire est opposable au juge civil lorsque le banquier était tiers à l’instance, notamment s’il agit de la production d’une photocopie d’un verso de chèque, l’affaire traitée par la Cour de cassation le 15 mai 2019 en a démontré une évolution importante. La Haute juridiction a ordonné à la cour d’appel d’estimer la nécessité de communiquer des informations au verso des chèques litigieux et la mesure de proportionnalité d’une telle communication aux intérêts adversaires (Cass. com., 15 mai 2019, nº 18-10.491). Cependant, la question de l’opposabilité du secret bancaire par rapport au droit à la preuve n’a pas été définitivement tranchée. Néanmoins, il ressort de cette jurisprudence que le secret bancaire tend à s’effacer pour faire jouer d’autres droits, notamment le droit à la preuve qui fait partie du droit au procès équitable.

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