Arrêt COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT
Commentaire d'arrêt : Arrêt COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dia.andreas • 28 Octobre 2022 • Commentaire d'arrêt • 2 044 Mots (9 Pages) • 601 Vues
A Fiche d’arrêt n° 1
Parfois les apparences sont trompeuses. Si un contrat a tous les ingrédients du droit privé, à travers la « transparence » d’une personne privée il peut s’avérer qu’il relève du droit public. Ainsi, l’administration est responsable pour les fautes contractuelles commises par une personne privée qu’elle a créée elle-même.
Le Conseil d’État a dû trancher sur une affaire de l’espèce dans un arrêt du 21 Mars 2007, intitulé COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT, req. N°281796.
Le 10 août 1989, l’association chargée de gérer la patinoire de la piscine de Boulogne-Billancourt signe un contrat avec la Société Mayday Sécurité pour une mission de contrôle et de sécurité à la dite patinoire. Il se trouve que le contrat signé est frappé de nullité pour une faute de l’association et que, en plus, l’association est mise en règlement judiciaire le 28 juillet 1996. Elle ne paie pas les factures que lui réclame la Société Mayday Sécurité. Étant donné que l’association gestionnaire de la piscine est considérée comme un service public de la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT, la Société Mayday Sécurité réclame les sommes facturées à l’administration de la commune. Cette dernière, s’appuyant sur la nullité du contrat, soutient que les services facturés n’auraient pas été assurés.
Or, notamment par une attestation du 24 avril 1997, le président de l’association confirme que la Société Mayday a bien effectué les services faisant l’objet du contrat du 10 août 1989.
Le litige est donc porté devant le tribunal administratif de Paris qui, par un jugement du 9 avril 2002, condamne la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT au paiement de la somme réclamée par la Société Mayday Sécurité. La COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT fait appel contre ce jugement. Par un arrêt du 20 avril 2005 la cour administrative d’appel de Paris rejette cet appel et confirme la condamnation du paiement de la somme demandée. Le 22 juin 2005, la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT se pourvoit alors en cassation contre cet arrêt.
Plusieurs éléments font surface au cours des procédures.
Devant le tribunal administratif de Paris, la Société Mayday Sécurité base sa demande de paiement sur le contrat conclu le 10 août 1989.
La COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT, en raison de la nullité du contrat, demande le versement de 3.500 € à la charge de la Société Mayday Sécurité, fondé sur l’article L. 761-1 du Code de la justice administrative.
La Société Mayday Sécurité, devant la cour administrative d’appel de Paris, invoque des éléments juridiques supplémentaires : l’enrichissement sans cause ainsi que la faute de de l’association gestionnaire de la piscine de Boulogne-Billancourt d’avoir conclu un contrat nul. Du moment où la nullité du contrat est imputable à une faute de l’administration, son cocontractant peut demander réparation du dommage lié directement à cette faute. La Société Mayday Sécurité demande ainsi le paiement du bénéfice dont elle a été privé à cause de la nullité.
La COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT semble répliquer que la Cour doit limiter le droit d’indemnisation aux dépenses réelles que la Société a engagées pour satisfaire les besoins du service public que l’association était chargée d’assurer. Or, la Cour a dénaturé les pièces du dossier en ne prenant pas en compte l’absence de demande concernant certaines prestations que la Société Mayday Sécurité a fournies au printemps 1996. Avec sa demande d’indemnisation, celle-ci dépasse donc le montant que l’exécution du contrat lui aurait procuré. D’autre part, puisqu’il s’agit d’un contrat administratif, les prix que la Société Mayday facture doivent s’entendre hors taxes.
Dans quel mesure les règles du droit public sont-elles applicables à un contrat passé entre 2 personnes privées ?
Sur le principe, afin de résoudre les différents points du présent litige, le juge administratif a appliqué les règles du droit civil des contrats, mais celles-ci produisent un effet sur l’administration.
La restitution en cas de nullité d’un contrat avec des choses non restituables s’opère par une indemnisation des dommages causés. En l’occurrence, l’administration a bénéficié de prestations dont elle a fait commande à une société privée. Les prestations ont été fournies aux dépens de la société qui a ainsi le droit de se voir restituer par une indemnité l’équivalent de son investissement, à l’exception des prestations non demandées, bien entendu.
D’autre part, la collectivité publique n’est généralement pas soumise au régime de la TVA pour ses services. Dans le cas présent cependant, le juge a appliqué les dispositions valables pour la facturation de livraisons de biens et de prestations de services effectuées à titre onéreux. Selon l’article 256 du Code général des impôts, il en découle que le montant de l’indemnisation doit être calculé sur une base TTC et non pas hors taxes. Le Conseil d’État annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris dans la mesure où celle-ci fait une erreur d’appréciation sur les sommes dues par la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT à la Société Mayday Sécurité. Ne peuvent être pris en compte que les frais des prestations effectivement commandées et qui s’entendent TTC. Par cette décision, il réforme corollairement le jugement du tribunal administratif de Paris dans les points qui diffèrent de l’arrêt présent, concernant aussi l’appréciation du montant réclamé.
Il faut souligner que le Conseil d’État confirme l’argument de l’enrichissement sans cause par la faute de l’administration car c’est derrière la nullité du contrat que celle-ci se positionne pour ne pas régler les factures.
Si tous les contrats que conclut l’administration ne sont pas forcément des contrats administratifs, il est possible en revanche que certains contrats conclus entre deux personnes privées le soient. Dans le présent conflit, le contrat, tout en étant qualifié d’administratif, est de d’apparence passé entre 2 personnes privées. Pour résoudre le problème, le juge doit dans un premier temps vérifier le statut de la personne morale fautive (I) afin de pouvoir se prononcer ensuite sur la responsabilité à assumer (II).
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