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Analyse de texte Karl Jaspers, Introduction à la philosophie, 1936

Commentaire d'oeuvre : Analyse de texte Karl Jaspers, Introduction à la philosophie, 1936. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Février 2023  •  Commentaire d'oeuvre  •  3 442 Mots (14 Pages)  •  859 Vues

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On a tendance dans notre vie de tous les jours à vouloir trouver et s’appuyer sur des certitudes afin de comprendre le monde et d’avoir une action efficace sur le réel. C’est une des raisons pour lesquelles nous fondons des opinions c’est-à-dire des croyances qui sont objectivement incertaines mais que nous prenons la plupart du temps pour certaines et indiscutables. Mais cette recherche constante de la certitude est-elle si bénéfique que cela ?

Le texte qui est porté à notre étude est un texte de Karl Jaspers tiré de son Introduction à la philosophie. Dans cet extrait, l’auteur tente d’identifier ce qui fait la valeur de la philosophie et identifie deux éléments : l’incertitude de ses résultats et la grandeur des objets qu’elle contemple.

Cette thèse peut sembler étonnante puisque d’habitude on considère que ce qui est certain a plus de valeur que ce qui est incertain. C’est par exemple pour cela qu’on valorise énormément la science puisqu’elle nous délivre des informations certaines au détriment de la philosophie qui passe pour une discipline hasardeuse dont les résultats sont improuvables. Or, c’est précisément ce qui, selon l’auteur, confère toute sa valeur à la philosophie. C’est précisément sur ce point que le texte nous invite à réfléchir en remettant en question notre besoin spontané de certitudes et en nous montrant les bienfaits de l’incertitude. En quelle mesure peut-on dire qu’il est bon de cultiver l’incertitude et donc qu’il est bon de philosopher ?

L’auteur va répondre à cette question en 3 moments :

Dans un premier moment du début du texte à la ligne 7 « avec mépris », il va montrer les méfaits que produit la non-pratique de la philosophie.

Dans un second moment de la ligne 7 « mais […] à peine » à la ligne 15 « un jour inattendu », l’auteur va montrer les bienfaits de la pratique de la philosophie.

Enfin, dans un dernier moment de la ligne 15 « mais à côté » à la fin du texte, il va montrer une autre valeur propre à la philosophie qui est la grandeur des objets qu’elle contemple et sa capacité de nous faire sortir du règne utilitaire des fins.

Le texte démarre sur une des thèses principales du texte à savoir que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. La certitude est le caractère de ce dont l’esprit ne doute pas alors que l’incertitude est ce dont l’esprit doute. Communément, on considère l’incertitude comme un défaut ou une lacune. L’incertitude est ce qu’on cherche à compenser par connaissance. Par exemple, la science nous donne des certitudes : grâce à la science, on peut être certains d’un certain nombre de lois puisqu’elles sont démontrées ou expérimentées. Par exemple, on peut être certain que « la somme des angles d’un triangle fait 180° » parce que c’est démontré ou qu’un « corps chauffé à 100° devient gazeux » parce que c’est prouvé expérimentalement. La philosophie ne donne pas des résultats aussi certains. Il y a plusieurs raisons à cela dont la principale est qu’elle ne se limite pas à expliquer des phénomènes matériels mais aussi des choses immatérielles comme la justice, la liberté, le bonheur, etc. Ainsi, elle ne peut faire d’expérimentation pour prouver ce qu’elle dit et ses affirmations demeurent incertaines. Or, et contrairement à ce qu’on pourrait penser, l’auteur n’affirme pas que l’incertitude de la philosophie en est un défaut mais au contraire que c'est ce qui fait sa valeur. L’auteur va expliquer pourquoi dans les lignes suivantes.

D’abord, il va décrire ce qu’il se passe dans la vie d’une personne en l’absence de pratique de philosophie. Celui-ci « traverse l’existence comme un prisonnier » (ligne 2) en précisant de quel type d’emprisonnement il s’agit : il est « prisonnier des préjugés du sens commun, des croyances de son pays ou de son temps, de convictions qui ont grandi en lui sans la coopération ni le consentement de la raison » (ligne 2 à 4). De quoi parle l’auteur ? Il fait référence à l’opinion c’est-à-dire à l’ensemble de croyances que forme un homme dans le cours normal de son existence. Une opinion n’est pas forcément fausse mais toujours injustifiée. Par exemple, les hommes opinent que la terre tourne autour du soleil ce qui est vrai mais ils sont incapables de justifier cette affirmation en l’expliquant scientifiquement. Les croyances d’opinion sont reçues sans ou avant la pratique de la philosophie qui nous permet de savoir comment on justifie rationnellement une affirmation. Avant ou sans philosophie, on prend pour vrai sans savoir comment on s’assure qu’une affirmation est vraie. Ainsi, on entend dire et on répète sans prendre le temps et faire l’effort de vérifier rationnellement la vérité de l’affirmation. Puisque rares sont les hommes qui philosophent alors les opinions sont très répandues. Par exemple, on entend souvent dire que « le froid rend malade » ou d’autres affirmations plus graves et porteuses de violence comme « la femme est inférieure à l’homme » ou que « l’homosexualité est contrenature » alors que ces affirmations n’ont pas de justification rationnelle.

Ainsi, les opinions nous sont imposées de l’extérieur et sont avalées tout crues sans capacité de remise en question. Kant dans Qu’est-ce que les lumières ? nomme cet état la minorité et affirme que les hommes trouvent un confort tout particulier à y demeurer. En effet, les opinions nous donnent un sol ferme pour comprendre le réel d’une manière simple voire simpliste et répondre aux questions qu’on se pose. On le voit : l’individu est extrêmement passif dans le processus d’intégration de l’opinion. C’est pourquoi l’auteur affirme qu’elles sont reçues « sans la coopération ni le consentement de la raison ».

La passivité n’est pas la seule caractéristique de l’opinion : il y a aussi sa dimension dogmatique : « Tout dans le monde lui paraît aller de soi, tant les choses sont pour lui comme ceci et pas autrement, tant son horizon est limité ; les objets ordinaires ne le questionnent pas, les possibilités peu familières sont refusées avec mépris » (ligne 4 à 7). En effet, l’opinion refuse le réel dans sa complexité et refuse la remise en question. Elle offre des réponses simples et vise à nous rendre certains. Or, cette certitude n’est pas une vertu mais une lacune. C’est en effet parce qu’on n’a pas assez conscience de la complexité du réel et de l’imperfection de nos connaissances qu’on ne les remet pas en question. On peut illustrer cela avec la légende de l’Oracle de Delphes racontée par Platon dans l’Apologie de Socrate : l’oracle vient à Athènes et demande à

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