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B- La remise déterminée par la tromperie

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Par   •  30 Janvier 2016  •  Dissertation  •  7 316 Mots (30 Pages)  •  766 Vues

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B- La remise déterminée par la tromperie

        A la différence du vol, le bien n’est pas soustrait, pris, enlevé à la victime contre son gré. Il est remis volontairement à l’escroc, en conséquence des manoeuvres diverses dont il vient d’être question.

        La remise est indispensable à la constitution de l’E. Il était question plus haut du procédé de la chaîne. Il arrive que ce procédé soit malveillant ou maladif, l’auteur exigeant seulement la circulation gratuite du document : dans ce cas il n’y a pas E, faute d’exigence d’une remise.

        Le terme « déterminer » est bien interprété strictement. la r doit être impérativement antérieure à la T : voir Crim. 31 oct.2001, où la présentation  du faux écrit avait non pas déterminé la T puisqu’elle était antérieure au versement du premier acompte, mais l’avait seulement confortée, pour le vers.  du solde.

        En quoi doit consister cette remise ? Elle doit consister en un avantage financier : l’E est une atteinte aux biens. Mais il peut y avoir trois types de remises :

        - la remise d’un bien (qu’il s’agisse d’un bien matériel, de choses certaines, ou bien de fonds, de valeurs) : les immeubles sont exclus du domaine de l’E comme de celui du vol (crim.15 juin 1992 - DP comm.281), mais pas le prix ou le titre de propriété ou de servitude ; peu importe enfin la forme de la remise (espèce, chèque, virement...) ;

        - la fourniture d’un service : c’est à ce stade qu’il faut bien distinguer l’E de la filouterie (d’aliment - grivellerie -, de carburant), incriminée à part, et à laquelle manquent les manoeuvres frauduleuses (se faire servir un repas est une attitude normale, il n’y a pas de telles manoeuvres même si le filou n’a aucune intention de payer dès le départ).

        Nous parlons ici de l’E aux prestations de service : ce type de remise n’était pas admis comme constitutif de l’E par l’ancien art.405 (mais la JP l’avait parfois admis :voir les E au parcmètre, où l’objet de la remise n’est évidemment pas une valeur, mais un temps de stationnement, donc un service : crim.4 mai 1987-B. n°175). Comme celui du vol, l’objet de l’E s’est donc dématérialisé.

Toute prestation ou tout droit à une prestation de service semble désormais incriminé au titre de l’E. par exemple, la personne qui fait effectuer des travaux pour une société fictive, laquelle ne les honorera pas bien entendu, faute d’existence.

Consentement à un acte opérant obligation ou décharge :

- Acte opérant obligation : c’est obtenir non pas directement une valeur, mais son anticipation (promesse de vente, reconnaissance de dette, droit de location, contrat de prêt..); « tous les actes qui forment un lien de droit » dit la JP.

- Acte opérant décharge : qui paye ses dettes s’enrichit, dit-on ; qui obtient le paiement de ses dettes par des manoeuvres frauduleuses s’enrichit donc par ces manoeuvres. La remise est dans ce cas celle d’une quittance, ou d’un reçu.

Le préjudice causé par la remise :

Le préjudice causé par la remise est-il une condition de la constitution de l’infraction, ou simplement une condition de l’action civile, comme elle l’est toujours ? Y -t-il vraiment atteinte aux biens s’il n’y a pas de préjudice causé à la fortune d’autrui (comme s’exprimait l’ancien code) ? Il se peut en effet que la remise n’ait pas causé de préjudice. Si par exemple le chèque remis n’a pas pu être encaissé, parce qu’il était sans provision, ou parce que le banquier était averti de la supercherie, y a-t-il E ou seulement tentative d’E ? La JP répond en général que l’infraction est constituée dès lors qu’il y a eu remise (crim.19 décembre 1979).  Pourtant un arrêt du 26 octobre 1994 (BC n°341) a décidé que la remise d’un titre de séjour par l’administration ne constitue pas « une atteinte à la fortune d’autrui »  (la carte avait été obtenue grâce à une escroquerie au mariage) ; il faut dire que le nouveau texte exige la condition d’un préjudice. Selon M. Pradel, la JP pourrait maintenir sa position antérieure en considérant comme préjudice le fait d’avoir été privé d’une liberté, celle de consentir ou non à l’acte.

        Les juges peuvent néanmoins prendre en compte l’absence de préjudice au niveau de la peine, qui doit être individualisée, particulièrement par les techniques de la dispense de peine (art.132-58) ou de l’ajournement (art.132-59), applicables à tout délit (comme à la quasi-totalité des contraventions) : encore faut-il qu’ils considèrent le trouble social comme apaisé (cela n’est probable que dans le cas d’une E où la tromperie est légère peu pernicieuse. Mais de toute façon, l’infraction est constituée et il y aura, le cas échéant, déclaration de culpabilité.

        L’absence de préjudice est en tout cas un obstacle à l’action civile : l’action publique pourra être alors seulement déclenchée par le parquet. Par exemple, un mari s’était porté partie civile pour le préjudice subi par sa femme (escroquée par un « désenvoûteur », et qui n’avait peut-être pas osé ou voulu agir elle-même) : la ch.crim. estime l’action civile recevable parce que l’argent remis par la femme était de l’argent commun ; il en aurait été autrement si les époux avaient mariés sous le régime de séparation de biens, ou si la défense avait pu démontrer que les fonds remis étaient propres (crim.9 juillet 1996).

        2°) L’élément psychologique

        L’E est un délit intentionnel, bien évidemment. On ne conçoit pas une E par imprudence. Celui qui trompe doit être de mauvaise foi, il n’escroque personne s’il se trompe lui-même. Rappelons que la preuve de l’intention appartient à l’accusation. Mais les juges se contentent souvent d’une démonstration faite à partir des faits. Si les manoeuvres sont très élaborées (du type de celles commises chez le bijoutier : voir plus haut), l’intention ne fera pas de doute. En revanche, il est des cas où la mauvaise foi de l’auteur n’est pas évidente (cf le cas des voyants). De plus, l’intention doit-elle seulement consister dans la conscience d’induire autrui en erreur pour s’en faire remettre quelque chose ?  L’intention ne doit certes pas être confondue avec le mobile (par exemple un escroc peut s’être procuré la somme afin de la remettre à son tour à une association caritative, ou bien pour récupérer le montant d’une dette) : le mobile est indifférent.

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