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Commentaire d'arrêt: chambre commerciale de la cour de cassation, 8 MARS 2011: Dans quelle mesure une tierce opposition, de la part d’un créancier, peut-elle être recevable ?

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Par   •  8 Avril 2013  •  3 659 Mots (15 Pages)  •  2 479 Vues

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COMMENTAIRE D’ARRET : CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR DE CASSATION, 8 MARS 2011

Une société Heart of La Défense (HOLD), dont le capital est détenu par une Société Dame Luxembourg, a acquis, via une SCI dont elle est unique associée, un ensemble immobilier, grâce à un prêt à taux variable, remboursable in fine, seuls étant remboursés jusqu'à la revente du bien immobilier, les intérêts du prêt. Le prêteur a exigé, entre autres garanties, un nantissement des parts sociales de Dame Luxembourg avec pacte commissoire, et, de la part de HOLD, une garantie de couverture du risque de variation du taux d'intérêt, risque assumé par des sociétés du groupe Lehman Brothers. Or ces sociétés ont fait l'objet de procédures collectives de paiement. Dans ces conditions, le prêteur a alors exigé un nouveau garant du risque de variation du taux d'intérêt. La société HOLD a fait savoir que les conditions de crise financière mondiale rendaient impossible la souscription d'un nouveau contrat de couverture en considération du coût de l'opération. Le prêteur a alors menacé de faire jouer la clause d'exigibilité anticipée du prêt. Dans ces conditions, la société HOLD et sa holding, Dame Luxembourg, ont sollicité chacune l'ouverture d'une sauvegarde, la première pour éviter le jeu de la déchéance du terme, la seconde pour empêcher qu'en suite de l'exigibilité de la dette, la garantie qu'elle avait octroyée au prêteur ne soit mise à exécution par le jeu d'un pacte commissoire.

Le tribunal de commerce de Paris a fait droit aux demandes d'ouverture de la sauvegarde, le 3 novembre 2008 (L’espèce date d’avant le 15 février 2009. Les procédures sont donc soumises à la loi de sauvegarde d'origine).

Le prêteur a alors formé une tierce opposition à l'encontre du jugement d'ouverture des procédures de sauvegarde en vue d'obtenir la rétractation des décisions. Suivant en cela l'opinion des premiers juges, appelés à connaître de cette tierce opposition, la cour d'appel l'avait déclarée recevable. La recevabilité de la tierce opposition est ici confirmée par la Cour de cassation.

En conformité avec les prescriptions de l'article 583, alinéa 2, du code de procédure civile, le créancier devait soit démontrer que le jugement de sauvegarde avait été rendu en fraude de ses droits, soit invoquer des moyens propres. En l'espèce, la tierce opposition est déclarée recevable sur la démonstration de moyens propres invoqués par le créancier.

En outre, en ouvrant la sauvegarde de la société HOLD, le tribunal tenait évidemment en échec la possibilité de faire jouer la déchéance du terme, puisque le prêt soumet le prêteur à la règle de l'interdiction des paiements. En ouvrant celle de Dame Luxembourg, le prêteur est paralysé dans la mise en œuvre de son pacte commissoire, qui, s'il est efficace en droit commun depuis la réforme du droit des sûretés résultant de l'ordonnance du 23 mars 2006, est paralysé en cas d'ouverture d'une procédure collective.

La sauvegarde apparaît donc comme la réponse apportée par l'emprunteur et son garant à l'attitude du prêteur et, dans ces conditions, on comprend que le prêteur ait des moyens propres à faire valoir pour voir rétracter la décision d'ouverture de la sauvegarde.

Reste le bien-fondé de la tierce opposition. La cour d'appel s'était démarquée du tribunal, lequel, après avoir déclaré recevable la tierce opposition, l'avait considérée non fondée. Au contraire, la cour, saisie sur appel du jugement statuant sur la tierce opposition, a déclaré cette dernière bien fondée.

La cour d'appel va alors encourir une censure de la Cour de cassation, soit pour violation de l'article L. 620-1 du code de commerce, soit pour méconnaissance de l'objet du litige.

Ceci nous conduit donc à nous interroger sur les points suivants : L'existence de difficultés insurmontables pour le débiteur est-elle une condition irréfragable d’une ouverture de procédure de sauvegarde ? Dans quelle mesure une tierce opposition, de la part d’un créancier, peut-elle être recevable ?

Dans un premier temps nous nous attacherons aux conditions d’ouverture de la sauvegarde (I), puis, dans un second temps, nous nous attacherons au sors des créanciers (II).

I/ L’AMBIGUITE DE LA SAUVEGARDE : ENTRE INTERDICTION ET AUTORISATION

L'un des arguments retenus par la cour d'appel de Paris, qui avait conduit à la rétractation de l'ouverture des deux sauvegardes, tenait à ce que la sauvegarde ne pouvait être utilisée comme un moyen de porter atteinte à la force obligatoire des conventions (A). Cependant, la Cour de cassation procède à la censure de la cour d'appel, à laquelle elle reproche de ne pas avoir suffisamment pris en compte les conclusions des débiteurs démontrant l'existence de difficultés qu'ils ne pouvaient surmonter (B).

A/ L'interdiction de la sauvegarde comme moyen nuisible à la convention

En effet, la cour d'appel de Paris considère qu'il n'appartient pas à la société HOLD, en raison de la force obligatoire des contrats, de modifier unilatéralement les contrats de prêts souscrits, ni « de solliciter l'ouverture d'une sauvegarde aux seules fins de faire échec à l'impossibilité juridique dans laquelle elle se trouvait d'imposer unilatéralement une telle modification, en obtenant indirectement, mais nécessairement, du juge, par le seul effet de l'ouverture de la procédure sollicitée, la suspension des clauses contractuelles qu'elle n'a pas antérieurement réussi à faire modifier d'un commun accord avec son cocontractant ».

Une telle position conduit à obliger le débiteur à utiliser le mandat ad hoc et la procédure de conciliation. Elle condamne donc le recours direct à la sauvegarde pour faire céder ses partenaires contractuels.

Cependant, le code de commerce ne fait pas du recours préalable à la conciliation une condition d'éligibilité à la sauvegarde, du moins à la sauvegarde de droit commun. Une juridiction de Lyon, du 31 mai 2006 (n° 06/02245), a pu juger que « l'ouverture de la procédure de sauvegarde est complètement indépendante d'un recours préalable à une mesure de mandat ad hoc ou à une procédure de conciliation puisqu'elle est également une procédure préventive ».

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