Commentaire de texte sur le dénouement De la tragédie Phèdre de Racine

I. La mort de Phèdre est typique d'une tragédie classique.

1 / Dénouement respectueux des règles du classicisme

Ce dénouement est tout d'abord nécessaire, ce qui signifie qu’il faut que le hasard en soit absent car il doit découler logiquement des données de la pièce. Ici, c’est bien le cas. Si la Phèdre d'Euripide meurt avant d’avoir pu réhabiliter Hippolyte, voire en l’accusant ; la Phèdre racinienne est nimbée d’une certaine grandeur qui rend vraisemblable sa volonté de mourir en femme honnête. C'est pour cela qu'elle réhabilite in extremis la mémoire de celui qu’elle aime. Ce dénouement est aussi complet, puisqu’il ne laisse aucune donnée de la pièce de côté ; le sort de tous les personnages majeurs de la pièce est fixé et tout les problèmes posés par la pièce se résolvent. Hippolyte et Oenone sont morts, ne restent comme personnages que Phèdre, Thésée et Aricie. Or, ces trois personnages voient leur sort ici réglé : Phèdre meurt en réhabilitant Hippolyte, et Thésée décide de continuer à vivre en adoptant Aricie (ce qui est assez étonnant vu qu'elle avait été assez négligée dans les dernières scènes). Enfin, le dénouement est aussi rapide, une vingtaine de vers suffit à Phèdre pour rétablir la vérité ; Racine explique d'ailleurs pourquoi ce dénouement est si succinct, l’effet du poison obligeant Phèdre à faire un aveu rapide « Les moments me sont chers ». De même, les personnages ne s’attardent pas sur la mort de Phèdre qui est rapide ; Panope se contente de dire « elle expire, Seigneur ». Quant à la dernière réplique de Thésée, elle est, elle aussi, assez lapidaire et riche. En une dizaine de vers seulement, il se lamente sur sa situation, annonce qu’il va s’occuper des funérailles de Thésée et adopter Aricie.

2/ Dénouement tragique

Ce dénouement, plus que tout autre extrait de la pièce, est marqué non seulement par la tonalité tragique mais aussi et surtout par l’invasion des thèmes principaux du questionnement tragique : la question de la culpabilité et de l’erreur.

La tonalité tragique se voit tout d'abord par une ponctuation exclamative, rehaussée par des interjections « Ah ! père infortuné ! » permettant de mettre l'accent sur les émotions tragiques comme dans ce cas-ci le désespoir. Mais elle se voit aussi par la mise en place d'une temporalité tragique, permise grâce à l'absorption du poison créant ainsi un véritable compte à rebours fatal. On retrouve aussi le champ lexical propre à la tragédie.

Phèdre souligne d’elle-même le problème de sa culpabilité en s’accusant d’abord, puis en accusant les dieux. Phèdre se sait le jouet d’une volonté divine ; mais a conscience de la faute qu’elle a commise en tombant amoureuse de son beau-fils. Cette dimension double de culpabilité et d’innocence combinées est le propre du héros tragique qui est manipulé par les forces du destin et qui fait des choix raisonnés le conduisant à sa perte : Phèdre tombe amoureuse par fatalité, mais choisit délibérément d’avouer son amour et de ne pas sauver Hippolyte de la mort.

Aristote décrit le héros tragique comme celui qui « tombe dans le malheur non pas à cause de ses vices ou de sa méchanceté mais à cause de quelque erreur » ; d'ailleurs Thésée parle de « mon erreur ». Il fait allusion au « vœu » qu’il a formulé pour la mort d’Hippolyte, vœu qu’il « déteste » et qu’il rapporte à sa « fureur » : Thésée reconnaît ainsi avoir eu une attitude excessive et avoir été aveuglé par sa colère. L’interjection « hélas ! » souligne d'ailleurs son désespoir face à cette

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