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La décision de la première chambre civile de la Cour de cassation du 3 mai 2000: fraude

Commentaire d'oeuvre : La décision de la première chambre civile de la Cour de cassation du 3 mai 2000: fraude. Recherche parmi 297 000+ dissertations

Par   •  16 Juin 2014  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 865 Mots (8 Pages)  •  776 Vues

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Commentaire d'arrêt de la Première Chambre civile de la Cour de cassation

du 3 mai 2000 : la réticence dolosive

Commentaire d'arrêt de la Première Chambre civile de la Cour de cassation

du 3 mai 2000 : la réticence dolosive

La décision de la Cour de cassation du 3 mai 2000 concernant un arrêt du 5 décembre 1997 de la Cour d’appel de Versailles est venue semer le doute quant à l’application de la définition du dol (article 1116 du Code civil) et plus précisément de la réticence dolosive.

Une femme a vendu aux enchères publiques en 1986 cinquante photographies d’un photographe qu’elle croyait peu renommé, au prix de 1000 francs pièces. En 1989, elle retrouve l’acquéreur de la vente et conclut avec lui la vente de quatre-vingts-cinq photos du même artiste, pour le même prix. C’est alors que la venderesse découvre que le photographe qu’elle croyait inconnu est en fait un photographe célèbre, de sorte qu’elle aurait pu, en connaissance de cause, vendre ses photos beaucoup plus cher que les 1000 francs proposés.

En conséquence, la venderesse porte plainte pour escroquerie, mais la juridiction pénale ne donne aucune suite à l’action publique et la plainte est close par un non-lieu. La venderesse réclame alors la nullité de la vente pour dol devant une juridiction civile. La Cour d’appel déclare l’acheteur coupable de dol et le condamne à restituer 1 915 000 francs, représentant la valeur réelle des photographies achetées après déduction du prix de vente original de 85 000 francs. L’acheteur, non satisfait, se pourvoit alors en cassation.

Selon la Cour d’appel, l’acheteur était conscient du prix réel des photographies et en dissimulant cette information à la venderesse, l’aurait déterminée à conclure la vente alors qu’elle n’aurait jamais accepté en connaissance de cause. Ainsi, ce défaut d’information est considéré comme une réticence dolosive, car l’obligation de contracter de bonne foi n’est pas respectée.

Le silence de l’acheteur concernant une information déterminante lors d’un contrat de vente est-il constitutif d’une réticence dolosive ?

La Cour de cassation répond par la négative et casse l’arrêt de la Cour d’appel sous le visa de l’article 1116 du Code civil. L’acheteur n’a pas manqué à l’obligation de bonne foi contractuelle et n’a pas non plus commis de dol, car il n’était soumis à aucune obligation d’information. C’est par cet arrêt de principe fondateur que la jurisprudence laisse l’acheteur libre d’informer ou non le vendeur de la valeur de son bien.

Ainsi, l’obligation d’information de l’acquéreur semble être écartée par la Cour de cassation (I), ce qui par conséquent remet en cause la bonne foi contractuelle (II).

I. L’obligation d’information de l’acquéreur écartée

Cet arrêt est un arrêt de principe qui fait jurisprudence. En effet, jusqu’ici la question du silence de l’acheteur ne s’était pas posée. La réponse à cette question de droit est fondée sur l’article 1116 du Code civil (A) : le silence de l’acquéreur, concernant la valeur de l’objet de la transaction, n’est pas considéré comme constitutif d’une réticence dolosive (B).

A. Le visa employé par la Cour : l’article 1116 du Code civil

La cassation est prononcée sous le visa de l’article 1116 du Code civil qui traite du dol : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté ». La notion de manœuvre s’étend jusqu’au mensonge et donc à la réticence dolosive, c’est-à-dire le silence d’un contractant sur une information concernant directement son cocontractant.

En l’espèce, comme l’a souligné la Cour d’appel de Versailles, « par sa réticence à lui faire connaître la valeur exacte des photographies, M. Clin a incité Mme Boucher à conclure une vente qu’elle n’aurait pas envisagée dans ces conditions ». C’est une pure erreur sur la valeur : la venderesse était en pleine connaissance des qualités substantielles de son bien, dont notamment l’authenticité des photographies, c’est bien sur la valeur des photographies que porte l’erreur. Or, l’erreur sur la valeur est admise sur le terrain du dol alors qu’elle n’est pas prise en compte sur le terrain de l’erreur.

De plus, pour que la réticence dolosive soit constatée, il faut une preuve de l’élément intentionnel. En l’espèce, l’acheteur connaissait la véritable valeur des photos, car « avait déjà vendu des photographies de Baldus qu’il avait acheté aux enchères publiques à des prix sans rapport avec leur prix d’achat ».

La situation de l’arrêt Baldus semble donc convenir à la définition du dol : l’acheteur a bel et bien volontairement omis d’informer la venderesse d’un détail important concernant directement la valeur de la transaction.

Mais bien que le cas d’espèce corresponde à la définition du Code civil, la Cour de cassation en a décidé autrement et a cassé l’arrêt de la Cour d’appel, car « aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur ».

B. Le silence de l’acquéreur sur la valeur, corollaire de la réticence dolosive ?

Cet arrêt vient préciser la définition du dol, qui était jusque là incomplète et pose un principe : l’acheteur peut garder concernant des informations relevant directement de la transaction. En l’espèce, l’acheteur détenait réellement une information concernant la valeur réelle du bien, mais n’en a pas instruit la venderesse. Mais selon la Cour de cassation « aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur », il est donc libre de dissimuler au vendeur la véritable valeur du bien concerné.

De plus, l’arrêt précise que « M. Clin a incité Mme Boucher à conclure une vente qu’elle n’aurait pas envisagée dans ces conditions ». Si l’acheteur avait informé la venderesse

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