LaDissertation.com - Dissertations, fiches de lectures, exemples du BAC
Recherche

Joseph: Découverte de la maladie de Kaplan

Commentaire de texte : Joseph: Découverte de la maladie de Kaplan. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  14 Juillet 2014  •  Commentaire de texte  •  488 Mots (2 Pages)  •  1 064 Vues

Page 1 sur 2

Chez les Kaplan de Prague, on était médecin de père en fils depuis une dizaine de générations. Le grand-père de Joseph, le professeur Gustav Kaplan, avait tracé un arbre généalogique qui remontait au début du XVIIe siècle avant de laisser son nom dans l'histoire comme découvreur de la maladie de Kaplan, affection dermatologique qui défigurait une des nièces de François-Joseph.

Il avait passé plus de cinquante ans à sillonner l'Empire dans tous les sens pour glaner scrupuleusement les dates des naissances, mariages, alliances et décès à des époques où chaque femme faisait une flopée d'enfants, où l'état civil était aussi aléatoire que les frontières, et même s'il y avait des ratures, des points d'interrogation et quelques blancs sur son document, il avait à peu près reconstitué l'histoire de ces médecins qui se reproduisaient comme des lapins.

Joseph revoyait Édouard, son père qui exerçait dans un bel immeuble de la rue Kaprova, dérouler sur la table de la salle à manger le précieux parchemin d'un mètre cinquante de long après l'avoir extrait de son tube en cuir vert, pour lui expliquer les méandres d'une arborescence embrouillée, certaines lignes se chevauchant ou se croisant d'une façon inquiétante et ambiguë. Joseph en avait tiré des conclusions qu'il garda pour lui. Personne ne pouvait nier qu'il y avait eu plusieurs mariages arrangés entre cousins, oncles et nièces. En ces temps lointains, dans ces sociétés fermées, l'instinct de survie primait.

Peut-être pouvait-on trouver dans ces alliances répétées une explication au manque de discernement de cette population et à l'erreur fatale qui devait conduire à sa quasi-disparition. A force de se répéter qu'ils avaient une chance exceptionnelle de vivre sous le gouvernement des Habsbourg, les juifs avaient fini par croire que les Autrichiens et les Prussiens étaient des amis, et quand ils les virent arriver, si beaux dans leurs uniformes noirs, ils ne se méfièrent pas.

Souvent, Joseph s'était demandé s'il était responsable de ce silence ouaté qui s'était installé entre son père et lui ou peut-être l'un comme l'autre étaient-ils incapables de se parler, une forme de barrière affective (de ces mots qui n'arrivent pas à s'échapper, dissimulés derrière des sourires de connivence). On se dit, ces paroles vont blesser ou tout gâcher, on les enferme au fond de soi et, avec les années, on les empile jusqu'à dresser un mur infranchissable.

Joseph n'avait pas réalisé la gravité de la Première Guerre mondiale. A Prague elle semblait lointaine, une sorte de jeu d'adultes qui se termina, il avait alors huit ans, dans la satisfaction générale par la création de la République tchécoslovaque. Sa mère Teresa faisait son éducation, lui parlait indistinctement en français et en allemand, elle avait plus de facilités dans cette dernière langue et projetait d'apprendre le russe avec lui pour lire Pouchkine dans le texte. Elle adorait la valse, la musique du bonheur, Édouard était raide et mal à l'aise, il pensait que le ridicule tuait et refusait de se donner en spectacle. Aussi Teresa

...

Télécharger au format  txt (3.1 Kb)   pdf (56.3 Kb)   docx (9 Kb)  
Voir 1 page de plus »
Uniquement disponible sur LaDissertation.com